Le 16 janvier, le Parlement européen a adopté une liste de recommandations
pour la réforme des procédures d’autorisation des pesticides. Ces
recommandations faisaient partie du rapport final d’une commission spéciale
mise en place l’année dernière pour réévaluer les processus d’autorisation
des pesticides dans l’UE, suite à la controverse entourant le glyphosate.
Une très grande majorité d’eurodéputés ont soutenu le rapport non
contraignant, rédigé par Norbert Lins (PPE, centre droit) et Bart Staes
(Verts). Ils ont été 526 à l’approuver, 66 à le désavouer et 72 abstentions.
Seuls quatre des 152 amendements proposés ont été retenus, suite à un
accord politique entre les deux corapporteurs et leurs partis. Cette entente
a permis d’évacuer les amendements formulés par les conservateurs du CRE et
le groupe de gauche GUE/NGL.
Ce dernier avait notamment introduit une proposition d’amendement appelant
à une interdiction immédiate de la production, vente et utilisation du
glyphosate et de tous produits phytosanitaires contenants du
glyphosate dans l’UE ».
Lors d’une conférence de presse après le vote, Bart Staes a confirmé que
son groupe ne s’était pas exprimé sur l’interdiction du glyphosate et des
néonicotinoïdes.
« Nous voudrions interdire ces produits, mais nous nous sommes
abstenus, en premier lieu parce qu’il y avait eu un accord entre le PPE et
les Verts qui stipulait que nous ne soutiendrions pas les propositions du GUE
et que le PPE ne soutiendrait pas les propositions du CRE », a-t-il
précisé.
L’objectif principal de la manœuvre était d’assurer l’adoption du rapport
rédigé par la commission PEST. En outre, l’interdiction ou non du glyphosate
dépassait le mandat de la commission et n’avait aucune chance de se
concrétiser, souligne l’élu.
Les pesticides utilisés dans l’Union européenne doivent faire l’objet de
procédures d’autorisation plus transparentes, ont demandé mercredi les
députés européens.
PEST et glyphosate
Si la commission PEST a été créée suite aux débats houleux sur le
glyphosate, son mandat était d’analyser le processus actuel d’évaluation des
pesticides en général.
En dehors des considérations générales, la seule mention du glyphosate
dans le texte est un appel générique pour que le mécanisme de conseil scientifique
lance une révision systématique de toutes les études disponibles sur la
cancérogénicité de la substance active.
Éric Andrieu, eurodéputé socialiste français, qui a présidé la commission
spéciale, assure cependant que le rapport encourage la Commission à
« réévaluer immédiatement l’autorisation de vente du glyphosate »,
l’herbicide le plus utilisé en Europe.
Les verts se sont montrés plus prudents, indiquant que la commission ne
pourrait résoudre la controverse sur la carcinogénicité du glyphosate et que
c’est pour cela qu’elle se limitait à demander une révision systématique des
études disponibles à ce sujet, sans tirer de conclusion.
« Les prochaines décisions sur l’interdiction ou non du glyphosate de
nos pays seront prises en 2022 », indiquent-ils dans un communiqué.
Pour sa part, le corapporteur PPE, Norbert Lins, a insisté sur
l’importance d’une évaluation avant tout scientifique. « Sur une
question aussi importante, la recherche scientifique est le critère crucial.
Il n’y a pas de place pour l’idéologie ou les intérêts dans ce débat. Cette
décision ne doit pas dépendre de la politique ou de l’émotivité. »
En France, le débat est revenu cette semaine sur le devant de la scène
après qu’un tribunal a interdit « la vente, distribution et utilisation
du RoundUp Pro 360 », un produit Monsanto contenant du glyphosate.
Le juge administratif de Lyon estime que l’Anses a commis une erreur
d’appréciation au regard du principe de précaution en autorisant la mise sur
le marché du Roundup Pro 360. Un article de notre partenaire, le Journal
de l’environnement.
Réaction à Bruxelles et à l’EFSA
L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) s’est félicitée de
l’adoption du rapport par le Parlement européen, se déclarant satisfaite
d’avoir pu mettre son expérience et ses connaissances à la disposition de la
commission PEST dans l’année écoulée.
« L’EFSA soutient pleinement toute initiative d’amélioration de la
compréhension de ses travaux et des défis auxquels elle et d’autres acteurs
sont confrontés en ce qui concerne l’évaluation des pesticides dans
l’UE », a déclaré un porte-parole de l’autorité européenne.
Certaines mesures prévues dans le rapport final visent d’ailleurs à
renforcer le rôle de l’EFSA. Il s’agit ainsi d’étoffer son mandat, afin de
l’aligner sur celui de l’Agence européenne du médicament (EMA), d’accroître
ses ressources humaines et financières, d’adopter un mécanisme d’autorisation
accélérée pour les pesticides à faible risque et de laisser plus de
possibilités d’évaluation après la mise sur le marché.
Au cours du débat précédant le vote, le commissaire européen à la santé,
Vytenis Andriukaitis, a assuré que l’exécutif européen tiendrait compte de
ces suggestions dans sa réforme du programme REFIT pour évaluer la
législation européenne en matière de pesticides, qui comprend à la fois le
règlement sur les produits phytosanitaires et le règlement relatif aux
résidus de pesticides.
Les deux amendements approuvés par la plénière portaient sur les délais
d’évaluation des produits phytosanitaires et les problèmes liés au principe
de reconnaissance mutuelle, un sujet cher à Vytenis Andriukaitis. En
novembre, le commissaire avait déclaré aux ministres européens de
l’Agriculture qu’une meilleure reconnaissance mutuelle améliorerait l’accès
des agriculteurs aux produits appropriés.
Par : Gerardo
Fortuna | EURACTIV.com
| translated by Manon
Flausch, 18 janv. 2019