|
L'enquête de Courtillot nous explique le rôle de la tectonique
des plaques, à l'origine de phénomènes volcaniques et
séismiques. Elle montre que le mouvement des plaques n'explique pas
tout, notamment l'existence de certains archipels volcaniques.
L'auteur considère que la tectonique des plaques permet à la
Terre d'évacuer l'essentiel de la chaleur emmagasinée en son
sein, mais qu'elle n'est pas son seul mode de refroidissement. D'où la
« descente aux enfers », ce voyage vers le noyau
terrestre que nous propose l'auteur avec des moyens techniques qui en
étonneront plus d'un. Selon lui, la Terre dispose d'un deuxième
mécanisme d'évacuation de la chaleur. Plus épisodique et
plus localisé, il repose sur l'éruption de panaches,
ressemblant aux lampes à lave à la mode il y a quelques
années. Certains panaches, plus puissants que d'autres, traverseraient
périodiquement l'épaisseur de la Terre, feraient
éruption et donneraient naissance à un trap. Ce terme technique
décrit un paysage composé d'un empilement de couches de laves
ayant une forme d'escalier, à l'image du fameux trap du Deccan
localisé en Inde. Vincent Courtillot s'intéresse en particulier
à l'éruption des panaches ayant donné naissance à
des traps car il a trouvé une corrélation entre leur apparition
et des extinctions massives d'espèces. Ainsi, l'éruption ayant
crée le trap (ou les trapps, selon une formulation plus
généralement acceptée) du Deccan en Inde, il y a 65
millions d'années, expliquerait la fameuse disparition des dinosaures.
M. Courtillot explique
aussi pourquoi ces éruptions ont le potentiel de détruire une
très grande partie de la faune et de la flore sur Terre, tout en
montrant comment il est possible de dater la formation de ces gigantesques
phénomènes volcaniques. Chacun d'entre eux s'est
caractérisé par l'écoulement de plusieurs millions de
kilomètres cubes de lave sur une période géologiquement
courte, une centaine de milliers d'années. Pendant ce temps, les flux
de lave ont dégagé des quantités astronomiques de gaz
dans l'atmosphère, à des hauteurs dont l'auteur ne doute plus
qu'elles aient été stratosphériques, ce qui a
nécessairement eu un impact sur le climat. Les quantités de
soufre éjectées dans l'atmosphère – très
préjudiciables à la vie – sont estimées à
environ 100 gigatonnes pour certaines coulées et à plus de
10 000 gigatonnes pour tout le volcanisme du Deccan.
L'auteur remet ainsi en question la fameuse thèse d'Alvarez, selon
laquelle les dinosaures auraient disparu suite à la collision d'une
météorite. Pour Courtillot, une collision ne peut pas expliquer
à elle seule cette extinction de masse et les scénarios
alternatifs faisant état de deux collisions de
météorites ne seraient pas prouvés. A contrario,
la concomitance entre éruption d'un trap et extinction d'espèce
semble se reproduire dans l'histoire. Cela n'empêche pas l'auteur de
reconnaître que son scénario, novateur, « est encore
loin de convaincre tout le monde, et que bien des aspects méritent
d'être soigneusement testés ». (p. 278)
Purement scientifique,
l'ouvrage s'insère aussi dans le débat, très actuel, sur
les causes du changement climatique. Certains s'interrogent sur la
légitimité d'un débat autour des conclusions du GIEC,
selon lequel les 0,7°C de réchauffement observé au cours du
20e siècle sont liés à l'activité humaine. C'est
ce que fait l'auteur. Comme Claude Allègre, et bien d'autres
scientifiques sceptiques, cela lui a valu nombre de critiques et d'attaques
visant à jeter le discrédit sur ses travaux.
Selon Courtillot,
l'irradiance solaire ou les variations de la couverture nuageuse « ont
peut-être été sous-estimés par rapport à
ceux dus aux variations du CO2; leur mécanisme physique n'est encore
pas suffisamment compris. Cela ne nie pas le rôle du CO2, mais jette le
doute sur le degré de certitude de la conclusion du GIEC ».
Selon lui, il n'est pas scientifiquement possible d'établir avec
certitude que le réchauffement est lié à
l'activité humaine. Et de rappeler comment des
« spécialistes renommés du climat, qui se sentent
encore isolés et marginalisés par les medias, défendent
depuis des années sans être vraiment entendus des idées
divergentes ». (p. 77)
Un courage certain de
la part d'un scientifique appelant ses confrères à
acquérir « la maîtrise du terrain et de
l'observation, en apportant à la communauté des
collègues une brassée de données nouvelles, aussi
solides que possible » avant de se jeter sur leur ordinateur.
Selon lui, ces données sont tout aussi importantes, voire plus
importantes que les modèles qu'on en aura déduits et les
simulations numériques qu'on aura pu faire (p. 300).
Évidemment, on
ne peut que souhaiter qu'il soit entendu par les membres du GIEC et, d'une
manière générale, par tous ceux qui mettent l'accent sur
les simulations informatiques sans attacher d'importance aux observations
physiques. Les modèles ont une valeur prédictive d'autant plus
faible qu'ils sont déconnectés de l'observation. L'affaire du
climategate, puis celle de la prétendue fonte des neiges de
l'Himalaya, à propos desquelles le GIEC a reconnu avoir fait erreur,
montre que la messe est loin d'être dite et qu'il est grand temps
d'accorder plus d'importance aux faits qu'aux modélisations.
Cécile
Philippe
Institut Economique Molinari
Tous
les articles par Cécile Philippe
Supportez
l’Institut Economique Molinari en devenant membre. Cliquez ici
Cécile
Philippe est le directeur de l’Institut Economique Molinari, un
organisme de recherche et d'éducation visant à entreprendre et
à stimuler l'approche économique dans l'analyse des politiques
publiques. Il a été baptisé du nom de Gustave de
Molinari, économiste et journaliste franco-belge qui a oeuvré
toute sa vie à promouvoir cette approche.
|
|