Coupables
préférés des économistes marxo-keynésiens,
des hommes politiques (de droite comme de gauche), et des journalistes, les
traders passeraient leur temps sur les marchés, à attaquer les
États, et in-fine les peuples qui n’en demandaient pas tant. Ces
« puissances d’argent » auraient donc les moyens
de faire tomber les États ci et là, et d’y trouver sinon
du plaisir, les intérêts sonnants et trébuchants qui
alimentent leur cupidité légendaire.
L'arme
identifiée : la spéculation.
Si
effectivement, la spéculation pose des problèmes en cas de
création monétaire, elle n’en reste pas moins le moteur
essentiel et indépassable de l’investissement. Par ailleurs,
pendant des décennies, les actifs d’État étaient
considérés sans risque, « risk
free », et attiraient naturellement de nombreux épargnants.
Mais le dérapage des finances publiques a progressivement
détourné les investisseurs des obligations souveraines.
La spéculation,
c’est bon.
Spéculer
(du latin spĕcŭlāri), c'est observer. En l'occurrence, il
s'agit d'observer le marché, et par l'investissement, d'essayer
d’en tirer le meilleur profit.
C'est
justement ce regard, ce discernement, et cette projection qui permettent une
allocation optimale des ressources. Heureusement que les détenteurs de
capitaux misent sur la capacité d’un agent à faire
fructifier leur épargne, cela permet de faire se rencontrer de bonnes
idées et les moyens pour les financer. C'est cet élan qui
pousse à mettre ses ressources à la disposition de
l'économie, selon des choix spéculatifs. On imagine en effet
assez mal un épargnant faire volontairement des choix d'investissement
le conduisant avec certitude à perdre de l'argent.
Investir,
c’est spéculer sur l’avenir, et une économie sans
spéculation est une économie sans investissement qui
n’est plus irriguée par l’épargne. Elle est
malheureusement vouée à la sécheresse.
Pas de dettes, pas de
détresse.
Par
« attaque », on entend le plus souvent le simple fait
que des investisseurs se détournent de tel ou tel investissement. Il
ne s’agit donc pas d’un accord coordonné pour faire tomber
tel ou tel État, mais simplement d’arbitrages qui conduisent les
investisseurs à placer leur argent sur d'autres produits plus
rentables, ou moins risqués.
La
montée des taux d’intérêts qui asphyxient la
Grèce n'est que l'image tout à fait rationnelle du risque que
représente l'achat de bons du trésor grec aujourd'hui. En
réalité, loin d'être une attaque des spéculateurs,
ce creusement des spreads (écart entre les
taux d’intérêts) n'est que le retour mécanique aux
taux qui étaient ceux pratiqués avant l'entrée dans
l'Euro (qui avait à l'époque artificiellement aligné les
taux grecs sur les taux allemands).
On
accuse également régulièrement les CDS (Credit Default Swap), contrats de protection
financière, permettant à l'acheteur de compenser les pertes de
l'actif de référence en cas d’événement de
crédit précisé par le contrat (le cas le plus
extrême étant le défaut total). La responsabilité
attribuée aux CDS dans la crise que traverse l'Euro depuis 2008 est
très excessive. En effet, ce n'est pas parce que l'on parie qu'un
sprinter ne va pas gagner une course qu'il va la perdre. En revanche, un
État dont la viabilité dépend de l'argent qu'il doit
emprunter sur les marchés se met lui même
en danger et en situation de dépendance vis à vis de ses
créanciers.
Plus
simplement, un État qui n'a ni dettes ni déficits ne peut pas
être « attaqué » par les
« marchés » pour la simple et bonne raison qu'il
ne dépend pas d'eux.
De
Gaulle l'avait compris, et sa si chère indépendance de
l’État rimait alors sobrement avec zéro déficit.
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