Cher Monsieur Tsipras,
Bonjour ! Je m’appelle
Hugo Salinas Price ; je suis un citoyen mexicain et entrepreneur à la
retraite qui vit actuellement à Mexico. En 1996, alors que je prenais ma
retraite, j’ai fondé la Mexican Civic Association Pro Silver, dont je suis
aujourd’hui le président.
Depuis 2002, cette
association fait pression sur le Congrès mexicain afin qu’il approuve une loi
qui autoriserait l’entrée en circulation d’une pièce d’argent que la
population pourrait utiliser comme monnaie, en parallèle au peso – notre devise
actuelle. Je reviendrai un peu plus loin sur les bases fondamentales de ce
projet et les raisons pour lesquelles je pense qu’il puisse avoir une grande
utilité pour vous et pour la Grèce.
Cette proposition a obtenu le
soutien du peuple mexicain et de législateurs de tous bords politiques au
Congrès, sur trois périodes législatives consécutives depuis 2002. Nous
sommes à plusieurs reprises passés très près de son approbation, bien qu’au
dernier moment, le projet ait été rejeté – sans même parvenir jusqu’au vote –
en raison de l’opposition de la Banque centrale du Mexique.
Au début du mois de juin de
cette année, alors que j’étais en voyage en Europe, je me suis rendu à
Athènes avec Max Keiser et sa collègue, Stacy Herbert. La raison de notre
visite en Grèce, qui n’était pas prévue, était de discuter avec vous au sujet
de quelque chose qui pourrait être très important pour votre pays.
Malheureusement, il ne nous a pas été possible de vous rencontrer, parce que
vous étiez occupé à organiser les élections à venir.
Si nous avions eu l’opportunité
de nous entretenir avec vous, Max et moi-même vous aurions dit qu’il nous
semblerait évident que la Grèce se déclare en banqueroute et abandonne l’euro.
Max et moi-même avons discuté avec des amis grecs qui sont très informés sur
la situation, et qui nous ont dit qu’il était impossible d’exprimer une telle
opinion à l’époque, en raison des élections imminentes.
Vous avez cependant récemment
déclaré qu’un retour à la drachme était inévitable, c’est pourquoi je vous
écris aujourd’hui.
Voici ce que j’aimerais vous
dire :
Monsieur Tsipras, la
situation désespérée de la Grèce vous offre l’opportunité de faire quelque
chose de fondamental pour votre pays et de vous élever au rang de grand
dirigeant national. Vous êtes un jeune homme, ce qui vous confère l’opportunité
de vous construire une longue carrière en tant que chef d’Etat – pas en tant
que politicien, mais que chef d’Etat.
Le retour de la drachme
permettrait en effet à la Grèce de se reconstruire une fois de plus. Il ne
pourrait en rien aggraver la situation de la Grèce, qui est si mauvaise
aujourd’hui qu’une nouvelle drachme pourrait offrir à votre pays un répit
immédiat.
Le cœur monétaire de la Grèce
recommencerait de nouveau à battre et à apporter à l’économie la liquidité
dont elle a besoin pour se relancer.
Cette mesure impliquerait
inévitablement une inflation monétaire au travers de la création de quantités
accrues de drachmes pour couvrir le déficit budgétaire du gouvernement grec
pendant un certain temps, et cette inflation apporterait avec elle la
dévaluation constante de la drachme.
Voilà qui donnerait lieu à un
renouveau des exportations grecques et une renaissance du tourisme en Grèce,
puisque les Européens préfèreraient se rendre en Grèce en raison des avantages
que présenterait le taux de change de la drachme.
Il est clair, cependant, qu’une inflation
permanente ne soit pas acceptable et ne puisse offrir la stabilité politique
à la Grèce.
C’est pour adresser cette
question que je présente ici à votre gouvernement une alternative qu’aucun
économiste accrédité n’a jamais eu la volonté, ou la compréhension nécessaire
en termes d’affaires humaines, de considérer.
Tous les économistes accrédités
du monde vous diront que le gouvernement grec devrait « éliminer son
déficit fiscal » pour mettre fin à l’inflation pernicieuse. Mais ces
économistes ne font pas partie du gouvernement ; ils ne sont pas des
politiciens ou des hommes d’Etat, et ils ignorent le problème qu’est de
convaincre une population qui a l’habitude de dépenser de commencer à
épargner. Les Keynésiens, qui représentent une majorité des économistes d’aujourd’hui,
n’apprécient pas l’idée d’une population qui épargne ; ils cherchent à
régler tous leurs problèmes par la hausse des dépenses, jusqu’à ce que l’économie
s’effondre. L’économie grecque s’est effondrée parce que l’argent disponible
aux dépenses, qui provenait des prêts étrangers en euros, a fini par
disparaître : il n’y a plus d’argent à dépenser.
Monsieur Tsipras, le seul
moyen que vous aurez de guider le peuple grec jusqu’à la stabilité est la
monnaie saine, et non la monnaie fictive qu’est l’euro, et qui vous a guidés
jusqu’au chaos actuel. Le désastre européen d’aujourd’hui était garanti
depuis le jour de la naissance de l’euro, d’une monnaie fictive - fiduciaire –
et de nature symbolique.
Ce n’est qu’en offrant aux
Grecs une pièce d’argent en parallèle à la drachme que votre parti et
vous-même pourrez éventuellement rétablir l’équilibre fiscal de la Grèce.
Votre gouvernement devra profondément modifier la mentalité des Grecs avant
de parvenir à cet objectif. Pensons ensemble aux grands chefs d’Etat que le
monde a pu connaître. Tous ont su gouverner au travers des idées qu’ils ont
pu inspirer à leur nation.
Avec une pièce d’argent en
leur possession, les Grecs ressentiront une fierté immense envers leur pays,
et il en naîtra un nouvel espoir pour un avenir meilleur, une condition qui
est indispensable à la reprise. Les économistes modernes ne mentionnent jamais
la fierté et l’espoir comme étant des facteurs importants pour l’économie.
Mais leur importance est capitale !
Grâce à ce nouvel espoir, les
Grecs seront plus enclins à accepter les mesures que votre gouvernement
pourrait vouloir mettre ne œuvre, et à tolérer la difficile transition
nécessaire à l’équilibre fiscal ; une période au cours de laquelle votre
gouvernement devra contrôler graduellement les niveaux de dépenses et d’investissements
gouvernementaux jusqu’à ce qu’un équilibre soit atteint.
Plus encore : les plus
conservateurs – pour qui vous devrez aussi gouverner – observeront la
dévaluation continuelle de la drachme (qui sera nécessaire en termes de planification
gouvernementale) avec désapprobation, et feront tout leur possible pour vous
relever de vos fonctions, à moins qu’ils ne voient en vous celui qui aura
donné à la Grèce une pièce d’argent, qui pourra être utilisée par ceux qui
voudraient protéger leur épargne et qui, pour la plupart, seront des
conservateurs. Les conservateurs voudront donc vous voir demeurer au pouvoir,
pour que vous puissiez continuer de mettre de l’argent entre les mains des
Grecs.
Une pièce d’argent qui
circulerait en parallèle à la drachme serait la formule nationale de l’unité
et de la reconstruction. La reconstruction de la Grèce demandera une certaine
quantité d’épargne, et rien ne garantit mieux l’épargne qu’une monnaie d’argent.
Comment une pièce d’argent pourrait
entrer en circulation en Grèce ?
Voici quelques principes clés :
1. Cette pièce d’argent
circulerait en parallèle à la drachme. La drachme demeurerait l’unité
monétaire de la Grèce. La pièce d’argent aurait une valeur monétaire libellée
en drachmes (note ajoutée le 17 mars 2015 : alternativement, elle pourrait
avoir une valeur monétaire exprimée en euros ou en dollars).
2. La Grèce pourrait frapper
une petite pièce d’argent de symboles grecs : Athènes d’un côté, et la
chouette de l’autre, pour que perdure une tradition millénaire.
3. Cette petite pièce
contiendrait par exemple 1/10e d’once d’argent, composé d’un
alliage de cuivre à 0.9166 pour assurer sa rigidité.
4. Cette pièce se verrait
conférer une valeur monétaire par les autorités monétaires, préférablement le
Trésor grec. Elle ne porterait aucune valeur nominale, sans quoi elle
sortirait de la circulation à mesure que le prix de l’argent grimperait, que
ce soit en drachmes, en euros ou en dollars (c’est ce phénomène qui a causé
la disparition de la monnaie d’argent de par le monde au XXe siècle).
5. La valeur monétaire
conférée à la « chouette » d’argent devrait être légèrement
supérieure à la valeur de l’argent qu’elle contient. Cette condition est
nécessaire à son maintien en circulation et afin d’empêcher que certains la
fondent pour en tirer une plus grande valeur en tant qu’argent qu’en tant que
monnaie.
6. Si le prix de l’argent
grimpait, les autorités monétaires réviseraient la valeur de la pièce à la
hausse, afin qu’elle soit toujours supérieure à la valeur de l’argent qu’elle
contient.
7. En revanche, si le prix de
l’argent baissait, les autorités monétaires maintiendraient la valeur de la
pièce. Nous savons par expérience qu’une population ne craint pas une baisse
de la valeur de l’argent contenu dans une pièce.
8. La population aurait
recours à ces pièces pour épargner ; elles ne pourraient pas être
déposées au sein du système bancaire ; il n’y aurait pas de compte en
banque dédié aux pièces d’argent.
9. Les banques pourraient
mettre en place des « comptes titres » pour ceux qui désireraient
placer leurs « chouettes » à l’abri. Il s’agirait d’un service de
stockage, et les pièces demeureraient la propriété de la personne à laquelle
appartient le compte.
10. Le public aurait le choix
de payer en drachmes ou en « chouettes » en fonction de leur valeur
monétaire. Une majorité des Grecs conserveraient leurs pièces d’argent et dépenseraient
leurs drachmes – ce qu’on appelle la Loi de Gresham.
Voilà l’essentiel de la
formule qui vous permettra de redonner vie à la Grèce et à son esprit.
Je suis prêt à parier que
cette nouvelle pièce grecque d’1/10e d’once d’argent sera plus désirable
aux yeux des Grecs que n’importe quelle autre devise étrangère. Votre gouvernement
n’aura plus aucun problème de fuite de capitaux, parce que les Grecs
préfèreront posséder des « chouettes » que d’autres unités de
devises étrangères. Et les banques n’auront nul besoin d’offrir des taux d’intérêt
élevés pour attirer des épargnants ; la pièce d’argent sera tant
désirable que les gens la conserveront simplement pour sa supériorité et sa
hausse de valeur potentielle.
Et les Grecs ne seront pas
les seuls à vouloir en posséder. Toute l’Europe, qui n’utilise pas l’argent,
en voudra. La Grèce verra donc affluer le capital venu d’Europe ; l’achat
d’argent est sujet à des taxes, mais l’achat de pièces d’argent est exempté.
(Note du 17 mars 2015 :
le gouvernement grec pourrait autoriser les individus à lui envoyer des
objets d’argent, qui leur seraient renvoyés sous forme de « chouettes »,
ce qui bénéficierait à la reprise économique.)
Monsieur Tsipras, pouvez-vous
imaginer le pouvoir que cette joie et cette fierté d’appartenir au peuple
grec et de posséder une monnaie supérieure aux autres pourraient apporter à
votre gouvernement ?
Comme vous pouvez le voir, je
ne vous parle pas ici d’économie, mais des leviers fondamentaux qui motivent
les êtres humains, des leviers qui ont toujours, et partout, pu produire de
grandes choses, et que nous, Hommes d’aujourd’hui, avons oublié lorsque nous
nous sommes laissés absorber par nos fantaisies électroniques.
J’ai ici souligné les bases de l’introduction
d’une pièce d’argent qui pourrait circuler en parallèle à la drachme.
J’ai tenté de vous convaincre
qu’il s’agit d’un projet que vous pourriez suivre dans votre quête de
grandeur en tant que chef d’Etat ayant pu rétablir la prospérité et la joie
dans son pays.
Si vous souhaitez vous
entretenir avec moi, je reste à votre entière disposition.
Avec tout le respect que je
vous dois, bien à vous,
Hugo Salinas Price
Président,
Mexican Civic Association Pro Silver, A.C.
(Publié en espagnol sur www.plata.com.mx, 23 février 2015)
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