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Il y a quelques
semaines, avant le sommet du G20, le gouverneur de la banque centrale
chinoise a fait un discours remarqué laissant entendre qu'il
fallait mettre fin au rôle actuel dominant du dollar américain
comme monnaie internationale de réserve, pour se tourner vers une
monnaie supranationale plus stable et moins facilement manipulable par un
gouvernement.
Zhou Xiaochuan avait alors mentionné les
Droits de tirage spéciaux (DTS), une monnaie artificielle
inventée par le FMI en 1969 et basée sur un panier d'autres
monnaies-papier nationales. Des commentateurs avaient perçu cette déclaration
comme une mise en garde du gouvernement chinois envers les autorités
américaines: Nous sommes votre principal créancier. Si vous
cherchez à régler vos problèmes en créant trop
d'argent, en dépréciant votre monnaie et en diluant ainsi la
valeur de nos réserves, nous pourrions réagir en diversifiant
nos actifs et en cessant de vous prêter toujours plus de milliards.
Les Chinois sont en
effet les plus grands détenteurs de titres en dollars, leurs
réserves s'élevant à environ 2 billions $. Si le dollar
venait à être dévalué, ils perdraient beaucoup.
Cela fait des années
qu'on voit venir ce crunch inévitable
résultant des politiques inflationnistes de la Fed, des politiques mercantilistes
des Chinois et d'autres pays émergents, et des
déséquilibres monétaires qui découlent de ces
politiques. La différence est que maintenant, ces
déséquilibres atteignent peut-être un point critique et
les Chinois pourraient être sur le point de faire autre chose que
simplement lancer des messages plus ou moins subtils.
À la fin du
mois d'avril, le gouvernement chinois a annoncé qu'il avait
augmenté ses réserves d'or de 76% au cours des six derniers
mois et a demandé au FMI de vendre ses réserves de façon
à pouvoir en acheter davantage. On ne parle donc plus de morceaux de
papier dont la valeur artificielle ne tient qu'à un sceau
apposé par des bureaucrates, comme les DTS, mais d'un actif solide. Le
signal envoyé non seulement aux gouvernements mais aux marchés
est beaucoup plus clair. Comme le souligne un très intéressant
article rapportant la
nouvelle, « ...quite a few experts said the move solidifies gold's
place as a monetary asset, and shows that it's destined for a brighter
future ».
Voilà un pas dans la
bonne direction, qui va probablement accélérer l'effondrement
inévitable du dollar.
La Fed, qui alimente
l'économie mondiale depuis des décennies avec du faux argent,
encore plus depuis la rupture du dernier lien du dollar avec l'or sous Nixon
en 1971, est la première source mondiale d'inflation monétaire
et de distorsions économiques. Cette situation permet aux
Américains de vivre au-dessus de leurs moyens. Le statut de monnaie
internationale de réserve du dollar a en effet contribué
à financer beaucoup plus facilement leurs guerres impérialistes,
leur consommation irresponsable et leur endettement vertigineux. Les dollars
additionnels créés qui se retrouvent dans des voûtes de
banques étrangères ne suscitent en effet pas de hausses de prix
aux États-Unis – tant que les étrangers veulent en
accumuler toujours davantage – ce qui aurait rendu une telle politique
inflationniste insoutenable. En utilisant le dollar comme principale devise
pour les transactions internationales et l'accumulation de réserve, le
reste du monde subventionne à toutes fins pratiques le pouvoir d'achat
des Américains.
Pendant ce temps, les États-Unis sont toutefois devenus un pays
socialiste avec une économie de moins en moins productive et
compétitive, la banqueroute du secteur automobile n'étant que
l'exemple actuel le plus patent. Leur économie n'est plus aussi
dominante qu'au moment où le système de Bretton-Woods a été mis en place après la
Seconde Guerre mondiale. Sur la base de ce qu'ils produisent et de la demande
étrangère pour leurs biens et services, les Américains
devraient, aujourd'hui, avoir un niveau de vie bien moins
élevé. La crise actuelle met au jour de façon encore
plus évidente toutes ces distorsions et tous ces
déséquilibres.
À
l'échelle internationale, les réserves d'or chinoises restent
modestes. Mais la Chine est également le principal pays producteur
d'or, et c'est la tendance qui est importante. Les Chinois n'ont certainement
pas intérêt à ce que le dollar s'effondre à court
terme, mais les politiques inflationnistes de la Fed et du gouvernement Obama menacent la valeur de leurs immenses
réserves. La situation est intenable à moyen terme et les force
à chercher des solutions alternatives.
Le président de Centennial Precious
Metals, Michael Kosares, note dans
l'article que
« China, true to its reputation for patience and steady, long-term
progress toward its goals, has taken the golden path and now they want the
world to know about it ».
On doit en effet
reconnaître que les Chinois manifestent des préférences temporelles plutôt
basses. Depuis quatre décennies, leur pays s'ouvre toujours davantage
à l'économie de marché et s'enrichit à vive
allure. Ils ont une éthique du travail et un sens de l'entrepreneurship développés, et
épargnent beaucoup. Le gouvernement chinois, non-démocratique,
est moins sujet aux pressions de l'opinion publique et des groupes
d'intérêt parasitaires qui tentent de monnayer leur appui
politique en échange de transfert de fonds publics et de
privilèges, comme c'est le cas dans nos pays occidentaux.
Un tyran
étatique reste bien sûr un tyran étatique, mais il y en a
qui ont des politiques moins pires que d'autres. Et la Chine aura
contribué plus que n'importe quel pays au monde à la
mondialisation et à l'avancement de l'économie de marché
à la fin du 20e et au début du 21e siècle.
Cette contribution
s'avérerait encore plus cruciale si les Chinois décidaient
d'appuyer activement le retour de l'étalon-or comme base du
système monétaire mondial, en remplacement du système
actuel fondé sur les monnaies fiduciaires et la domination du dollar.
Les monnaies fiduciaires sont la quintessence du court-termisme.
Elles sont sujettes à toutes les manipulations et constituent un
levier incontournable de toute politique d'inspiration keynésienne (ou
friedmanienne) pour stimuler l'économie. Les
États peuvent constamment déprécier leur monnaie pour
atteindre des objectifs à court terme, en repoussant les
conséquences néfastes à plus tard.
Sauf que le long terme
finit toujours par nous rattraper. Et nous payons aujourd'hui pour les
politiques désastreuses de la Fed et des autres banques centrales (y
compris celles de la Chine, notons-le, qui sont loin d'être parfaites).
Il aurait été impossible de mettre en oeuvre
ces politiques, à tout le moins avec une telle ampleur, dans un
régime d'étalon-or. C'est pourquoi toute indication d'un retour
en force de l'or comme base monétaire ne peut qu'être une bonne
nouvelle pour ceux qui croient dans la liberté et la
rationalité économique.
Martin
Masse
Le Quebecois
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les articles de Martin Masse
Martin
Masse est né à Joliette en 1965. Il est diplômé de
l'Université McGill en science politique et en études
est-asiatiques. Il a lancé le cybermagazine libertarien
Le Québécois Libre
en février 1998. Il a été directeur des publications
à l’Institut économique de Montréal de 2000
à 2007. Il a traduit en 2003 le best-seller international de Johan Norberg, Plaidoyer
pour la mondialisation capitaliste, publié au Québec par
l'Institut économique de Montréal avec les Éditions
St-Martin et chez Plon en France.
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