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Dans un
régime purement socialiste, où la propriété
privée aurait été abolie, l'argent ne serait pas
nécessaire. Au contraire, dans un monde où la
propriété est respectée, l'échange est
facilité par l'argent. Plus une société se
développe, plus la division du travail se complexifie. Du troc on
passe à l'échange indirect à l'aide d'un moyen
d'échange, c'est-à-dire une monnaie, de l'argent. À
travers le temps, certaines ressources naturelles ont été
choisies comme monnaie, car elles facilitaient l'échange. Les
ressources les plus monnayables, c'est-à-dire les plus populaires,
pour des raisons telles que leur durabilité, leur divisibilité
en pièces homogènes et leur capacité à maintenir
leur valeur, ont fini par être considérées comme moyens
d'échange. Comme le résume Ludwig von Mises: « L'argent
est le plus monnayable des biens que les gens acceptent, car ils
désirent l'offrir subséquemment lors d'échange impersonnel.
» (Human Action, p. 401, traduction libre)
L'argent facilite les transactions de crédit, c'est-à-dire
l'échange de biens présents contre des biens futurs
nécessairement incertains. Il sert également de transmetteur de
valeur, car il peut être thésaurisé. Si l'homme pouvait
prédire l'avenir il détiendrait les biens qui maximiseraient
ses choix, mais comme il en est incapable il se contente de
thésauriser la monnaie.
L'argent transmet la valeur, mais ne la mesure pas. C'est que la valeur est
subjective et il est donc impossible de la mesurer objectivement. On peut
ordonner les valeurs, mais on ne peut pas les mesurer.
Essayez donc de mesurer objectivement vos sentiments, avec des «
unités d'amour », lorsque votre blonde vous
demande: m'aimes-tu plus que ton ex? C'est la même chose avec l'argent.
Dans le langage de tous les jours vous dites peut-être, en pointant du
doigt un objet, qu'il vaut 100 $, mais en réalité
il n'est pas question de valeur, plutôt d'un montant d'argent que le
marchand vous demande pour l'objet en question. Cette distinction peut vous
sembler pointilleuse, mais elle n'en demeure pas moins cruciale. L'argent
mesure des prix, mais ne mesure pas des valeurs car celles-ci sont
subjectives. Pour comprendre la monnaie il faut d'abord comprendre que la
valeur économique est subjective.
On peut ainsi dire que l'action humaine est un processus d'échange.
Vous agissez pour substituer à un état un autre plus
satisfaisant. Ce faisant vous ne mesurez pas, vous comparez. Pour Mises, les
problèmes référant à des mesures ne constituent
pas des problèmes économiques.
Quatre types de
monnaies
Mises définit quatre types de monnaies: les pièces de
métaux de base (les tokens), la monnaie fabriquée
à partir de métaux précieux, le crédit et les
substituts légaux. La monnaie métallique (faite de
métaux précieux) est le moyen d'échange déterminé
librement par le marché, soit une ressource faite monnaie. Le
substitut est un reçu légal pour la monnaie métallique;
il se présente sous forme de certificats ou de billets bancaires et
est censé être encaissable en totalité sur demande. On
peut donc qualifier ledit substitut de promesse de payer
immédiatement.
Lorsqu'il y a davantage de substituts qu'il y a de monnaie métallique
Mises qualifie les reçus excédants de « monnaie
fiduciaire ». Remarquez qu'il n'y a aucun moyen pratique
de distinguer les certificats (reçus légitimes) de la monnaie
fiduciaire (reçus illégitimes). Le
crédit est une réclamation contre une personne physique ou
légale. Ces réclamations ne sont pas encaissables sur demande
et par conséquent ne sont pas entièrement sécuritaires.
On peut donc parler du crédit comme étant une promesse de payer
à une date ultérieure. Nous avons donc les promesses de payer
immédiate et ultérieure, la monnaie métallique, qui
n'est pas une promesse de payer et qui se présente sous forme de
pièces ou de lingots et les tokens.
La monnaie est donc un moyen d'échange choisi librement. Au cours des
âges, l'homme libre a fait de l'or et de l'argent métallique ses
principaux moyens d'échange. Cependant, si certains hommes sont
capables du meilleur, d'autres sont capables du pire. Ces derniers
comprennent mal la liberté et par conséquent ils en ont peur,
d'où leur besoin d'imposer aux autres leurs diktats. Ils ont
rejeté la monnaie métallique pour imposer le papier-monnaie
auquel ils assignent une valeur arbitraire.
Aujourd'hui, le commun des mortels ne réalise pas que la source de la
monnaie est dans la valeur attribuée par ses ancêtres à
une ressource que ceux-ci considéraient utile, pratique et des plus
avantageuses pour échanger biens et services. Il a été
endoctriné par les hommes de l'État. Ainsi, il croit que le
papier-monnaie possède la valeur que l'État lui attribue.
Or, la loi des prix, nous dit Mises, n'est pas subordonnée à
l'État, puisque comme tout agent moral l'État doit se plier
à la loi de l'offre et la demande. Ce n'est pas en
légiférant que l'État peut se prémunir d'une loi
économique. Ainsi, pendant des siècles la valeur d'une monnaie
n'était rien d'autre que son poids et sa qualité. Lorsque
l'État a décrété un prix pour la monnaie, toutes
les pièces de plus grande valeur sont disparues du marché, car
les gens ne voulaient pas perdre au change. Au contraire, les pièces
de moindre valeur ont continué à servir de moyen d'échange.
Si avant ladite intervention législative le marché utilisait
l'or et l'argent métallique, après l'intervention les individus
n'utilisaient plus, du moins au grand jour, que la monnaie
sous-évaluée. La monnaie forte était soit
thésaurisée, soit utilisée dans un marché plus
juste, c'est-à-dire au « noir ». Ces
conséquences sont également connues d'après l'auteur qui
les a formulées, soit sous le nom de « loi de Gresham
».
Les hommes de l'État n'en sont pas à une bêtise
près. Ils ont non seulement fait disparaître du marché
les substituts légitimes (les certificats d'or), mais l'or
elle-même. Cependant, la loi de Gresham s'applique toujours. En
créant du crédit sans se soucier d'une contrepartie métallique
l'État réduit le pouvoir d'achat de la monnaie.
Dans un premier temps, l'État a empêché les individus
d'échanger leurs certificats ou billets bancaires contre la monnaie
métallique. Il s'agissait donc d'un bris de contrat par le
gouvernement. Après avoir crée des reçus illégitimes
(monnaie fiduciaire), l'État déclarait que ce crédit
nouvellement crée était de valeur égale aux certificats
précédemment émis. Cependant, une valeur
décrétée n'a de valeur que le nom. Si une monnaie ne
cesse de se dévaluer, les gens finiront par l'abandonner.
L'État peut décréter des prix entre différentes
monnaies, mais comme pour toutes les tentatives de contrôle des prix,
il en résulte soit des surplus, soit des pénuries. Seul un
marché libre des interventions gouvernementales peut s'assurer de
maintenir le pouvoir d'achat d'une monnaie. Le monopole d'État sur la
monnaie est une violation des droits de propriété et
d'échange. Qui plus est, les conséquences pourraient
s'avérer désastreuses si on le maintient.
* Il s’agit
d’un résumé personnalisé de la 1ère partie
de Mises on Money par Gary North.
André
Dorais
André Dorais a étudié en philosophie
et en finance et vit à Montréal. Essai originellement
publié par Le
Québecois Libre
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