Pour la
troisième fois consecutive en 1 an, l’économie
britannique s’est contractée de -0.5% au second trimestre 2012. Le
PIB du pays est revenu au niveau de la mi-2010, 4% en dessous de celui
d’avant la crise financière.
Partout
dans le monde, la Gauche s’empare de ce fait pour affirmer que la
« rigueur » est contre-productive et que le salut passe par
l’action gouvernementale et la dépense publique. Logiquement, il
faudrait donc augmenter les impôts afin de financer la relance sans
trop alourdir le poids de la dette.
Une
théorie à la mode veut que l’État
représentant près de la moitié de
l’économie des pays développés (44% au
Royaume-Uni, pour être précis,) toute reduction de la
dépense publique serait vouée à l’échec.
Elle entraînerait une baisse de l’activité qui, diminuant
les recettes fiscales tout en augmentant le nombre de
bénéficiaires de transferts sociaux, est source de
déficit budgétaire. Paradoxalement, la rigueur imposée
au nom de la maîtrise de l’endettement conduirait ainsi à
aggraver ce dernier.
Il y a
beaucoup à dire contre cet argument. Il implique, par exemple, que
l’augmentation des effectifs de l’État, ainsi que des
bénéfices sociaux, etc., soutiendrait mieux
l’activité que les restrictions qui permettraient de redonner du
souffle à l’activité privée.
Or, il y
a là quelque chose qui, bien que défendu par des figures telles
que Paul Krugman, contredit la vérité économique la
mieux établie et la plus fondamentale : « There’s nothing
like a free lunch, » (que l’on pourrait transposer en «
Rien n’est gratuit »), selon l’expression du prix Nobel
d’économie Milton Friedman.
On peut
prélever des ressources sur le secteur privé et embaucher ainsi
des fonctionnaires, augmenter les minima sociaux, etc. Mais cela a un
coût. Il s’agit non seulement des ressources
prélevées évidemment, mais aussi des richesses
qu’elles auraient créées si elles avaient
été utilisées de façon productive.
Au
delà du débat théorique, peut-on vraiment étayer l’idée que
la rigueur nuit à l’économie, surtout en cas de crise en
pointant du doigt la récession britannique actuelle?
Non.
Le
problème est que la « rigueur » est une notion
ambiguë. Pour l’opinion publique, elle est synonyme de diminution
de la dépense publique. Dans le langage économique, elle
référe plutôt à la diminution du déficit
public. Or cette dernière peut passer par de deux types de mesure : la
diminution des dépenses et /ou l’augmentation des recettes
fiscales.
Quel type
d’austérité le gouvernement britannique mène-t-il
depuis 2010 ? Ce n’est clairement pas un programme de diminution des
dépenses publiques. Entre 2010 et 2011, celles-ci ont augmenté
de 4,5%. Entre 2011 et aujourd’hui, elles ont déjà
augmenté de 5%.
Sur cette
période, les dépenses liées aux assurances et autres
bénéfices sociaux n’ont cessé d’augmenter,
tout comme celles liées à l’éducation, au
financement de l’Union européenne et de l’aide internationale.
Seules les dépenses des minstères de la Défense et de
l’Intérieur ont diminué.
Il est
vrai que le nombre de fonctionnaire est retombé à son niveau de
2008. Mais, comme le montre le graphique suivant, c’est là, pour
l’instant, une simple correction des politiques menées au moment
de la crise par le précédent gouvernement, qui rappelons le
était situé à gauche de l’échiquier
politique.
(Fonction
publique au R-U entre 2004 et 2012, http://www.econstats.com/uk/uk_pse___.htm)
De
celui-ci, le nouveau gouvernement de droite mené par David Cameron a
conservé l’augmentation de la taxation sur les plus
riches… à laquelle il a ajouté une augmentation de la
taxation sur les gains de capital, du taux de TVA, des cotisations sociales,
etc. Il est donc clair que la récession actuelle au Royaume-Uni ne
peut être la conséquence de la diminution des dépenses
publiques, qui n’a pas eu lieu, mais uniquement de l’augmentation
de la fiscalité.
De
même, la diminution des recettes fiscales (-0.8%), liée à
la forte baisse des recettes de l’impôt sur les
sociétés (-19.3%), semble donner un exemple concret de la fameuse
« courbe de Laffer, » selon laquelle une augmentation de la
fiscalité peut s’avérer contre-productive pour
l’État.
L’échec
des mesures prises par le gouvernement britannique ne peut donc pas servir
à défendre l’idée que l’État doit
augmenter ses dépenses. Il démontre au contraire que celui-ci
doit diminuer ses impôts afin de laisser l’économie
produire les richesses qui lui seront nécessaires s’il veut
rembourser sa dette.
Loin
d’en infirmer la valeur, l’expérience britannique est un
cas réel en faveur d’une « rigueur » par la baisse
des dépenses publiques et du niveau des impôts. Il montre
qu’il est impossible pour l’économie de se redresser et de
contenir l’endettement sans une politique de diminution de ceux-ci.
Notons,
en outre, que le « double-dip
» britannique intervient alors même que la Banque
d’Angleterre mène une politique tout à fait laxiste,
preuve que la souveraineté monétaire tant desirée par
certains n’est d’aucun effet sans réformes de fond, aussi
bien fiscales que réglementaires.
|