Par Jack Farchy et Kathrin
Hille
Financial Times, Londres
Dimanche 8 juin 2014
http://www.ft.com/intl/cms/s/0/9f686816-ed51-...144feabdc0.html
Les sociétés russes se préparent à convertir certains contrats en
renminbis et en d’autres devises asiatiques de peur de voir les sanctions
imposées par l’Occident leur barrer l’accès au marché du dollar.
« Au cours de ces quelques dernières semaines, un certain nombre de
grosses sociétés russes se sont intéressées à des produits en renminbis et en
d’autres devises asiatiques et à l’ouverture de compte dans diverses régions
de l’Asie », a expliqué Pavel Teplukhin,
directeur de Deutsche Bank en Russie, au Financial Times.
Andrei Kostin, directeur de la banque d’Etat VTN, a expliqué que
l’utilisation de devises autres que le dollar est l’un des « objectifs principaux »
de sa banque.
« Compte tenu de l’étendue de nos accords bilatéraux avec la Chine,
le développement de contrats en roubles et en yuans (renminbis) est l’une de
nos priorités », a-t-il annoncé au président Vladimir Poutine lors d’un
récent briefing. « Nous y travaillons depuis mai ».
Cette décision d’ouvrir des comptes commerciaux en renminbis, dollars de
Hong Kong et dollars de Singapour souligne la tentative de la Russie de se
tourner vers l’Asie à mesure que ses relations avec l’Europe se détériorent.
Les sanctions imposées par l’Occident poussent les sociétés à réduire leur
dépendance aux marchés financiers occidentaux alors que les banques
américaines et européennes réduisent leur activité de prêt en Russie depuis
son annexe de la Crimée en mars.
La banque centrale tente de créer un système de paiement national pour
réduire la dépendance du pays en certaines sociétés occidentales telles que
Visa et MasterCard.
« Il n’y a rien de mal à ce que la Russie cherche à réduire sa
dépendance au dollar – c’est en fait une décision très raisonnable de sa part »,
a déclaré le directeur d’une autre banque européenne en Russie. Il a ajouté
que l’exposition de la Russie au dollar l’expose également à la volatilité
des marchés en période de crise. « Il n’y a pas de raison à ce que la Russie
continue d’établir ses contrats commerciaux avec le Japon en dollars ».
Le directeur d’une société russe sont 70% des revenus proviennent de l’exportation
en dollars a déclaré que sa compagnie prévoit d’établir des contrats en d’autres
devises dans l’éventualité de nouvelles sanctions. « Si quelque chose se
produisait, nous serions prêts à nous tourner vers d’autres devises – comme le
yuan ou le dollar de Hong Kong ».
Alexander Dyukov, directeur de la division
pétrolière de Gazprom, a expliqué que sa société a discuté avec ses clients
de la possibilité de convertir ses contrats en d’autres devises que le
dollar, alors que Norilsk Nickel a annoncé au FT avoir établi des contrats en
renminbis avec ses plus gros clients chinois.
« Il semblerait qu’une tendance s’installe », a ajouté Mr Teplukhin, avant d’expliquer que les sociétés russes sont
en mesure de contrer les risques liés aux sanctions en modifiant leurs
contrats afin de pouvoir en changer la devise si nécessaire.
Certains hommes politiques ont suggéré à Moscou de répondre aux sanctions
en déliant complètement son économie du dollar.
Mais bien que le gouvernement ait récemment conseillé aux grosses sociétés
russes de se tourner vers d’autres devises pour rendre l’économie moins
vulnérable, il a rejeté d’autres mesures plus extrêmes.
« Tant que la Russie n’est pas sujette à plus de sanctions
économiques, qui pourraient limiter l’accès de notre pays au dollar, nous ne
prendrons pas de mesure de dé-dollarisation », a décrété Andrei Belousov, conseiller économique de Mr Poutine.