Nous vivons une époque
d’ignorance économique aigue, -particulièrement
l’on prend pour jauge la théorie économique sous-jacente
aux politiques des banques centrales -, et il est manifeste que nous
n’avons rien appris de plusieurs millénaires de destruction
monétaire. La démonstration persistante que le capital, et pas
le papier, est la base de la prospérité est tombée dans
le plus complet oubli. Chaque
jour, nous sommes confrontés au spectacle désolant de
ministres, commentateurs et même de prix Nobels nous disant
qu’imprimer du papier est la solution à nos problèmes
économiques.
Depuis
l’irruption sur la scène de la crise financière au second
semestre 2007 les banques centrales principales se sont toutes
engagées dans une politique irresponsable de baisse des taux
d’intérêts.
Ainsi,
par exemple, les taux d’intérêts de la banque centrale
d’Angleterre (BOE) ont été abaissés de 5.75% en Novembre
2007 au niveau actuel de 1%. La
banque centrale des Etats Unis (la FED) a baissé son taux principal
(le « Federal Funs Rate Target) de 5.75%
à environ 0% actuellement.
La BCE, pourtant réputée
« conservatrice », a abaissé ses taux de 4.25%
en Septembre dernier à 2% aujourd’hui. Quant à la Banque du Japon, ses
taux ont été divisés par 5, de 0.5% à 0.1%.
Compte
tenu de ce que, jusqu’ici, ces très bas taux
d’intérêt n’ont pas été capables de
relancer l’économie, les banquiers centraux envisagent désormais
d’utiliser d’autres moyens.
Le
gouverneur de la Banque d’Angleterre a annoncé la semaine
dernière que la banque centrale du Royaume Uni allait appliquer une
politique « d’assouplissement quantitatif » pour
relancer l’économie du pays. L’idée est d’inonder
l’économie de monnaie en achetant des obligations du
trésor de sa Gracieuse Majesté. La banque centrale des Etats Unis
réfléchit à mettre en œuvre une politique
similaire.
Il
ne faut pas oublier le fait que, depuis leur décision de baisser agressivement
les taux d’intérêts, les banques centrales ont
déversé de vastes sommes dans le système bancaire sans
arriver à relancer l’activité économique. Si ce
système n’a pas donné de résultats depuis des
mois, pour quelle raison pourrait il fonctionner aujourd’hui ?
Le
taux annuel de croissance du bilan de la banque centrale américaine
(la pompe à monnaie) a bondi de 3.0% en Aout l’année
dernière à 152,8% en Décembre 2008, pour retomber
à 127,5% en Janvier 2009. De la même manière, le taux de
croissance du bilan de la banque d’Angleterre est passé de -7.2%
en Mai 2007 à + 179,4% en Octobre 2008, pour retomber à 157,6%
en Novembre et 129% en Janvier dernier.
Pour
la BCE, le rythme annuel de croissance est passé de 7% en Juillet 2007
à 45.5% en Décembre dernier et 56.5% en Janvier 2009.
Enfin,
pour la Banque du Japon, le taux est passé de -0.8% en Aout de
l’année dernière à 10.3% en Décembre et
5.7% en Janvier dernier.
Ce
qui permet de faire réellement croître une économie est
une amélioration dans l’infrastructure capitalistique du
processus de production. L’épargne réelle est ce qui rend
cette amélioration possible. C’est l’épargne
réelle qui finance l’amélioration de l’infrastructure
via les équipements et machines outils, c'est-à-dire les biens
de production. Avec de meilleurs
équipements et de meilleurs outils, on peut produire une plus grande
quantité de produits et de services, de surcroit de meilleure
qualité.
Dans
un marché libre et non perturbé par des interventions,
l’infrastructure en capital est cohérente avec les
différentes activités économiques. Ceci signifie que le
flux de l’épargne réelle est suffisant pour financer les
différentes lignes de production sans goulets d’étranglement.
Paraphrasant
Ludwig Lachmann, Murray Rothbard
écrivit ceci sur ce sujet : « le capital est une structure
délicate et finement tissée de biens de production. Tous les
éléments de cette structure doivent être ajustés,
-et parfaitement ajustés-, sauf à réaliser des investissement inutiles. Un marché libre est un système
presque automatique pour ajuster tous ces éléments (..). Grace
aux critères de pertes et de profits il ajuste les quantités
à produire avec tous les niveaux intermédiaires de production,
en empêchant l’un quelconque des facteurs de production de ne
plus être aligné avec les autres ».
Le
résultat de la baisse artificielle des taux
d’intérêts et d’injection de quantités
massives de monnaie est l’émergence d’une demande
additionnelle pour différents biens et services. Cette demande artificielle est une
tentative de développement de l’infrastructure.
Cette
tentative ne peut qu’échouer parce que le flux
d’épargne réel n’est pas assez important pour
supporter l’expansion de la structure de capital. En
conséquence, la tentative d’accroître l’infrastructure
aboutit en fait à détourner les vrais
financement des activités qui rendent le flux
d’épargne
réels actuels possible. En conséquence, le flux
d’épargne réel est mis sous pression et tend à
baisser, et le niveau de
croissance réel de l’économie suit le même chemin.
Une
baisse artificielle des taux d’intérêts ou
l’impression de billets par la banque centrale n’ont aucune
utilité dans la production de biens de capital ou de biens et de
services qui sont essentiels pour promouvoir et maintenir la vie humaine et
la prospérité.
Bien
au contraire, la baisse artificielle des taux d’intérêts
et la pompe à finances ne donnent lieu qu’au
développement de fausses activités en détournant le flux
d’épargne réel vers ces activités. Et plus
émergent de fausses activités du fait de la baisse des taux
d’intérêts et de la pompe à finances, moins
l’épargne réelle sera disponible pour le financement
d’activités destinées à produire de la vraie
richesse.
Le
fait que les conditions économiques continuent de se dégrader
malgré la baisse agressive des taux d’intérêts et
les vastes émissions de masse monétaire par les banques
centrales augmente la probabilité que le flux d’épargne
réel soit en danger.
Notez
à nouveau que la création monétaire et la baisse des
taux d’intérêts ne peuvent pas remplacer une
épargne inexistante. Sans épargne réelle nouvelle, il
est impossible d’entreprendre de nouveaux projets sans affaiblir la
structure de production actuelle.
La
monnaie n’est qu’un moyen d’échange. Sa fonction est
de permettre l’échange des produits d’un
spécialiste contre ceux d’un autre spécialiste. Plus d’argent ne peut pas
générer plus d’épargne ou une croissance
économique réelle.
Bien
au contraire, l’augmentation prévisible des interventions
monétaires par les banques centrales ne pourra que réduire le
flux d’épargne réelle et affaiblir les chances
d’une reprise économique solide.
Frank
Shostak
Frank Shostak est directeur des recherches
économiques chez M.F. Global.
Notes :
[1] Murray
N. Rothbard, Man, Economy, and State with Power
and Market (Auburn, Ala.:
Mises Institute, 2004), p. 967.
Frank Shostak est contributeur à 24hGold.com. Les vues présentées sont les
siennes et peuvent évoluer sans qu’il soit nécessaire de
faire une mise à jour.
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