L’impôt sur le revenu
débouchant sur des rendements négatifs...
" Le vote d’une loi de Finances a
toujours quelque chose d’angoissant pour les contribuables : on se demande à chaque
fois ce qui va nous tomber sur la tête ! Cette année ne faillit pas à la
tradition ", écrit
Fabrice Coletto-Labatte pour La Chronique Agora.
Force est de reconnaître que pour 2013, nos technocrates sont pleins de
ressources. Prenons juste quelques mesures parmi d’autres en cours d’examen
au Parlement.
▪ Sus aux paradis fiscaux
!
D’abord voici un nouvel alourdissement du prélèvement concernant les
investissements réalisés en France depuis un pays relevant de la liste “ETNC”
— entendez Etats ou territoires non coopératifs. Mis sur pied par la
précédente majorité, il consiste à frapper d’un prélèvement à la source tous
les revenus de capitaux investis en France dès lors que ces capitaux sont détenus
par des personnes physiques ou morales ayant leur domicile fiscal dans un
ETNC.
Pourquoi un tel traitement ? Tout simplement parce que la France considère
que les Etats refusant de communiquer toutes les informations dont
l’administration fiscale française a besoin doivent être sanctionnés, et en
fait au travers d’eux, ceux qui se servent de cet écran. Pour 2013, le taux
du prélèvement à la source passera de 55% à 75%. De quoi sans doute
décourager tout investissement vers la France que ce soit de l’argent
d’origine mafieuse (ce qui en l’occurrence est tout à fait louable !) mais
aussi, ce qui est plus regrettable, de capitaux off-shore dont l’origine
n’est pas criminelle, cherchant simplement à alléger la note par rapport au
système d’imposition de ces contribuables de leurs pays d’origine…
▪ L’impôt sur le revenu
débouchant sur des rendements négatifs
En matière d’imposition sur le revenu (IR), la nouvelle tranche d’imposition
à 45% mérite que l’on s’y arrête, car couplée aux prélèvements sociaux se montant
désormais à 15,5%, l’application à des revenus de capitaux investis en titres
financiers obligataires peut aboutir à un rendement négatif. Oui vous avez
bien lu : NE-GA-TIF !
Démonstration : vous êtes marié sans enfants, vos revenus professionnels se
montent à 300 000 euros. Parce que vous êtes patriote et que vous croyez en
notre pays, vous avez investi 150 000 euros en OAT offrant un taux d’intérêt
de 3,1% soit 4 650 euros de coupons perçus. Cependant, même assez bien
maîtrisée — du moins “dans le domaine décelable”, comme disent les
radiologues — il convient de relativiser ce chiffre car l’inflation grignote
le rendement : sur un an glissant, l’INSEE nous la donne à 1,9%. Par
conséquent le taux d’intérêt réel est de (3,1% – 1,9%) = 1,2%.
Mais là-dessus il faut tenir compte de la fiscalité qui s’applique sur le
rendement brut… et non réel. Ainsi, pour notre couple de bons investisseurs
patriotes, le prélèvement se montera à 60,5% des coupons perçus vu que le
gouvernement actuel entend supprimer le prélèvement libératoire forfaitaire
(bien pratique pour les gros contribuables). La ponction sera de 2 813 euros
(4 650 euros x 60,5%).
Mais comme le rendement réel net d’inflation n’est que de 1,2% soit 1 800
euros… le taux de prélèvements obligatoires atteindra alors un niveau
prohibitif et sans précédent de 156%. Record à battre.
Comme si cela ne suffisait pas, on prévoit également de diminuer la CSG
déductible de 5,8% actuellement à 5,1% ce qui augmentera encore l’assiette
taxable à l’IR sur des revenus frappés d’une CSG dévorante.
Et encore je n’ai fait qu’une simulation sur des contribuables gagnant moins
d’un million d’euros de revenus, car pour ces derniers, il y aura la nouvelle
tranche “temporaire” à 75%…
▪ Niches fiscales
immobilières : quelles dépenses fiscales pour l’Etat ?
Voyons maintenant la diminution du plafonnement global des avantages fiscaux
: elle passe de 10 000 euros + 4% du revenu imposable à 10 000 euros plus
rien du tout ! Cette chasse aux niches fiscales me plonge dans un abîme de
perplexité. Pourquoi une telle obstination, qui ne date pas d’hier du reste ?
On nous présente comme dépense publique le fait pour l’Etat d’accorder une
réduction d’impôt pour l’achat d’un investissement immobilier en “Scellier”
(et demain en “Duflot”). Certes, sur l’achat d’un bien de 300 000 euros,
l’Etat vous en “remboursera” 13% de manière échelonnée sur neuf ans, au mieux
39 000 euros.
Ce que l’on oublie de dire, c’est que dans l’intervalle (en fait
immédiatement et avant même que vous ayez pu bénéficier de la première
réduction d’impôt !), l’Etat aura perçu 19,6% du montant investi grâce à la
TVA immobilière sur les logements neufs soit… 49 164 euros !
Bénéfice (et non plus perte de recettes !) pour l’Etat = 10 164 euros en
monnaie courante. Si l’on actualise toutes ces sommes, le gain fiscal pour
l’Etat est encore plus grand car il perçoit tout de suite une TVA et il rend
une somme fixe via la réduction d’impôt dans une monnaie appelée à se
déprécier année après année…
Dès lors pourquoi chercher à décourager par tout moyen l’investissement de
capitaux privés dans le secteur du logement intermédiaire où l’on constate
une pénurie dans les grandes villes alors qu’il est patent que l’argent
public fait défaut, que les vastes projets en matière de logement social sont
inaccessibles et que les promesses inconsidérées du “Changement c’est
maintenant®” ne pourront pas être tenues.
▪ La Belgique, c’est par
là !
A l’instar de ce grand monsieur Gérard D., cet immense acteur français parti
très récemment en Belgique et sur lequel bon nombre de médias ont jeté
l’opprobre, à la lumière des dernières innovations fiscales, la question
d’une expatriation pure et simple mérite légitimement d’être posée !
Fabrice
Coletto-Labatte