Comment des économistes peuvent-ils faire entendre la vérité à propos des
problèmes d'actualité?
La question n'est pas originale.
Par exemple, il y a plus de huit décennies, en 1929, Francis Delaisi
s'inquiétait de l'écart qui existait sur cet entendement entre les
industriels et des économistes.
Il voulait faire lire à un ami industriel un livre de conférences d'Irving
Fisher que ce dernier venait de prononcer en Suisse (cf. ce
texte).
Au coeur du livre, il y avait, en particulier, la proposition de Fisher
suivant quoi:
"Que l'or vaille mieux que le papier comme étalon monétaire, cela paraît
aujourd'hui évident.
Aucun banquier, aucun homme d'affaires ne le discute plus;
mais l'un et l'autre résiste en revanche à l'idée qu'un progrès soit encore
possible.
Ils croient que l'étalon d'or représente le dernier sommet de l'histoire de
la monnaie."
On sait la suite: "le sommet a été suspendu" et, pour sa part, la
France n'a plus de monnaie réglementée.
Ce que Delaisi disait alors de cet entendement est d'une actualité brûlante
aujourd'hui, rappelons d'abord ses propos avant de voir l'actualité.
"J'ai voulu faire lire ce livre par un industriel de mes amis, homme
fort cultivé, mais absorbé par d'importantes affaires.
- Inutile, m'a-t-il répondu.
Le titre m'en dit assez. Je veux bien admettre, puisque votre savant
professeur américain l'affirme, que « l'étalon d'or est une illusion ». Mais,
entre nous, cela m'est tout à fait indifférent.
Il me suffit de savoir, si je vends une marchandise à l'étranger, que son
prix en dollars me procurera toujours la même quantité de francs; et, que, si
je fais un dépôt en francs dans une banque ou un prêt à une entreprise, je
retrouverai à l'échéance, l'exact équivalent de ce que j'aurai prêté. En
fait, depuis que le franc-papier est redevenu convertible en or, la sécurité
de mes transactions, dans le temps comme dans l'espace, est assurée.
Alors, que m'importent ces discussions sur l'étalon, la « valeur », etc.,
etc...
Ce sont des spéculations d'économistes qui peuvent mettre en valeur
l'ingéniosité d'un théoricien désireux d'entrer à l'Institut. Mais elles sont
sans portée pratique.
Et, comme je reposais mon livre, un peu déçu, il ajouta :
- Ah! si votre éminent professeur américain, au lieu de s'attarder à des
problèmes monétaires désormais résolus, occupait son talent à nous expliquer
pourquoi, depuis quelques mois, notre balance commerciale est devenue
brusquement déficitaire, voilà qui nous rendrait service!
Car enfin la situation devient inquiétante : nos exportations diminuent, à la
fois en poids, et en valeur - par contre nos importations augmentent.
Les statistiques douanières accusent chaque mois un déficit considérable, que
ni le revenu de nos capitaux à l'étranger, ni les dépenses des touristes ne
parviennent à combler...
Je sais bien que notre change n'est pas en péril. La Banque de France, depuis
que la stabilisation a ramené chez nous les capitaux évadés, dispose d'une
ample provision de devises.
Mais, s'il nous faut cette année payer les 400 millions de dollars des stocks
américains, il n'en restera plus guère. Cette situation ne peut pas durer.
- Et comment l'expliquez-vous ? demandai-je.
- Précisément, je ne me l'explique pas.
Les prix sur le marché mondial n'ont pas changé sensiblement; le coût des
transports est le même, le crédit est facile, et les tarifs douaniers des
autres peuples sont restés invariables – du moins jusqu'à présent. C'est à
n'y rien comprendre.
Le Président de la Commission des Douanes a demandé à l'administration de
faire une enquête...
- Fort bien!
Mais si la cause du mal n'est pas, comme vous le dites, dans les conditions
du trafic, ne pourrait-on la chercher dans un phénomène monétaire - et par
exemple dans une variation de la valeur de l'or.
- Que voulez vous dire?
l'or ne peut pas changer de valeur puisqu'il est lui-même, par définition, l'étalon
de toutes les valeurs.
- C'est précisément la question, répliquai-je.
Et voilà pourquoi il serait peut-être utile de lire le livre du professeur
Irving Fisher.
- Ainsi, votre Américain prétend que l'or n'est pas un étalon?
- Ce n'est pas à moi de refaire sa démonstration. Vous verrez qu'elle
s'appuie sur des faits et conduit à l'évidence.
Pour la commodité des échanges, il est convenu que la valeur des objets
s'exprime en or.
Réciproquement la valeur de l'or doit s'exprimer par la quantité d'objets
qu'il peut procurer, c'est-à-dire par son pouvoir d'achat.
Pour le mesurer, on fait le total des prix des marchandises les plus
fréquemment échangées en un lieu et à un moment donné, et celui des mêmes
marchandises en un autre lieu ou à un autre moment, et l'on calcule le
pourcentage.
- Je sais, dit l'industriel, c'est la méthode des nombres-indices.
- Eh bien! si vous consultez les indices du dollar, établis par le Federal
Reserve Board américain, vous constatez qu'il faut verser aujourd'hui en
moyenne $ 138,5 pour avoir la même quantité de marchandises qu'on obtenait en
1914 pour $ 100.
C'est donc que le dollar ne vaut plus maintenant 100 cents (en marchandises)
comme autrefois, mais seulement 100 : 138,5 = 72 cents.
Et pourtant le dollar-papier n'a jamais cessé d'être échangeable à la Banque
contre la même quantité d'or. L'or s'est donc en réalité déprécié.
- Je le veux bien.
Mais c'est un phénomène accidentel dû à la guerre.
- La guerre assurément y est pour quelque chose.
Mais le professeur Irving Fisher vous montrera qu'en fait, bien avant 1914,
le pouvoir d'achat du dollar a varié dans des proportions tout aussi grandes,
même quand sa valeur-or demeurait constante.
Si maintenant vous considérez les indices des prix-or dans les principaux
pays d'Europe, tels qu'ils figurent au Bulletin de statistique de la Société
des Nations, vous verrez qu'ils sont (février 1929) à peu près au même niveau
en Angleterre (138,3) et en Allemagne (139,9) ;
mais beaucoup plus élevés en Suisse (143) et en Hollande (148); et beaucoup
plus bas en France (126,7) et en Belgique (123,2).
Cela montre que si l'or (en pouvoir d'achat) s'est partout déprécié depuis la
guerre, il s'est déprécié de façon fort inégale.
Aujourd'hui le même poids d'or qui donnait en 1914, pour 1 dollar de marchandises,
n'en procure plus que pour 72,2 cents aux États-Unis, 70 en Suisse, 67,5 en
Hollande, alors qu'il en donne pour près de 79 en France, et plus de 81 en
Belgique.
Si maintenant vous représentez par 100 la valeur actuelle (en marchandises)
du dollar aux États-Unis (soit 72,2 cents du dollar de 1914) vous constaterez
que la valeur (en marchandise) du même poids d'or est la même (à 1% près) en
Angleterre et en Allemagne
mais qu'elle est seulement de 93,4% en Hollande, 96,8 % en Suisse,
alors qu'elle atteint 109,2% en France, et 112,3% en Belgique.
- Soit, dit l'industriel; mais quelle influence cela peut-il avoir sur la
marche des affaires?
- J'y arrive.
Imaginez plusieurs exportateurs qui vendent sur le marché international une
même sorte de marchandise. La concurrence les obligera à la céder
sensiblement au même prix. Comme ils seront payés en devises, ils recevront
exactement la même quantité d'or, soit 100 dollars.
Avec cette somme, l'Américain pourra dans son propre pays se procurer pour
100 dollars de marchandises ou de salaires :
mais le Hollandais, avec la même somme en or, n'en trouvera que pour 93,4
dollars et le Suisse 96,8 tandis que
le Français en tirera l'équivalent de 109,2 dollars et le Belge 112,3.
Autrement dit, la différence des pouvoirs d'achat de l'or impose au
Hollandais une infériorité d'environ 6% par rapport à l'Américain (ou à
l'Anglais, ou à l'Allemand) alors qu'il assure un avantage de 9,2% au
Français, et de 12,3% au Belge.
Dans ces conditions, le Hollandais aura de la peine à maintenir ses prix au
niveau de son concurrent américain.
Quant au Français ou au Belge, comme ils se procurent pour la même somme sur
le marché intérieur plus de produits nationaux et plus de salaires, ils
pourront sans difficulté abaisser leurs offres de 2, ou 3, ou 5 dollars.
À ce compte, ils auront encore (toutes choses égales d'ailleurs) un bénéfice;
et ils mettront l'Américain (ou l'Anglais, ou l'Allemand) hors de combat.
Comprenez-vous maintenant pourquoi nos ventes à l'étranger ont été, même depuis
la stabilisation, si faciles? nos industriels, par le seul fait de la moindre
dépréciation de l'or en France, continuaient de toucher une véritable prime
d'exportation.
- Comme au temps de l'inflation.
- Exactement.
Savez-vous qu'en octobre 1927, - c'est-à-dire plus d'un an après la
stabilisation de fait, - l'écart entre le pouvoir d'achat du dollar aux
États-Unis et en France a atteint jusqu'à 25%.
À ce compte, le bénéfice provenant de la transformation du dollar en
marchandises (sur le marché intérieur) était si grand, qu'il permettait de
couvrir à lui seul les frais de transport de l'exportateur, et permettait de
franchir les barrières douanières les plus élevées.
À ce moment les Américains, en dépit de leurs tarifs, virent nos
métallurgistes vendre des tubes d'acier et des machines à la porte de leurs
propres usines, et cela explique qu'ils se soient rejetés vers le
protectionnisme.
Contrairement à toutes les prévisions, en dépit de la stabilisation, nos
ventes à l'étranger ont pris un essor inattendu.
- En effet, c'était magnifique!
- Seulement cela ne devait pas durer.
À partir du moment où, toutes les restrictions étant supprimées, l'or s'est
mis à circuler librement, il est allé tout naturellement vers les pays où son
pouvoir d'achat était le plus grand. Les capitaux américains ont afflué vers
l'Europe, créant une abondance qui faisait monter les prix sur le Continent.
Tout naturellement, quand les entraves artificielles disparaissent, les prix
tendent à s'établir partout au même niveau.
Sans doute ils n'y parviennent jamais exactement cela tient à la différence
des productions, au coût des transports qui s'ajoute aux prix des
marchandises importées, aux tarifs douaniers qui élèvent plus ou moins le
coût de la vie. Même avant 1914, le niveau variait d'un pays à l'autre. Mais
les écarts étaient faibles et à peu près invariables.
Aujourd'hui ils sont encore fort changeants et beaucoup plus grands, mais ils
tendent insensiblement à revenir à leur ancien étiage.
En France, par exemple l'index des prix monte lentement, mais de façon
continue. C'est dire que le pouvoir d'achat de l'or diminue.
Déjà, vous l'avez vu, l'écart avec les États-Unis n'est plus que de 9%. Cela
ne suffit plus à compenser les tarifs douaniers ni même le coût des
transports. Et ainsi forcément nos exportations diminuent.
- Mais pourquoi nos importations augmentent-elles? demanda l'industriel.
- Elles subissent les effets de la même loi, mais en sens inverse.
Quand l'écart était de 26% un importateur français, pour acheter 100 dollars
américains, devait vendre sur le marché français l'équivalent de 126 dollars
en marchandises; c'était lourd. Aujourd'hui il lui suffit d'en vendre
l'équivalent de 109, ce qui lui est bien plus facile.
Ainsi par la vertu du même phénomène, nos importations s'accroissent, nos
exportations diminuent, et le déficit commercial apparaît dans les
statistiques. Voilà la raison du singulier renversement de la balance
commerciale qui étonne et inquiète actuellement tous nos hommes d'affaires.
N'est-il pas vrai qu'il peut être utile de connaître les théories du
professeur Irving Fisher?
- J'en conviens volontiers, dit l'industriel.
Mais en somme si je comprends bien, il ressort de tout cela que la
stabilisation monétaire n'est pas achevée.
- En effet, on a stabilisé la monnaie de papier par rapport à l'or; il reste
à stabiliser la valeur de l'or en marchandises.
- Est-ce possible?
- Sans doute. Mais ce n'est pas facile.
Dans tous les pays à monnaie saine, les Banques d'émission peuvent mettre en
circulation des billets que l'on considère comme sains, pourvu qu'ils soient
couverts par des traites représentant des marchandises et par une
encaisse-or.
Pour que la convertibilité soit assurée, on estime que l'encaisse doit
toujours atteindre au minimum 40% du total de la circulation.
À condition de ne pas tomber au-dessous de cette marge, les banques peuvent
par le moyen de réescompte, accroître ou restreindre à volonté la circulation
des billets : dans le premier cas les prix montent, dans le second ils
baissent.
Et comme le billet, pourvu que la marge de sécurité ne soit pas dépassée, est
toujours convertible en or, elles peuvent faire varier le pouvoir d'achat de
l'or, sans que leur encaisse métallique ait changé.
La Banque de France, par exemple déclarait dans le dernier bilan que j'ai lu,
que la proportion de son encaisse au total de ses engagements atteignait 49%.
Dans ces conditions elle pourrait facilement émettre plusieurs milliards de
billets sans compromettre la convertibilité en or.
Toutefois il résulterait une hausse générale des prix à l'intérieur,
c'est-à-dire une diminution du pouvoir d'achat de l'or, et par conséquent un
stimulant très efficace pour nos exportations.
- Alors, qu'attend-t-elle pour le faire! s'écria mon industriel.
- Prenez garde, répliquai-je.
D'abord tout en rendant service aux exportateurs, elle gênerait
considérablement nos importateurs; et comme les premiers travaillent souvent
avec des matières premières achetées par les seconds...
D'autre part, même si elle le tentait, tous ses efforts pourraient être
réduits à rien.
Supposez qu'au moment où la Banque de France décide d'accroître sa
circulation, les Banques Fédérales de Réserve américaines s'avisent d'en
faire autant : les prix monteront aux États-Unis comme en France et l'écart
entre le pouvoir d'achat du dollar à Paris et à New-York restera le même.
Et comme les Banques américaines disposent d'une encaisse-or et d'une marge
d'escompte beaucoup plus grandes encore que la nôtre, elles sont, quoi que
nous fassions, maîtresses du jeu.
- Il faut donc surveiller avec attention la politique d'escompte des
États-Unis?
- Sans doute, et aussi celle de tous les autres pays, car partout où la
Banque d'émission peut étendre ou resserrer les crédits, il peut y avoir
fluctuation des prix intérieurs et dépréciation invisible de la monnaie.
- Mais, s'écria mon interlocuteur, ne peut-on mettre fin à ces perturbations
dangereuses, et stabiliser une fois pour toutes la valeur de l'or?
- On y songe, répliquai-je.
Ce fut une des principales préoccupations des Experts, lors de la fameuse
Conférence de Paris. Vous vous rappelez sans doute la Banque des Paiements
internationaux dont ils ont tracé le plan, et qui doit centraliser les
versements des divers gouvernements au titre des Réparations ou des Dettes.
Comme elle y ajoutera le produit des emprunts résultant de la «
commercialisation », elle disposera de capitaux énormes; elle pourra donc
facilement, par le jeu du réescompte, aider les Banques d'émission des divers
pays à stabiliser leurs index.
Si elle y parvient, le prix d'un objet ne variera plus qu'en raison de
l'offre et de la demande de cet objet, et non plus aussi en fonction de la
rareté ou de l'abondance des signes monétaires; alors, mais alors seulement,
le facteur monétaire étant devenu une « constante » n'aura plus aucune
influence sur les prix, et l'or sera devenu enfin un « étalon » !
Mais cela ne se fera pas en un jour; et d'ici là, il faut compter avec des
fluctuations, qui pour être sans action sur le cours des changes, n'en auront
pas moins une profonde influence sur le commerce international.
Mon interlocuteur resta un moment rêveur...
- En vérité, dit-il, la tâche des hommes d'affaires devient toujours plus
complexe.
Je vois bien que tout chef d'entreprises devrait suivre ces mouvements des
prix, et de l'escompte, sur les principales places du monde.
Mais comment pourrait-il le faire s'il n'est pas un spécialiste?
- Rien n'est plus facile, répliquai-je.
Depuis longtemps déjà diverses Universités américaines (Yale, Harvard) ou
anglaises (Cambridge et Londres), l’Institut de Conjoncture de Berlin, la
Statistique générale de la France, ont établi des sortes d'observatoires
économiques et construit des index. Malheureusement leur publication
mensuelle est trop tardive pour permettre à l'industriel ou au banquier d'en
tirer des résultats pratiques.
Alors il s'est créé en Amérique des Sociétés
anonymes, munies de capitaux importants, qui se font envoyer, chaque jour par
télégraphe, téléphone et même par câble, les cours de plusieurs centaines de
produits sur tous les grands marchés du monde; elles construisent avec ces
données des index, et pour couvrir leurs frais, les vendent au public.
- Et on les leur achète?
- Avec empressement.
Ce sont d'abord les Chambres de Commerce, les services centraux des grands Syndicats
industriels, métallurgiques, textiles, etc., les Sociétés Foncières, les
Sociétés d'Assurances qui engagent en opérations pour de longues années, - et
naturellement les Banques. Puis les particuliers eux-mêmes y sont venus :
maisons d'exportation et d'importation, industriels qui travaillent pour
l'étranger.
Aujourd'hui dans toute l'Amérique, il n'y a plus un homme d'affaires sérieux
qui n'ait sur sa table l'index des prix-or des différents pays, exactement
comme il consultait naguère quotidiennement le cours des changes, au temps de
l'inflation.
En Angleterre, en Allemagne existent des publications analogues, et je crois
même qu'on vient d'en créer une en France. Mais la plus ancienne, je crois,
et certainement la plus répandue, ce sont les circulaires de l'Index-Number
Institute, créé et dirigé par le professeur Irving Fisher.
- Quoi! l'auteur du livre que voici?
- Lui-même.
M. Irving Fisher, professeur à la Yale University de Boston, fut après la
guerre, avec le Suédois Cassel, l'Anglais John Maynard Keynes, et quelques
autres, un des premiers économistes qui, laissant de côté les vieilles
conceptions, donna de la monnaie une définition réaliste.
Naturellement on ne les écouta pas tout d'abord. Mais aujourd'hui leurs
théories commencent à devenir « classiques ».
Alors le professeur Irving Fisher a eu l'idée féconde de passer de la
théorie à la pratique.
Chaque jour, il se fait envoyer par dépêche ou par câble les cours des
principaux produits sur tous les grands marchés du monde, et aussi ceux des principales
valeurs de Bourse; ses bureaux établissent des index hebdomadaires; lui-même
les commente en des articles rapides et précis pour en marquer la tendance.
Des centaines de banquiers, d'industriels, de commerçants les reçoivent par
abonnement. Bien mieux, voyant l'intérêt que le public attachait à ces
renseignements, une centaine de journaux américains publient aujourd'hui, les
Index Fisher à côté de la cote des changes et de la Bourse.
En Allemagne, en Angleterre, la presse commence à faire de même.
- Et en France?
- Chez nous, naturellement on les ignore; ou bien si quelques-uns s'en servent - vous connaissez nos compatriotes - ils se
gardent bien de le dire, afin de garder un avantage sur leurs concurrents mal
avertis.
- Mais c'est absurde! s'écria l'industriel.
Si nous continuons à nous débattre ainsi dans la nuit, le commerce français
se laissera distancer de plus en plus sur le marché mondial. Il cherchera
dans des relèvements de tarifs douaniers - qui provoqueront des représailles
- une sécurité que seule la stabilisation de l'or pourrait lui donner.
Il faudrait que les Chambres de Commerce, les Banques, et même les
Administrations officielles avertissent les chefs d'entreprises de la gravité
d'un problème qu'ils ne soupçonnent pas...
- Hé! dis-je, comment le feraient-elles, si elles ne le soupçonnent pas
elles-mêmes.
Vous voyez bien qu'il faut d'abord lire - et faire lire -
le livre du professeur Irving Fisher...
En vérité, le temps n'est plus où, pour réussir en affaires, il suffisait
d'avoir de l'activité, du flair et une bonne administration.
De plus en plus l'activité économique sort de l'empirisme pour atteindre à
l'âge scientifique.
Voici une première contribution à la « Science des Affaires »."
En 2013, la France n'est donc plus sujette à l'étalon-or, la référence de
celle-ci ayant été "suspendue" en 1971-73 (cf. ce texte).
Elle n'a plus, non plus, de monnaie autonome puisque le "franc
français" a été fusionné avec d'autres monnaies de l'Europe géographique
depuis 1999-2002 dans ce qu'on dénomme l'"€uro" (cf. ce texte).
Pourtant les échanges de la France avec l'étranger traduisent le même déficit
qu'hier et la même inquiétude des industriels (cf. ce texte de août 2009).
Que leur dire?
La suspension de l'étalon-or a été une erreur politique majeure autant que
l'a été, quelque temps plus tard, la fusion de la "monnaie"
"franc français" dans la "monnaie"
"€uro".
Mais on ne peut faire le départ des effets désastreux des décisions, en
particulier, à cause du troisième larron, le "Fonds monétaire
international" failli (cf. ce texte de mars 2009) qui a
survécu malgré tout.
Il faut donc en sortir.
Comment?
Nous aurons l'occasion de l'exposer dans de prochains billets.