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Molinari et la sémantique libérale

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Published : October 14th, 2011
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Les mois à venir marqueront le centième anniversaire de la mort de l’économiste belge, Gustave de Molinari, décédé le 28 janvier 1912, à l’âge de 92 ans. Au cours de sa longue vie, ce libéral convaincu publiera un important nombre d’ouvrages.


Pourtant, ce « producteur d’idées » hors pair demeure relativement ignoré par les essais relatifs à l’histoire de la pensée libérale. Un chapitre lui est, certes, consacré dans l’ouvrage, Aux sources du modèle libéral français, dirigé par Alain Madelin. Mais il n’est, par exemple, jamais fait mention de son nom dans le récent livre de Sébastien Caré, La pensée libertarienne et ce, alors que le « Pape du libertarianisme », Murray Rothbard, estimait que son essai, « La Production de la Sécurité » était la première réalisation intellectuelle anarcho-capitaliste.


Quelles sont les raisons de cette ignorance relative ? Je me risquerai à penser que les questions de vocabulaire fournissent des explications – fussent-elles partielles – à cet état de fait. Ainsi, si nous lisons son séminal ouvrage, Les Soirées de la rue Saint-Lazare, dans lequel l’auteur fait discuter, de façon fictive, un économiste, un conservateur et un socialiste sur les questions économiques, politiques et sociales de son temps, nous nous apercevrons qu’il est facile d’être induit en erreur et de mésinterpréter Molinari. Il faut aussi reconnaître qu’il ne faisait pas toujours preuve d’une parfaite rigueur sémantique, se hasardant à des utilisations de concepts aléatoires.


Sa onzième leçon, relative à la liberté du gouvernement, est, en ce sens, particulièrement révélatrice. Il écrit, par exemple, la chose suivante : « Au nom du principe de la propriété, au nom du droit que je possède de me pourvoir moi-même de sécurité, ou d’en acheter à qui bon me semble, je demande des gouvernements libres. ». Le problème est qu’en l’espèce, Molinari transpose en politique un raisonnement qui ne peut être valable que dans la société civile. Le gouvernement ne saurait être au service du peuple et, surtout, à la disposition de ses velléités.


Ensuite, lorsqu’il défend le droit des gouvernés « de choisir librement leurs gouvernants » ou encore le principe de « souveraineté du peuple » cher aux révolutionnaires français, en aucun cas, il ne se pose en défenseur du régime démocratique contemporain. Il précisera clairement sa pensée quand il écrira : « les républiques que vous nommez démocratiques ne sont pas le moins du monde l’expression vraie de la souveraineté du peuple ». Il donnera ensuite sa définition de la souveraineté du peuple qu’on peut résumer à sa première phrase : « C’est le droit que possède tout homme de disposer librement de sa personne et de ses biens, de se gouverner lui-même. ».


Évidemment, une telle définition tranche avec celle communément admise. Le vocabulaire employé par l’économiste belge est parfois déroutant et force est de reconnaître qu’il n’est pas toujours approprié. En effet, rattacher la notion de « souveraineté du peuple » à celle de « droits individuels » est incorrect. La souveraineté est un concept émergeant pour la première fois dans les Six livres de la République du jurisconsulte français, Jean Bodin. Ce dernier le définit comme « la puissance absolue & perpétuelle d’une République ». Au sens de Bodin, il s’agit du principe fondant la doctrine moderne de l’État et il est dommage que Molinari entretienne une confusion, qui n’a pas lieu d’être, entre liberté, propriété et souveraineté.


Évidemment, ces erreurs sémantiques ne doivent pas faire oublier aux lecteurs l’intérêt de cet ouvrage et, surtout, de cette onzième leçon extrêmement visionnaire, notamment sur la fiscalité où il anticipe l’établissement de l’impôt progressif. Mais le développement d’une « novlangue libérale » poursuit son cours aujourd’hui encore, minant le sérieux académique des travaux libéraux.


Ainsi, Pierre Lemieux a-t-il titré un de ses ouvrages majeurs La souveraineté de l’individu. De la même façon – et puisqu’il est question de propriété dans ce court article – de nombreux auteurs ont voulu fonder une notion fortement contestable et extrêmement isolée dans la pensée juridique, à savoir la propriété de soi, oubliant qu’on ne saurait être en même temps, sujet et objet de droits. La pensée binaire règne parfois, comme dans l’article de Bertrand Lemennicier, intitulé Le corps humain : propriété de l’État ou propriété de soi ?, ce dernier estimant que la négation de la propriété de soi conduit directement à l’appropriation par l’État des corps humains des individus sans s’intéresser aux autres branches de l’alternative (comme la simple maîtrise de son corps) et en oubliant que le concept de propriété ne peut s’appliquer qu’à des biens meubles ou immeubles.


Les erreurs théoriques du passé peuvent malheureusement se perpétuer dans le présent et il est nécessaire de les corriger.


 

 

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Ronny Ktorza, diplômé de l'IEP d'Aix-en-Provence et d'HEC, est avocat depuis janvier 2011
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