La panique commence
Changement de
paradigme et échec institutionnel
Quand un paradigme se
trouve changé, ce qui était autrefois tenu pour vrai ne fait plus partie du
dogme, de nouvelles questions viennent remplacer les anciennes, et l’échec
institutionnel devient ordinaire lorsque les solutions traditionnelles n’apportent
plus les réponses nécessaires.
Nous avons entamé la
dernière phase de la partie. Chose que j’ai déjà expliquée en septembre 2008
dans mon article Gold
& The Collapse of Paper Money,
dans lequel j’ai fait référence à The Great Wave, Price
Revolutions and the Rhythm of History (Oxford University Press 1996), par
David Hackett Fischer, dans lequel il place la crise économique actuelle dans
un contexte plus large et bien plus significatif :
Selon le professeur
Fischer, des vagues de hausse de prix ont interrompu de longues périodes de
stabilité tout au long de l’Histoire. Ces vagues sont souvent accompagnées de
désastres inattendus et de soulèvements populaires, et se terminent toujours
par un effondrement économique.
Ces vagues s’étendent
sur 80 à 160 ans, et leur apparition marque la fin des époques et des ères.
Elles ont marqué la fin de l’ère féodale, la fin de la Renaissance et des
Lumières ; et bientôt, la vague qui est apparue en 1896 mettra fin à l’ère
de l’ « équilibre victorien » qui a commencé avec le règne de
la reine Victoria.
Chaque grande vague a
vu l’énergie et la nourriture en tête de la hausse des prix. Les biens et
services ont toujours été en retrait. Voilà qui indique que l’influence
première en est l’excès de demande en agrégats, générée par l’accélération de
la croissance démographique ou la hausse du niveau de vie, voire les deux.
Les prix ont grimpé,
et sont devenus de plus en plus instables. Ils ont commencé à flamber pour
finalement s’effondrer et faire preuve d’une volatilité accrue. Des chocs
sévères ont été ressentis sur les marchés des marchandises. La masse
monétaire s’est retrouvée contractée puis élargie à un rythme accéléré.
Les marchés
financiers sont devenus instables. Les dépenses gouvernementales ont gonflé
plus rapidement que les revenus, et la dette publique a augmenté très
rapidement. Les salaires, qui au départ augmentaient en parallèle aux prix,
sont désormais en retrait. Les revenus du travail ont diminué alors que les
revenus de la terre et du capital ont grimpé. Les riches se sont enrichis.
Les inégalités de richesses et de revenus se sont accentuées. La faim, l’itinérance,
le crime, la violence, l’alcool, les drogues et les problèmes familiaux ont
gagné de l’importance.
Les gens ont perdu
toute confiance en les institutions. L’heure est à la recherche de valeur
spirituelles. Les plus jeunes, incertains face à l’avenir comme au passé, ont
laissé place à l’aliénation et à l’anomie culturelle. La grande vague a fini
par se briser pour laisser place à une crise virulente qui a impliqué contraction
démographique, effondrement économique, révolution politique, conflit
international et violence sociale.
Aujourd’hui, une nouvelle
vague fait son approche. Une fois de plus, une crise cataclysmique se
développe. Contraction démographique, effondrement économique, révolution
politique, conflit international et violence sociale viendront mettre fin au
paradigme que nous connaissons aujourd’hui pour laisser place à un nouveau,
un meilleur paradigme.
Au sujet de ces crises
cataclysmiques et transformatrices, le professeur Fischer écrit ceci : Chaque
crise a amélioré la condition des gens ordinaires. Chaque crise a élargi l’idée
de la dignité humaine, de la liberté et de la loi. C’est une tendance qui s’est
renforcée après chaque vague consécutive.
Le
plus vieux livre du monde, I Ching (le Livre des mutations) nous offre une
perspective sur la crise actuelle qui soutient le point de vue positif du
professeur Fischer :
Dissolution,
hexagramme 59 : Être emporté par le courant peut être une bonne chose.
Ce qui semble être un désastre peut se trouver être une bénédiction. Le
protagoniste est emporté par le courant, une force irrésistible et
destructrice. Mais cette force de destruction se prouve être bénéfique,
puisqu’elle le porte jusqu’à des sommets qu’il n’aurait jamais pu atteindre à
lui seul.
Rediscovering the I
Ching, Greg Whincup, Doubleday & Co. 1986
Nous avons demandé un
signe,
Et nous l’avons reçu.
Mais nous nous sommes
ensuite interrogés
Sur ce qu’il signifiait.
Le grand
réajustement
The
Big Reset: War on Gold and the Financial Endgame (2014) de Willem
Middlekoop, nous raconte l’histoire de l’or de manière claire et instructive.
Mais la conclusion favorisée par Middlekoop est que le rêve qui fait saliver
les banquiers centraux aujourd’hui est un jeu qu’ils peuvent possiblement
gagner.
Le style conclusif de
Middlekoop laisse sous-entendre que le succès du grand réajustement des
banquiers, c’est-à-dire une nouvelle devise de référence internationale, est
virtuellement assuré. Il est un fait accompli qui ne nécessite rien de plus
que d’être mis en place pour faire des billets de banques bidon des banquiers
une réalité viable.
Une telle mise au point pourrait
raviver le paradigme mourant du crédit et de la dette en permettant aux
banquiers de continuer de vivre à la manière de parasites, de se nourrir de l’endettement
et de la productivité des autres.
L’idée que l’humanité
contrôle sa propre destinée n’est qu’une superstition moderne, un
sous-produit bâtard d’un âge industriel en déclin. L’idée que nous soyons
responsables de notre destin – qu’il soit la conséquence inexorable de notre
libre volonté – ne signifie pas que nous en avons le contrôle.
Le pouvoir n’est pas plus une forme de contrôle que le
crédit est une forme de monnaie
C’est aussi vrai pour
les banquiers que pour le reste de l’humanité. C’est une vérité qui n’est, en
revanche, pas comprise des banquiers. S’ils en comprenaient le sens, ils ne
se comporteraient pas comme ils le font aujourd’hui.
Dans The Great Wave,
Price Revolutions and the Rhythm of History, David Hackett Fischer écrit
ceci : Aux Etats-Unis, les problèmes de compréhension économique ont
été accentués par l’effet de prospérité économique. Pendant la seconde guerre
mondiale, les Japonais ont parlé de « shoribyo », ou de « maladie
de la victoire ». Les Grecs l’appelaient « hubris », et
pensaient qu’elle se terminait toujours par l’intervention de la déesse
Némésis - qui intervient lorsque ceux qui profitent des vagues commencent à
croire qu’ils en sont les créateurs, au moment où une vague se brise et
recommence à reprendre des forces.
La mère de tous
les changements de paradigme : le réajustement universel
En mai 2007, seize mois
avant la crise financière de 2008, j’ai écrit ceci dans Subprime
America infects Asia and Europe :
Nous sommes au
printemps 2007, et le soleil brille sur les Etats-Unis. Des barbecues sont
nettoyés dans les jardins dans l’anticipation d’un glorieux été. Une crise
financière sévère fait toutefois son approche ; une crise aussi
inattendue que la séquence victorieuse des Golden State Warriors pendant la série
éliminatoire de la NBA.
Cette crise
financière inattendue aura bien plus de conséquences que la résurrection
magique des espoirs des Warriors par Don Nelson. Parce que la plupart des gens
ne savent pas qu’une crise financière fait son approche, ils n’auront que de
faibles chances de survie.
[Note: Six semaines
après l’écriture de cet article, le 23 juin 207, le New York Times a rapporté
que Bear Stearns a promis de lever 3,2 milliards de dollars pour
refinancer l’un de ses hedge funds, qui s’était effondré suite à de mauvais
paris sur les subprimes.]
La crise inattendue que
j’ai prévue en 2007 n’est pas terminée. Aujourd’hui, pour reprendre la
théorie des vagues de Fischer, cette crise est aussi sur le point de s’abattre
sur nous et de détruire tout le crédit jamais créé.
La crise sous-jacente ne
concerne pourtant pas les marchés des obligations, la dette excessive ou la
capacité des banques centrales à raviver la croissance économique. La crise
actuelle s’inscrit dans le cadre d’un changement de paradigme – un réajustement
universel qui est sur le point de transformer l’humanité et la vie sur la
Terre.
En 1981, Buckminster
Fuller a écrit :
L’humanité continue d’avancer
vers une crise sans précédent. Une crise qui a été apportée par une évolution
basée sur l’intégration et l’intercommunication la plus totale d’une humanité
de toutes les couleurs et de toutes les cultures, et par l’évolution d’une
humanité au niveau de vie durable et supérieur à ce que le monde d’autrefois
n’a jamais connu.
Cette crise sans
précédent implique des changements météorologiques cataclysmiques ;
records de chaleur, records de froid, records de pluie, inondations,
sécheresses, éruptions et tremblements de terre. Le réajustement universel,
aussi nécessaire qu’il soit, ne sera pas facile et n’assurera la survie de
quiconque.
Ses conséquences ne font
toutefois pas l’ombre d’un doute. Un monde meilleur approche.
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