Leurs craintes de voir
imposées de nouvelles règlementations pourraient entraver les activités de
manipulation des banques sur le prix de l’argent
- De nouvelles
règlementations attendues pour 2018 ont effrayé les banques commerciales
et les opérateurs du prix de l’argent de Londres
- Le
manque de liquidités sur le fixing de l’argent a généré une importante
volatilité sur le marché
- Le
prix de référence de l’argent s’est détaché du prix au comptant du métal
à plusieurs reprises depuis 2016
- Aucun
nouvel opérateur ne s’est encore présenté pour reprendre le fixing à
l’automne prochain
- Pas de
fumée sans feu : les actions laissent sous-entendre une
manipulation du prix de l’argent
- L’argent
demeure supprimé et sous-évalué
Le fixing de l’or de Londres a été
lancé à Londres en septembre 1919, dans les bureaux de NM Rothschild and
Sons.
Les lois économiques nous
indiquent que les marchés et les prix sont influencés par l’offre et la
demande. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas pour ce qui concerne
le marché de l’argent. En revanche, la menace de nouvelles règlementations
pourrait entraver les activités de manipulation des banques commerciales et
des opérateurs du fixing de Londres.
La question de la manipulation
du prix de l’argent a toujours été un sujet épineux, sur lequel se sont
penchés des universitaires
ainsi que des analystes et groupes comme Ted Butler et le Gold Anti-Trust
Action Committee (GATA), et pour lequel des procès
ont été entrepris. Comme je l’ai déjà noté précédemment, les accusations de
manipulation du prix de l’argent vont désormais bien au-delà de simples
rumeurs. Au cours de ces dernières années, des banques commerciales ont dû
répondre de leurs actes, et Deutsche Bank a même accepté de verser 38
millions de dollars de dommages suite à un recours collectif intenté devant
les tribunaux.
Il semblerait pourtant que
l’attention accrue du public pour la manipulation (et ses coûts) du prix de l’argent
par les banques commerciales ne soit pas la seule raison pour laquelle ce
comportement, désormais évident depuis plus
de dix ans, semble aujourd’hui prendre fin. Reuters a rapporté hier que
leurs craintes d’être accusées de manipulation de marché par les agences de
règlementation ont incité les banques participantes à se montrer plus
réticentes à ajouter des liquidités lors des enchères quotidiennes.
Les banques ont enfin
peur des règlements
Le petit volume d’ordres et le
manque de liquidités ont fait que le prix de référence de l’argent a manqué à
plusieurs reprises de représenter de manière fiable et juste ce qui est connu
sous le nom de prix au comptant de l’argent. Le prix au comptant est calculé
sur la base d’un marché bien plus vaste. Les divergences survenues ont généré
des gains inattendus, mais aussi des pertes, comme le montrent les données
publiées par Thomson
Reuters, et ce depuis le mois de janvier 2016.
Traditionnellement, les sept
banques impliquées dans le fixing s’assurent à ce que le prix de référence
demeure proche du prix au comptant en ajoutant des liquidités ou en achetant
et vendant de l’argent au cours du processus d’enchères. En revanche, les
récents procès pour manipulation des prix de l’or et de l’argent, ainsi que
les enquêtes lancées sur d’autres marchés comme celui du LIBOR, ont poussé
les banques à se montrer plus prudentes, de peur d’attirer l’attention des
agences de réglementation.
Des sources ont indiqué à
Reuters que « les banques ne souhaitent désormais plus intervenir
au-delà d’un simple placement d’ordre préalable, de peur d’être accusées de
manipulation par les agences de règlementation. »
En conséquence, des fluctuations
imprévisibles sont survenues sur le prix de référence de l’argent, qui ont
beaucoup tourmenté le marché :
« Entre les mois de
janvier et mars de cette année, les volumes ont parfois atteint des hauts de
12,9 millions d’onces et des bas de 200.000 onces ; alors qu’à sept
reprises, le prix de référence de l’argent s’est détaché du prix au comptant
du métal de 10 cents ou plus. Il a enregistré une divergence de 5 cents ou plus
à plus de 24 reprises, dont cinq sur le seul mois de mars. C’est quelque
chose de très inhabituel, puisque les divergences d’affichent généralement
autour d’1 cent. »
L’inaction des banques sur les
marchés a beaucoup réduit le niveau de confiance en le marché, pour faire
diminuer les activités et augmenter la volatilité. Preuve peut-être que les
sept banques participantes ne savent pas comment se comporter correctement et
gérer un marché efficace quand les agences de règlementation ont les yeux
rivés sur elles.
Un grand besoin de
nouveaux outils
Et ce n’est pas que les banques
qui ont peur des agences de règlementation. La récente volatilité a d’autant
plus compliqué les problèmes qui menaçaient déjà le fixing de l’argent. Au
début du mois dernier, le LBMA a annoncé que CME Group et Thomson Reuters ne
participeraient bientôt plus à sa plateforme, bien que leurs contrats
n’expirent pas avant encore deux ans.
Les deux organismes ont décrété
que les nouvelles règlementations annoncées étaient les raisons pour
lesquelles elles ont décidé de se retirer, bien qu’elles n’aient pas apporté
d’explication supplémentaire. Certains ont suggéré que les deux organismes se
retirent parce qu’ils savent que le mécanisme de détermination des prix de
référence de l’or et de l’argent ne pourra bientôt plus opérer comme il a pu
le faire de nombreuses années durant.
Les fluctuations de prix et le
manque de liquidités signifient que le LBMA éprouve des difficultés à trouver
de nouveaux opérateurs, comme l’a rapporté Reuters. L’organisation espère
qu’un nouvel opérateur pourra permettre au fixing de se poursuivre. Qu’elle y
parvienne dans le cadre de nouvelles règlementations et face à des banques
commerciales qui trouvent difficile de se comporter honorablement reste
encore à voir.
De nouvelles
règlementations à l’horizon
Pourquoi les banques et les
opérateurs sont-ils soudainement effrayés par les questions
règlementaires ? Nous aurions pu penser qu’après l’affaire du LIBOR et
la crise financière, elles se seraient montrées plus méfiantes. Mais elles ne
le sont devenues que depuis quelques années.
La nécessité d’imposer de
nouvelles règlementations se fait ressentir depuis 2013, alors qu’un projet
de règlement a été proposé quant aux « indices utilisés en tant que
repères pour les instruments et les contrats financiers ». La
règlementation finale a été approuvée en avril dernier. Le fait qu’elle
mentionne spécifiquement les indices de référence est assez pertinent.
Les nouvelles règlementations de
l’Union européenne seront adoptées le 1er janvier 2018. Elles
rendront plus difficile pour les banques et les plateformes de manipuler les
marchés financiers tels que celui du LIBOR, du Forex et des métaux précieux.
Comme je l’ai expliqué en
introduction, les banques manipulent les indices de référence plutôt que de
permettre aux marchés des métaux précieux de déterminer les prix. En
conséquence, la découverte des prix a été laissée de côté, et les acheteurs
et vendeurs en sont sortis perdants. Mais la manipulation des prix est restée
ignorée par les bureaucrates de nombreuses années durant. Elle s’est
poursuivie sous le nez des agences de règlementation, mais la récente prise
de conscience du système légal fait que le problème ne puisse désormais plus
être ignoré.
Pas de fumée sans feu
Alors qu’une recherche
en a conclu que les preuves de manipulation des prix de l’or et de l’argent
sont « au mieux suggestives », les évènements survenus ces
dernières années en ont poussé beaucoup à se demander s’il pourrait vraiment
y avoir tant de fumée sans feu. Après tout, comme nous avons pu le voir, une
majorité des marchés sont manipulés. Voyez par exemple ceux du LIBOR et du
Forex, sans parler des programmes d’assouplissement quantitatif, qui
reviennent à la même chose.
Les marchés de l’or et de
l’argent laissent s’échapper beaucoup de fumée, voire parfois des étincelles.
Comme je l’ai expliqué en introduction, Deutsche Bank a l’année dernière été
la principale accusée dans une affaire selon laquelle la banque aurait
« illégalement conspiré avec Bank of Nova Scotia et HSBC Holdings Plc
pour manipuler le prix de l’argent aux dépens des investisseurs ». La
banque allemande a accepté de verser 38 millions de dollars à la cour, et a
également accepté d’offrir des informations concernant ses homologues.
Dans la lettre qui détaille le
règlement du procès, Deutsche Bank a accepté de donner le nom d’autres
banques participantes, dont UBS AG Barclays Plc, BNP Paribas SA, Standard
Chartered Plc, Bank of America Corp et HSBC :
« Deutsche Bank a également
accepté de coopérer avec les plaignants, et de leur fournir des messages
instantanés et autres communications électroniques dans le cadre du règlement
du procès. Selon les plaignants, cette coopération devrait inclure une
assistance de Deutsche Bank dans le cadre de nouveaux procès envers d’autres
défendant. »
C’est là un canon fumant qui
ouvre la porte à de nouvelles actions en justice contre d’autres banques
impliquées sur les marchés des métaux précieux. Ces procès, ainsi que les
nouvelles règlementations attendues, pousseront peut-être les banques à mieux
se comporter.
Le manque de liquidité et de
volatilité sur le marché de l’argent de Londres montre que les banques
impliquées sont conscientes de ce que l’avenir nous réserve en matière
d’enquêtes et d’actions judiciaires. Seul le temps pourra nous dire ce que
cela signifiera pour le prix de référence de l’argent.
Conclusion
La manipulation des prix, qu’il
s’agisse de ceux des métaux précieux, des taux d’intérêt ou des devises
étrangères, n’est pas un crime sans victimes. Plusieurs milliers de sociétés
et d’investisseurs individuels ont enregistré des pertes sur leur
investissement, parfois en conséquence directe de ces manipulations.
Ironiquement pour ceux qui
cherchent à manipuler le marché, ce comportement représente une opportunité
pour ceux qui souhaiteraient accumuler de l’or et de l’argent. Parce que les
prix en sont supprimés, les investisseurs peuvent en profiter pour accumuler
plus de métal physique.
Et leur désir de posséder du
métal grandira à mesure que s’écoulera l’année 2017. Depuis le début de
l’année, nous ne cessons plus de nous lever le matin pour entendre une
nouvelle information inquiétante au regard de la sphère géopolitique globale.
Qu’il s’agisse de la Corée du Nord, des élections européennes, des
bombardements en Syrie ou des terroristes domestiques, l’incertitude règne
partout. Pour cette raison, les gens devraient s’intéresser de plus en plus
aux métaux précieux, et les investisseurs devraient leur allouer toujours
plus de capital.
Qu’en est-il de la manipulation
des prix ? Se poursuivra-t-elle ? Nous ne le savons pas, mais comme
nous l’avons expliqué l'année
dernière, surpasser artificiellement le mécanisme de découverte des prix
revient à pousser un ballon sous l’eau – il ne peut qu’en ressortir, et ce bien
souvent avec une force phénoménale.
Plus un ballon est forcé sous
l’eau, plus haut il s’en trouvera éjecté. Il s’agit ici d’une grande
opportunité pour les investisseurs qui cherchent à accumuler des métaux
précieux à des prix qui seront, d’ici quelques années, perçus comme très peu
chers.