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Même motif, même punition

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Published : May 31st, 2011
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Category : Editorials

 

 

 

 

« La France n’est pas le Japon, qu’un séisme et un tsunami y ravagent une centrale nucléaire est invraisemblable ». Les défenseurs de l’électro-nucléaire s’en sont d’abord tenus à cette seule parade pour écarter tout risque, inquiétude et raison même de s’interroger. Craignant – on ne sait jamais – de voir surgir le fantôme d’une époque maintenant ancienne où l’option nucléaire était l’objet d’une vigoureuse contestation.


Fukushima tombant dans les oubliettes des médias, happés par de nouveaux sujets tous les deux ou trois jours, des tests de résistance européens allaient être séance tenante organisés, afin de lever les derniers soupçons, pour faire oublier l’alarmisme gouvernemental des premiers jours de la catastrophe, rétrospectivement sans fondement.


Trop scrupuleux, un commissaire européen allemand jouait alors les trouble-fêtes, prétendant élargir aux chutes d’avion et attentats en tous genres l’éventail des risques qui devaient être testés. En l’espace de quelques réunions internationales et sous le poids d’amicales pressions, il a dû finalement manger son chapeau. Le terrain dégagé, on respirait alors chez les électro-nucléaires ! Faute de temps, dans le calendrier imparti par les dirigeants politiques, les opérateurs des centrales allaient utiliser leurs vieux tests pour démontrer que tout allait bien, l’orage allait s’éloigner. Tests des banques ou des centrales, la même recette était utilisée.


Patatras, les aléas de la politique vinrent alors bousculer ces calculs trop finaux. Le mal était donc plus profond. Les voisins suisses, puis allemands, décidaient de sortir du nucléaire… Comme si la simple mais incontournable leçon de Fukushima avait été enregistrée et que ceux-là au moins en tiraient les conséquences : « Décidément, le nucléaire, c’est bien quand ça va bien. Mais quand cela tourne mal… »


Un nouvel argumentaire a du être improvisé. Faute de pouvoir continuer à magnifier la sûreté du nucléaire et ses innombrables bienfaits, ne pouvant pas opposer pour seul argument sa propreté à la production malfaisante de CO2 des centrales à gaz et à charbon, les électro-nucléaires ont alors décidé d’employer l’argument de dernier recours, comme une banque centrale agitant l’épouvantail de l’inflation : la référence au porte-monnaie. Non sans flatter au passage un vieux fond anti-allemand, nos voisins étant soupçonnés de jouer la facilité en fermant leurs centrales pour mieux s’approvisionner aux nôtres.


Une sortie du nucléaire serait hors de prix ! Voilà la seconde ligne de défense toute trouvée. Comment les foyers modestes pourraient-ils y faire face, en raison des énormes investissements qui seraient nécessaires et de leur répercussion sur les tarifs de l’électricité ? Nos experts oubliant qu’il y a quelques semaines, EDF réclamait une hausse impressionnante de ses tarifs, alors qu’il n’était pas du tout question d’une telle sortie.


Il en est du nucléaire comme de la finance. Il y règne à tout point de vue une grande opacité. Dans les deux cas, leurs bienfaits sont immenses, jusqu’au jour où… Avec la même assurance, les risques qui y sont pris sont maîtrisés, mais…


Ces deux industries ont donc des points communs. Est-ce étonnant, puisqu’elles appartiennent au même monde et qu’elles ont les mêmes hagiographes et farouches défenseurs ? Que trouve-t-on quand on tire le petit fil rouge de l’électro-nucléaire ? Un complexe industriel et financier, une bande de compagnies transnationales et de mégabanques ! Un monde qui ces temps-ci à tendance à souvent trébucher.



Billet rédigé par François Leclerc



Paul Jorion




(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.   

 

 

 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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