Les labels en
France sont bridés. En effet, comme l’explique très bien Marian
Eabrasu, le mot même de « label » est public.
L’ensemble des labels officiels sont gérés par l'Institut national de l'origine et de la
qualité (INAO), un établissement public sous la tutelle du
Ministère de l’agriculture, ce qui lui garantit un monopole de
fait sur la certification.
Par exemple, en 2003, l’appellation
« Saveurs de l’année » - un
palmarès crée par l’entreprise Monadia
et décerné annuellement à plus de cent types de produits
sur la base uniquement d’évaluations à l’aveugle de
consommateurs – a été condamnée par le Tribunal de
grande instance de Versailles pour avoir utilisé le mot
« label » à des fins publicitaires.
L’absence de labels privés est
problématique pour plusieurs raisons. La première, c’est
qu’elle crée un faux sentiment de sécurité chez
les consommateurs. La seconde et c’est lié, c’est
qu’elle met toute la responsabilité du maintien de la
qualité des labels et de la lutte contre la fraude dans les mains des
pouvoirs publics.
Or, il faut des moyens colossaux pour prévenir et lutter
efficacement contre la fraude, moyens que les pouvoirs publics n’ont
pas et c’est n’est pas l’ajout d’une étiquette
en plus sur les emballages qui réglera la question.
En présence d’un monopole en la
matière, une évaluation privée a plus de difficultés
à émerger du fait des nombreux obstacles légaux et de
leurs prix nécessairement onéreux. Il n’est tout
simplement pas évident de concurrencer les labels publics officiels
gérés par l’INAO, qui de fait sont entièrement
subventionnés et garantis par les autorités publiques.
Paradoxalement, on a pourtant plutôt
l’impression que c’est le manque de réglementation qui est
à l’origine de tous ces scandales, notamment alimentaires. Or, le secteur agroalimentaire est probablement
l’un
des plus réglementés et l’un des plus contrôlés
aux niveaux national et européen.
Les
contrôles de la qualité des produits que nous mangeons en France
sont déjà soumis à une myriade de normes et
réglementations. Au niveau mondial, la sécurité
alimentaire passe par le fameux Codex Alimentarius coordonné à la fois par
l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et
l’agriculture (FAO) et l’Organisation mondiale de la santé
(OMS).
Au niveau européen, plusieurs directives concernant la
sécurité alimentaire fournissent des spécifications
quant aux standards sanitaires des produits agroalimentaires
commercialisés. Ensuite
nombre d’institutions comme la Direction générale de la concurrence,
de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)
crée en 1985, ou encore la Direction générale de
l’alimentation (DGAL), crée en 1987 à la suite du
scandale de la vache folle, sont déjà en charge de
contrôler ce secteur.
On ne voit donc
pas très bien comment une énième réglementation
permettrait de résoudre la problème
des fraudes et des scandales à répétition. Au contraire,
il faut changer radicalement de mode de fonctionnement et reconnaître
que les labels privés pourraient améliorer les choses sans pour
autant embrouiller les consommateurs. En l’absence de contrôle ou
d’institution infaillible pour empêcher la fraude, il faudrait
pour sortir du cercle vicieux (scandale entraîne réglementation
= moins de vigilance = nouveau scandale) encourager les clients qui
s’estiment trompés à porter plainte, encourager la
vigilance des consommateurs et la concurrence entre les labels de
qualité. Cela permettrait l’émergence
d’un marché dynamique de la certification avec des entreprises
qui pourraient justement se spécialiser dans le contrôle de
qualité et l’examen des labels dont la réputation serait
jaugée à l’aune des scandales évités.
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