Si vous demandiez à ces passagers ce qu’ils pensent du probable
retour, bientôt, de leur pays sur les marchés internationaux de la dette, ils
vous répondraient certainement : on en paie le prix tous les jours.
Niveau de vie effondré, petits commerces de quartier ravagés, services
publics laminés, sentiment national blessé. Et ce pauvre bus toujours aussi
bondé, mais qui reste le moyen le plus efficace de rejoindre le centre. Au
tarif de 1,80 euro par personne. Pour des salaires de quelques centaines
d’euros par mois.
La fatigue de sept ans de crise profonde a laissé de profondes
traces sur les murs de la capitale grecque, à commencer par les
innombrables tags qui expriment la colère et les frustrations de gens qui ne
savent pas s’ils doivent la tourner contre Angela Merkel, symbole de cette
Allemagne souvent perçue comme arrogante sinon égoïste, ou contre leurs
propres politiciens, qui ont plongé leur pays dans le chaos financier dont
l’extraction leur coûte si cher. « Dans ce pays, ce qui est
pénible, c’est que les choses n’avancent pas », témoigne la
directrice d’une boutique touristique des Cyclades.
Mais la Grèce ne s’est pas effondrée. Elle n’a pas quitté
la zone euro. Les drapeaux européens continuent de flotter sur les bâtiments,
les bateaux. Le pays continue de fonctionner, certes un peu cahin-caha, à la
grecque, exigeant parfois un peu de patience de la part des visiteurs
habitués à des organisations plus… nordiques. Et surtout, elle reste,
fondamentalement, profondément, une démocratie. Et un exemple de résilience
et de redressement, notamment face au voisin turc qui s’enfonce dans
l’autoritarisme et la crise économique. Un point auquel les passagers en
attente à l’arrêt de Plateia Amerikis ne doivent pas rester insensibles.
Yves
Genier 13
juillet 2017