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Les banques au pays des Soviets

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Published : February 08th, 2012
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Category : Editorials

 

 

 

 

Quelle surprise ! c’est hors de la lumière des projecteurs que va se réaliser l’examen du dossier du renforcement des fonds propres des banques européennes. Après analyse banque par banque, l’EBA (European banking authority), leur régulateur, avait fixé leurs besoins à 114,7 milliards d’euros, avec obligation d’y répondre d’ici à la fin juin 2012. Étape intermédiaire, les trente banques concernées devaient au 27 janvier présenter leurs plans de recapitalisation. C’est maintenant chose faite.


Démentant immédiatement comme « fausses et trompeuses » des informations publiées par le Financial Times, selon lesquelles « presque la moitié des mesures figurant dans ces plans ne semblent pas crédibles », l’EBA s’est au contraire déclarée « impressionnée par la volonté des banques de prendre les mesures appropriées », annonçant qu’elle s’exprimerait après la rencontre du conseil de ses superviseurs, les 8 et 9 février. Sous la forme probable d’une évaluation globale, et non pas banque par banque, des plans qui lui ont été soumis.




(illustration par Sébastien Marcy)


L’une des sources – non identifiée – du quotidien britannique a détaillé deux des méthodes favorites utilisées pour artificiellement gonfler les fonds propres des banques : améliorer la valorisation de leurs actifs à risque en la recalculant, surestimer les ventes à venir d’actifs peu attractifs.


Une fois de plus, l’EBA est au nœud des contradictions européennes. D’un côté, elle est la gardienne du temple et doit remplir à ce titre sa mission, de l’autre, elle est soumise aux intenses pressions des gouvernements qui craignent que des besoins de renforcement des fonds propres trop importants nuisent à l’activité de crédit des banques (ainsi qu’aux ratios de rentabilité de celles-ci, doit-on ajouter pour ne rien oublier). Sous la pression des régulateurs nationaux – en particulier des Allemands, Espagnols et des Italiens – ainsi que de la BCE, l’EBA se prépare une nouvelle fois à composer, agissant ainsi dans la lignée de ses stress tests complaisants.


En réalité, c’est le refus d’envisager la restructuration de la dette des banques qui est derrière cette attitude, avec pour conséquences l’intervention de la BCE que l’on connaît et son exposition grandissante, telle une « bad bank », aux actifs acceptés des banques à titre de collatéral. Qu’elles soient privées ou publiques, les dettes doivent être à tout prix honorées ! Le désendettement doit donc emprunter un autre chemin, on voit lequel en Grèce où les manifestations d’aujourd’hui se déroulent sous une banderole proclamant « ça suffit, on n’en peut plus ! ». Forcé et contraint, le système financier accepte de maigrir, à condition de ne pas en subir les conséquences.


Le cas de l’Espagne est exemplaire de ces tours de passe-passe, si l’on regarde de plus près le plan d’assainissement des banques présenté par Luis de Guindos, le ministre de l’économie. Il s’appuie d’abord sur des données de la Banque d’Espagne datant de juin dernier pour calculer les dépréciations que les banques vont devoir opérer sur leurs actifs immobiliers. Les unes après les autres, les banques espagnoles égrènent ce matin le montant des nouvelles dépréciations qu’elles vont inscrire dans leurs livres (pour l’instant 6 milliards d’euros sur les 50 demandés), dans le cadre d’une opération vérité douteuse présentée comme un assainissement « une fois pour toutes ». On connait la chanson.


Le plan brouille ensuite les cartes en lançant une chasse au trésor au prétexte de restructuration du système bancaire. Celle-ci va être l’occasion de déployer les plus ingénieuses ressources comptables afin de mieux présenter à l’arrivée les bilans toilettés d’un système concentré. L’Espagne se prépare à être l’exemple le plus abouti d’une intense concentration de son système bancaire au profit de mégabanques qui doivent leurs résultats actuels à leurs activités latino-américaines.


Enfin, il permet de gagner du temps, ce capital le plus précieux quand on est coincé, et de faire appel aux investisseurs au nom de ce paysage pacifié, en leur proposant des obligations convertibles contingentes (CoCos) ; ceci bien que le sort de ces titres de dette hybrides reste incertain, toujours entre les mains du Comité de Bâle et de l’EBA qui n’ont pas clairement statué à propos de leur éligibilité aux fonds propres durs.


Si l’on se tourne du côté italien, les établissements bancaires y multiplient les opérations de rachat de leur dette afin de renforcer leur ratio de fonds propres. Utilisant les fonds de la BCE et mettant à profit un opportun assouplissement réglementaire de la Banque d’Italie, ils rachètent sur le marché des titres de dette qui ne seront plus reconnus au titre des fonds propres dès 2013. Diminuant leur endettement, ils améliorent ainsi leur ratio à fonds propres identiques, tout en réalisant des plus-values en raison des conditions de marché.


Au pays des soviets, les façades étaient trompeuses.



 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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