La vidéo à l’origine du débat
télévisé est intitulée "Would returning to the gold
standard end currency wars?".
Bien évidemment, les nations qui utiliseraient l’or en tant que monnaie
auraient à accepter que l’or ne puisse être dévalué, ce qui représenterait un
grand pas en avant par rapport au système monétaire actuel.
Michael Woolfolk,
de chez Bank of New York Mellon prend parti contre l’or, et Komal Sri-Kumar de chez Sri-Kumar Global Strategies plaide en sa faveur. Woolfolk
apparaît comme le représentant parfait de l’establishment. Il travaille pour
une grosse banque et désire plus que jamais
maintenir le statu quo, bien que comme beaucoup, il y voit quelques
objections. Bien qu’il admette que les guerres de dévaluation de devises
n’aient pas de bénéfices sur le long terme, il estime qu’elles peuvent
s’avérer profitable sur le court terme.
Sri-Kumar
répond à Woolfolk comme il le mérite. Rien de bon
ne ressort du pillage des épargnants et de la productivité des entreprises au
travers de la dévaluation, que ce soit sur le court ou le long terme.
Malheureusement, il n’est pas un excellent représentant de l’étalon or, comme
nous le verrons plus loin.
Mahatma Gandhi a un jour
dit : ‘Ils commencent par vous ignorer, puis ils vous rient au nez avant
de s’opposer à vous… mais ils finissent toujours par perdre’. Dans la vidéo
de Bloomberg, nous pouvons voir que nous nous trouvons actuellement quelque
part entre le rire et l’opposition. L’or ne peut plus être ignoré.
Woolfolk semble parfois ne pas pouvoir contenir
son dédain pour l’or. Il interrompt Sri-Kumar en
lui disant : ‘Mais vous ne pouvez pas adopter un étalon or… si ?’
avant de lui faire un sourire en coin qu’il s’empresse d’effacer de son
visage. ‘Je veux dire, la valeur de l’or devrait être très importante pour
qu’il puisse réintégrer le système monétaire, vous ne pensez pas ?’
ajoute-t-il avec un ton de patience exagérée.
Woolfolk pense que nous n’avons pas assez d’or.
A chaque fois que j’entends cela, je ressens le besoin de poser trois
questions. Premièrement, de quelles quantités d’or pense-t-il que nous en disposions ?
Deuxièmement, de quelles quantités d’or pense-t-il que nous ayons
besoin ? Et finalement, comment est-il parvenu à ces résultats ?
Sri-Kumar
a soulevé un point qui je pense est largement sous-estimé : les banques
centrales sont à l’origine de l’incertitude du public. J’ajouterais que les
calculs économiques papiers sont impossibles. Un travailleur des BTP ne
pourrait pas utiliser un élastique pour faire des mesures, il a besoin d’un
mètre. Un comptable ne peut pas utiliser un dollar élastique pour mesurer la
valeur d’une entreprise, il a besoin d’or. Aujourd’hui, ils essaient
d’utiliser des dollars, mais les profits tendent à être surévalués et les
pertes sont généralement sous-évaluées.
Malheureusement, l’idée
principale de Sri-Kumar est insensée. Il voudrait
que les gouvernements fixent le prix de l’or. Il pense même connaître le
chiffre magique : 1675 dollars l’once. Sri-Kumar
devrait se souvenir que la fixation des prix ne fonctionne jamais (et que les
prix doivent pouvoir fluctuer sur le marché libre).
En dehors du problème fatal
dont souffre la fixation des prix, les gouvernements se trompent dans leur
fixation de prix pour deux raisons. Premièrement, ils ne disposent pas
d’informations suffisantes pour ce faire, et deuxièmement, ce sont des lobbyistes.
Imaginez le débat à Washington autour d’une fixation du prix de l’or. Les
débiteurs voudraient que son prix soit élevé pour pouvoir liquider leur dette
avec aussi peu d’or que possible. Les créditeurs voudraient que son prix soit
très bas pour pouvoir obtenir plus d’or de leur contrepartie. Bien trop de
conflits d’intérêts en ressortiraient.
Sri-Kumar
propose un retour au plus récent des étalons or, c’est-à-dire au système de Bretton Woods. Sous un tel
système, posséder de l’or pour un américain était considéré comme un crime
puni d’emprisonnement. Bien que Sri-Kumar ne mette
pas en avant ce détail particulier, il est pour le moins nécessaire parce
qu’il évite que les gens puissent acheter de l’or et forcent le gouvernement
à laisser son prix grimper ou de voir s’évaporer leurs réserves.
Sous Bretton
Woods, le dollar n’était échangeable que par les
banques centrales. Et ces banques les échangeaient très rapidement. Avant
1971, la quantité de dollars renvoyés vers les Etats-Unis étaient
suffisants pour que leurs réserves d’or diminuent de 100 tonnes par jour. Le
gouvernement n’était plus très loin de perdre tout son or, c’est pourquoi le
président Nixon a pris la décision ‘temporaire’ de suspendre la
convertibilité du dollar en or.
L’échec de Bretton
Woods était inévitable. Les économistes Jacques Rueffe et Robert Triffin ont
même prédit son effondrement de nombreuses années avant qu’il ne se produise.
J’ai couvert certaines des
problèmes posés par l'étalon
or d'avant 1913 ici, mais il est clair qu’il fonctionnait bien mieux que
le système de Bretton Woods.
Je trouve très bien que Sri-Kumar ait mentionné que l’or ne puisse pas être dévalué
et que les prix ne puissent pas augmenter sous un étalon or. Mais bien plus devrait
être dit si nous voulons éviter de connaître le même destin que Rome. La
prochaine fois que Bloomberg a besoin de quelqu’un pour parler de l’étalon
or, espérons que quelqu’un de plus compétent sera choisi.
Pour ceux que cela intéresse,
j’ai publié une
vidéo hier qui traite de la conséquence d’un dollar
non-convertible : l’effondrement du système sous le poids de la dette.