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Les Banques Centrales, dernier recours à contre cœur

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Published : November 02nd, 2010
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Category : Editorials

 

 

 

 

En adoptant le principe d’une révision du traité de Lisbonne afin de pérenniser un dispositif collectif de sauvetage financier d’un Etat en difficulté, les 27 de l’Union européenne se sont engagés dans un tournant dont il ne voient pas la fin.


Ce premier coup de canif dans le contrat de mariage pourrait en effet être suivi d’autres. Reconnaître l’hypothèse que certains pays ne seraient pas en mesure de respecter le contrat d’austérité qu’il leur est exigé de suivre pourrait impliquer que, pour d’autres, du mou devrait être donné à la laisse. Mais n’anticipons pas…


Dans l’immédiat, à peine engagé, ce tournant a suscité une passe d’arme entre Jean-Claude Trichet et Nicolas Sarkozy, rapportée de plusieurs sources. « J’ai l’impression que certains ne se rendent pas compte de la gravité de la situation » a tonné le premier, en pure perte.


Non seulement le président de la BCE n’a pas obtenu gain de cause sur un sujet à propos duquel il s’était exprimé sans ambages – l’automaticité des sanctions pour les pays allant hors des clous – mais il n’a pu empêcher que soit adopté un mécanisme anti-crise qui pourrait selon lui susciter sans tarder une réaction des marchés, furieux devant la perspective de devoir participer demain à d’éventuelles restructurations de dette. Ou, pour le dire sans détours, craignant que les banques européennes ne causent une nouvelle hausse des taux obligataires de pays comme la Grèce et l’Irlande. Pour commencer.


La BCE a été en effet prise à contre-pied par les décisions du dernier sommet de Bruxelles et craint de devoir en assurer les conséquences. Pour la seconde fois, alors qu’elle tentait de très progressivement réduire la voilure de ses programmes de soutien financiers, elle se retrouve devant la perspective de devoir au contraire se préparer à les étendre. Renvoyant dans leurs dix-huit mètres Alex Weber et ses compagnons du camp des faucons, pour reprendre la terminologie utilisée aux Etats-Unis pour désigner ceux qui voudraient voir la Fed également lever le pied.


Précisément. cette dernière se prépare à agir, suivie par ses consœurs britanniques et japonaise. Mettant la BCE dans une autre situation d’isolement délicate. Toutes les banques centrales se réunissent cette semaine, la BCE le faisant jeudi prochain, en dernier, avec un conseil des gouverneurs qui risque d’être aussi animé que l’est depuis quelque temps le comité de politique monétaire de la Fed.


Les banques centrales sont désormais au cœur des contradictions, écartelées entre le respect de leurs traditions et de leurs dogmes et la nécessité d’agir. Plus que jamais expression d’un fragile dernier recours qui ne permet que de temporiser, mais ne règle rien. Progressivement, elles en viennent à garantir la dette des Etats, certains de ces derniers et non des moindres n’y parvenant plus. La confiance des marchés reposant de plus en plus sur leurs épaules, qu’elles risquent d’avoir trop étroites.


Mais de nouvelles émissions monétaires – pour les banques centrales libres de les effectuer – seront-elles une solution ? La BCE ne sera-t-elle pas à son tour entraînée, à son corps défendant et à celui de ses mandants allemands, dans la même nécessité  ? Céder d’un pas, c’est devoir se préparer à reculer en en faisant d’autres, doivent se dire non sans raison les tenants de la ligne intransigeante.


La restructuration de dettes désormais admise dans son principe par les Européens, d’autres ne vont-ils pas être tentés d’évaluer la possibilité d’emprunter ce même chemin ? Après tout, ne s’oriente-t-on pas, irrévocablement mais lentement, vers la remise à zéro des compteurs monétaires que représenterait une réforme du système monétaire internationale  ? Une autre mise à plat ne va-t-elle pas être nécessaire  ?


Des gouffres s’ouvrent sous les pieds de ceux qui tentent de conserver leur équilibre et de préserver leurs fondamentaux. Qu’ils veuillent bien excuser cet emprunt à leur langage ampoulé, ils ne sont plus à cela près  !


Jean-Claude Trichet vient de s’écrier «Ma cassette ! ma cassette ! » à la seule évocation d’une éventuelle restructuration des dettes d’un petit pays européen qui ne devrait dans le pire des cas – selon lui – intervenir qu’après la mi-2013, lorsque la révision light du traité de Lisbonne sera intervenue. Qu’en sera-t-il demain, si l’hérésie suprême qui consisterait à aller chercher l’argent là où il se trouve pour renflouer les Etats déséquilibrés par leur soutien au système financier privé gagnait du terrain et finissait par s’imposer ? Au lieu de produire à grands frais de nouvelles dettes pour en financer d’anciennes ?


Etouffée à l’époque par les Américains, une étude interne au FMI avait abouti il y a quelques années à une nouvelle approche de la restructuration de la dette souveraine. Elle reposait sur une transposition de la loi sur les faillites américaines et impliquait la création d’un tribunal international. Le mécanisme n’a jamais été lancé, mais il pourrait susciter des vocations, sauf qu’il ne s’agirait pas cette fois-ci de traiter des dettes d’un seul pays…


Cela serait une excellente manière de procéder, à la faveur d’une telle remise de peine, à la réduction de la gigantesque et dévastatrice bulle financière qui s’est constituée. Pour commencer.


Car, publique ou privée, il n’y a en réalité qu’une seule bulle. Ses débiteurs sont différents mais ses créanciers sont les mêmes. La machine à faire de la dette se confond avec celle à faire de l’argent et la bulle, à force, ne cesse d’enfler en dépit des accidents de parcours. Le gros accident qui est en cours est trop important et a donné un signal qu’il va falloir se résigner à entendre : cela ne peut plus repartir comme avant.



Billet invité : François Leclerc

 


Paul Jorion

pauljorion.com



(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.



Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).


 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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