Nous
avons désormais une explication pour le paradoxe de Gibson (publiée ici), un puzzle qui a mis en déroute les
économistes grand public depuis Fisher jusqu’à Keynes, en passant par
Friedman.
Le meilleur moyen
d’illustrer ce puzzle est d’utiliser deux graphiques, le premier montrant une
preuve empirique de la corrélation des taux d’intérêt avec les niveaux de
prix.
Et un deuxième montrant
l’absence de corrélation entre les taux d’intérêt et les transformations
annuelles des niveaux de prix, c’est-à-dire le taux d’inflation.
La solution à ce puzzle
est très simple : au sein d’un marché libre, les taux d’intérêt sont
établis par la demande des entreprises qui investissent, qui versent un taux
d’intérêt basé sur la hausse ou la baisse des prix de leurs produits -
d’où la corrélation.
Le second graphique
montre que les politiques des banques centrales, qui cherchent à contrôler
les prix en déterminant les taux d’intérêt, ne sont pas justifiées. Elles
sont les conséquences d’une acceptance aveugle de la théorie quantitative de
la monnaie, sur laquelle est basée la macroéconomie.
L’une des erreurs
commises par les banquiers centraux est de croire que le prix de la monnaie
est son taux d’intérêt, plutôt que la réciproque du prix des produits contre
lesquels elle est échangée. Les taux d’intérêt sont une préférence temporelle
monétaire, qui sur les marchés libres reflète la préférence temporelle
moyenne des produits individuels achetés grâce à de la monnaie. Le problème
du monétarisme, c’est qu’il ignore l’aspect temporel de l’échange.
Il faut garder à
l’esprit que le prix futur, et donc le pouvoir d’achat futur d’une monnaie,
est quelque chose de subjectif, et qui ne peut pas être déterminé à l’avance.
S’il le pouvait, nous serions en mesure d’acheter ou de vendre quelque chose
aujourd’hui en sachant parfaitement que nous pourrions en tirer profit
demain, ce qui n’est évidemment pas vrai. Les quantités de monnaie et de
biens ne sont donc pas des facteurs déterminants des relations entre les
prix. Les préférences des consommateurs pour la monnaie par rapport aux biens
est bien plus importante et, portée à son extrême, peut rendre nul le pouvoir
d’achat d’une devise, quelle que soit sa quantité. Ce savoir est essentiel à
une bonne compréhension de la théorie monétaire.
Au travers de ses
politiques monétaires, la Banque d’Angleterre a pris le dessus sur les
relations de marché depuis les années 1970. La relation de Gibson est
apparente tout au long des 240 années qui ont précédé. Ce troisième graphique
continue là où le premier s’est arrêté :
Cette relation a pris
fin en 1940 après que la Banque d’Angleterre a fait passer les taux d’intérêt
à 17,4% pour mettre fin à l’hyperinflation des prix. Pour la toute première
fois, la Banque d’Angleterre a établi les taux d’intérêt plus haut qu’ils
n’auraient dû l’être sur le marché libre avec les mêmes niveaux de prix. La
Fed a fait la même chose cinq ans plus tard. Depuis lors, les prix ont
continué de grimper, bien qu’à un rythme décru, et la livre sterling a perdu
88% supplémentaires de pouvoir d’achat. Le dollar en a perdu 76%. Depuis
cette époque, la gestion des taux d’intérêt par les banques centrales a
continué de supprimer la relation de Gibson, comme nous devrions désormais
l’appeler.
Les politiques
monétaires déséquilibrent le marché pour les emprunteurs et les épargnants.
C’est ce que nous pouvons voir aujourd’hui, avec les taux proches de zéro
pourcent qui suppriment la relation entre les épargnants et les entreprises
qui investissent, ce qui génère une compression économique. Voilà qui nous
mène à une deuxième erreur exposée par Gibson. La Fed devrait faire grimper
les taux d’intérêt dans quelques mois afin d’amorcer un retour à la réalité.
Selon Gibson, une hausse
des taux d’intérêt encouragerait les prix à augmenter et atteindre l’objectif
d’inflation de 2% de la Fed. Mais ce n’est pas ainsi que les négociants
financiers voient les choses. Ils s’attendent à tout le contraire, et pensent
qu’une hausse des taux est mauvaise pour la demande et les prix des
marchandises, c’est pourquoi la décision de la Fed a été tant reportée.
Il existe cependant des
preuves que leur opinion n’est pas justifiée et qu’une hausse des taux
d’intérêt sera accompagnée d’une hausse des prix des marchandises. Par
exemple, entre 1970 et 1980, le prix de l’or est passé de 36 à 800 dollars,
et les taux d’intérêt américains ont grimpé depuis 9 jusqu’à 17%, comme le
montre ce quatrième graphique :
Je m’éloigne quelque peu
du sujet, mais ce graphique illustre l’erreur qu’est de croire que le prix de
quoi que ce soit puisse être supprimé par une hausse des taux d’intérêt.