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Nick Hanauer, l'entrepreneur qui sous-estimait son propre rôle, 1ère partie

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Published : December 29th, 2011
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Category : Editorials

 

 

 

 

« Ce sont les entreprises qui créent des emplois ». Vous l'ignoriez peut-être, mais derrière cette phrase innocente se cache un mensonge permettant aux patrons de payer moins d'impôts qu'ils ne le pourraient. C'est du moins ce qu'affirme le riche entrepreneur Nick Hanauer dans un article paru sur Bloomberg, alors que les chancelleries occidentales se demandent comment sortir de la crise. L'objectif : faire payer les nantis, épargner le « peuple ».


Favoriser la création d'emplois n'est pas créer des emplois


Selon M. Hanauer, les emplois sont créés non par les entrepreneurs, mais par les consommateurs, puisque ces derniers, en consommant davantage, permettent aux entreprises de prospérer et, partant, d'embaucher des salariés supplémentaires. Ainsi, la demande influerait non seulement sur le chiffre d'affaire des entreprises, mais encore sur le nombre de postes à pourvoir.


Raisonnement séduisant, mais inexact. Car même si, comme l'explique Nick Hanauer, l'augmentation de la demande favorise la création d'emplois, cette dernière est loin d'être automatique.


D'abord, les entreprises peuvent satisfaire une demande croissante sans créer de nouveaux emplois. C'est flagrant dans la grande distribution, où la caisse automatique concurrence l'hôtesse de caisse, et on peut parier que le progrès technologique aidant, de plus en plus d'entreprises préféreront à l'homme la machine, au salarié le logiciel. Naturellement, le sacro-saint salaire minimum n'est pas pour rien dans cette réticence à créer de nouveaux emplois.


Ensuite, il peut être dans l'intérêt d'une entreprise d'employer moins de salariés que la demande ne le lui permet. L'innovation jouant le rôle que l'on sait, les dirigeants d'une entreprise peuvent choisir d'anticiper l'apparition de nouveaux besoins et de nouvelles préférences, et ce choix, bien sûr, peut se traduire par la création d'emplois. Mais ce faisant, la direction décide du nombre d'emplois à créer, des profils recherchés, et de la proportion entre les nouveaux emplois destinés à anticiper la demande de demain et ceux visant à satisfaire la demande d'aujourd'hui – et ce simple fait relativise l'importance que M. Hanauer prête à la demande dans ce processus complexe qu'est la création d'emplois.


Aussi, quand Nick Hanauer déclare que c'est la demande qui crée l'emploi, il pourrait aussi bien affirmer que c'est le nourrisson qui change ses propres couches. C'est absurde, car entre la demande et sa satisfaction, il y a des hommes qui identifient des problèmes et leur trouvent des solutions – un travail considérable pour lequel le consommateur, malgré tout son pouvoir d'achat, n'a pas la moindre compétence. Si des emplois sont créés ou supprimés, ce n'est pas parce que la demande augmente ou diminue, mais parce que les chefs d'entreprises y voient le moyen le plus efficace de suivre une stratégie, d'affronter la conjoncture, de survivre à la concurrence, etc.


L'œuf ou la poule ? Sur le marché, peu importe.


Aux yeux de certains, Nick Hanauer est un fin connaisseur du marché, on prétend qu'il comprend l'offre et la demande. Le problème, c'est qu'il tient deux discours opposés.


D'un côté, M. Hanauer évoque le dialogue permanent de l'offre et de la demande qui permet – ou non – la création d'emploi. De l'autre côté néanmoins, il n'hésite pas à affirmer que dans ce jeu de ping-pong, la demande est le moteur, et l'offre son reflet (Hanauer écrit ainsi que « sans le consommateur, les capitalistes sont hors jeu ». Comme si les entreprises concurrentes, n'en sachant rien, se disputaient autre chose que l'argent du... consommateur).


Cette incohérence s'explique vraisemblablement par le fait que dans son article, Nick Hanauer se soit donné deux objectifs contradictoires. Il voulait, d'une part, dynamiter la croyance selon laquelle les emplois sont créés par les entreprises, d'où l'évocation de l'interdépendance entre l'offre et la demande. Mais M. Hanauer voulait, d'autre part, et pour des raisons qui ne regardent que lui, faire passer l'idée que le patron, en tant qu'agent économique, n'est que l'exécutant du consommateur, qui seul peut créer des emplois.


C'est ainsi que Nick Hanauer en vient à décider que l'œuf précède la poule. Ce faisant, il répond à une question que le marché ne pose pas, puisque l'offre et la demande s'inscrivent dans un échange permanent, aux antipodes de la relation maître-domestique. Et de cet échange, l'idée que la demande crée les emplois est la négation, puisque l'on ne peut reconnaître ce rôle au consommateur sans nier absolument celui de l'entreprise et, partant, l'existence d'un échange.


Or c'est exactement ce que fait Hanauer. Ce soi-disant préjugé sur le rôle de l'entreprise dans la création d'emplois n'a pourtant rien d'une absurdité, tant il est vrai qu'au sens strict, c'est bien l'entreprise qui décide ou non de créer des emplois. Le reconnaître, ce n'est pas nier le rôle joué par le consommateur (qui achète ses produits), c'est comprendre que la décision de créer des emplois n'est que partiellement motivée par la demande et revient concrètement aux entreprises, qui fondent leurs choix sur de nombreuses autres considérations.


Mais je ne ferais pas honneur à M. Hanauer si, montrant du doigt les lézardes dans son raisonnement, je passais sous silence la pensée économique qui le fonde. Ce sera l'objet du prochain article.

 

 

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Je pense également que la création d'emploi est la résultante de plusieurs facteurs:

Tout d'abord l'emploi créé l'emploi et la destruction d'emploi détruit d'autres emplois. Par exemple la construction de (ce cher) E.P.R. engendre une création d'emploi dans sa construction en elle-meme mais aussi pour ses sous-traitants (de la restauration, l'habitat, ou les matériaux de gros-oeuvres).
De la même façon quand une compagnie aérienne low cost cesse son activité à l'aeroport de Marignane, ceux sont par la même des entreprises sous-traitantes qui ferment la porte.

Ensuite, je suis d'accord également avec l'auteur pour dire que le deuxième facteur de création d'emploi est l'offre et la demandeSans doute a-t-il raison en disant que pour les (grandes) entreprises (type CAC40) l'emploi est une variable d'ajustement, mais dans le cas des entrepreneurs ou des artisans (premier employeur en France) il semble évident que lorsque la demande augmente, la production doit suivre, d'où recrutement.

Enfin (ou en fin) je dirais qu'il y a d'autres évenements qui ne dépendent ni de l'un, ni de l'autre que je qualifierais de météorite (au sens catastrophique du terme, mais pas éphémère) politique comme par exemple les 35 heures. Cette mesure a non seulement obligé certains à embaucher alors qu'il n'y a pas eu augmentation de la demande : Par exemple, le petit coiffeur qui a du prendre une coiffeuse de plus (qui se roule les pouces) car il n'y a pas plus de clients dans son salon, mais les horraires ont changé ! Ou encore les hopitaux où cette mesure a desorganisé des services entiers à cause d'une pénurie de personnel hospitalier !

Il n'y a donc pas que l'oeuf ou la poule, mais beaucoup d'autres facteurs (pas forcément bénéfiques) qui influent sur la création d'emploi.
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Je pense également que la création d'emploi est la résultante de plusieurs facteurs: Tout d'abord l'emploi créé l'emploi et la destruction d'emploi détruit d'autres emplois. Par exemple la construction de (ce cher) E.P.R. engendre une création d'emploi  Read more
Tophe28410 - 12/30/2011 at 12:09 PM GMT
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