Théorie de la robotique
La bataille de la
théorie de la robotique bat son plein. Bank of America défend un scénario
possible, et McKinsey un autre.
Penchons-nous sur leurs
deux théories.
L’automatisation
modifiera le marché de l’emploi plus qu’elle ne le détruira
Voici ce que nous dit le
New York Times de la théorie de McKinsey, dans un article intitulé Automation Will Change Jobs More Than Kill Them :
Le
rapport, publié vendredi et rédigé par deux membres de l’Institut global
McKinsey, la branche de recherche de la société de conseil, et un autre
employé de McKinsey, vient s’ajouter au débat quant à la nature et au rythme
de l’automatisation sur le lieu de travail.
Ceux qui
aujourd’hui craignent l’expansion de l’automatisation se basent sur deux
suppositions. Premièrement, les avancées en matières de matériel et de
programmes digitaux est plus rapide qu’au cours des vagues de transformation
technologique précédentes. Deuxièmement, les machines deviennent de plus en plus
intelligentes et sont désormais capables d’effectuer des tâches cognitives,
et plus seulement physique. L’intelligence artificielle, semble-t-il, menace
un grand nombre d’emplois – elle ne remplace pas les muscles, mais le cerveau
humain.
Ayant
observé les tendances de l’évolution de l’intelligence artificielle, Carl
Benedikt Frey et Michael A. Osborne, chercheurs à l’Université d’Oxford, ont
estimé dans une étude publiée il y a deux ans que 47% des emplois
américains seraient menacés par l’automatisation.
Les
recherches menées par McKinsey suggèrent un impact différent, du moins pour
les trois à cinq prochaines années, sur lesquelles se penche leur analyse.
Selon leur étude, moins de 5% des emplois pourraient être entièrement
automatisés grâce aux « technologies nouvelles et actuellement en
développement », qui soit viennent d’être rendues disponibles sur le
marché, soit sont actuellement en développement dans les laboratoires de recherche.
Les
emplois à risque ne sont pas seulement les moins rémunérés. « Une
majorité des emplois les plus qualifiés pourraient voir certaines de leurs
activités automatisées », a expliqué Michael Chui, membre de l’Institut
global McKinsey et co-auteur du rapport.
Parmi
les emplois susceptibles de voir certaines de leurs activités automatisées,
nous comptons par exemple les physiciens, les gestionnaires financiers et les
directeurs d’entreprises. Au sommet de la haute direction d’entreprise, plus
de 20% des tâches pourraient être automatisées, estime McKinsey. Les
directeurs d’entreprises pourraient être partiellement remplacés par des
machines capables d’analyser des rapports et des données et de prendre des
décisions adéquates, de préparer l’affectation du personnel et de réviser les
rapports intérimaires.
Les
auteurs du rapport soulignent que l’automatisation a le potentiel d’enrichir
l’emploi, de libérer les employés et de leur permettre de se concentrer sur
des tâches plus créatives. Sur ce plan, les opportunités seraient grandes.
Mais selon un calcul en particulier, « seulement 4% des tâches au
travers de l’économie américaine nécessitent un niveau médian de créativité
humaine ».
Rapport
de McKinsey
Les plus
curieux d’entre vous voudront peut-être jeter un œil sur le rapport. Voyez
donc Four Fundamentals of Workplace Automation, publié dans le
McKinsey Quarterly.
Comparons
maintenant cette théorie avec celle de Bank of America.
Les
robots transformeront le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui
Le Telegraph
nous présente l’opinion de Bank of America dans son article Robots May Shatter the Global Economic Order Within a Decade :
Les
robots finiront par remplacer 45% des emplois de l’industrie, et réduiront le
coût du travail de 9 trillions de dollars d’ici dix ans, pour laisser une majorité
de la société sur le tas de ferraille de l’Histoire.
Dans un
rapport alarmant de 300 pages, Bank of America prédit que les robots et
autres formes d’intelligence artificielle finiront par transformer le monde
tel que nous le connaissons aujourd’hui, qui devrait devenir radicalement
différent d’ici à 2025. Le modèle d’entreprise actuel disparaîtra dans un
tourbillon de « destruction créatrice », et les effets de cette
transformation représenteront plus ou moins 30 trillions de dollars chaque
année.
« Le
rythme des innovations en matière technologique est passé de linéaire à
parabolique », explique le rapport. Tout pays qui manquera d’embrasser
la révolution de la robotique sera laissé derrière elle par la compétition.
En
Chine, les salaires des ouvriers ont été multipliés par neuf depuis 2000, et
la force de travail du pays est aujourd’hui en déclin. La Chine est déjà le
plus gros acheteur de robots du monde, avec environ un quart du marché
global.
Le prix
des robots, depuis les robots chargés de prendre soin des personnes âgées et
les robots chargés de planter des graines et de récolter des fruits jusqu’aux
drones et aux logiciels d’intelligence artificielle, ont été réduits de 27%
au cours de ces dix dernières années.
Le prix d’une
machine à souder robotisée est passé de 182.000 dollars en 2005 à 133.000 l’année
dernière, et la technologie ne cesse de se sophistiquer. Le « cobot »
Baxter, chargé de travailler aux côtés d’ouvriers sur le terrain – à resserrer
des boulons sur une bande transporteuse, par exemple – ne coûte plus que
22.000 dollars.
Nous
avançons vers un point d’inflexion crucial, qui verra l’usage de robots
devenir 15% moins cher que le recours à des employés humains.
Ce seuil
a déjà été franchi dans l’industrie automobile aux Etats-Unis, en Europe et
au Japon, avec 8 dollars par heure pour un robot soudeur, contre 25 pour un
employé. D’où l’atmosphère futuriste des nouvelles usines automobiles. « Nous
faisons face à un retournement de paradigme, qui transformera la manière dont
nous vivons et dont nous travaillons », a expliqué l’auteur du rapport,
Beijia Ma.
L’effet
social en sera un rejet de ceux qui se trouvent au plus bas de l’échelle de l’emploi,
qui les rendra inemployables sans une formation supplémentaire. Bank of
America décrit ce phénomène comme un « déplacement de la main d’œuvre humaine »,
et estime que la moitié des emplois américains seraient menacés.
La
productivité grimpera, mais les salaires ne grimperont pas au même rythme.
Les propriétaires de capital obtiendront une part plus grande encore des
revenus globaux, et forceront les inégalités vers de nouvelles extrêmes. La
part des revenus touchée par les employés a atteint un pic de 65% en 1975, et
n’est aujourd’hui plus que de 58%.
La force
de travail sera divisée entre ceux qui seront au sommet de l’échelle de l’éducation,
et ceux qui n’auront qu’un diplôme d’études secondaires. Sans parler de 800
millions d’illettrés du monde. Il est facile d’imaginer les conséquences
politiques désastreuses qui pourraient en découler si les gouvernements ne
faisaient pas tout leur possible pour en mitiger les effets, bien que leur
marge de manœuvre reste limitée dans notre monde globalisé et sans
frontières.
La
classe moyenne est aussi vulnérable. Selon Bank of America, des « robots
conseillers » dotés de systèmes basés sur des algorithmes viendront un
jour remplacer 25 millions d’employés du secteur financier et légal. La
génération Y (18-34 ans) sera la première à se tourner en masse vers ces services
post-humains. Cette cohorte grandissante détient déjà 7 trillions de dollars
d’actifs liquides, et devrait hériter 30 à 40 trillions de dollars
supplémentaires de la génération du baby-boom.
Il n’y a
nulle part où se cacher. L’automatisation est partout. Un seul professeur
peut enseigner à 150.000 étudiants grâce à la technologie digitale.
Nous
pourrions grâce aux robots atteindre notre rêve de prospérité, mais nous
trouver en même temps emportés dans une contre-utopie où le chômage sera roi.
Force
déflationniste
Peu
importe le scénario que vous pensez le plus plausible, il devrait être
évident que les robots sont une force déflationniste.
Selon la
Fed (et les banques centrales en général), l’économie global nécessite une
inflation de 2%. Face à une telle force déflationniste, cette idée est
complètement erronée.
Les
tentatives de la Fed, les syndicats, d’Obama et des autres d’établir un salaire
de base de 15 dollars sont contre-productives.
Plus les
salaires grimperont, plus les humains seront remplacés par des robots.