Je ne suis pas convaincu
que l’opinion du monde finira un jour par « comprendre le sens »
des attaques qui ont frappé Paris. Le non-linéaire est roi. La guerre de
quatrième génération, comme on l’appelle, se développe aujourd’hui parce que
des armes sont disponibles partout dans le monde, et qu’une bande de
maniaques armés de mitrailleuses et de deux kilos d’explosifs plastiques
Semtex peuvent transformer n’importe quelle zone en un champ de bataille.
Pour ce qui est des
militaires français, la réponse immédiate a été le bombardement de la place
forte d’ISIS à Raqqa. Mais n’est-ce pas là ce à quoi s’adonnent les troupes
américaines et russes depuis un certain temps déjà ? Soit le bastion a
déjà été bombardé et transformé en une pile de graviers, soit nos capacités
en termes de conflit aérien ne sont pas ce qu’on voudrait nous faire croire –
et nous avons toutes les raisons de penser cela, au vu des dix dernières
années de bombardements anti-djihadistes en Afghanistan et en Lybie qui n’ont
laissé derrière elles rien de plus qu’une crise de réfugiés.
Une chose semble
certaine : des gouvernements radicaux monteront au pouvoir. Politiquement,
l’Occident a des problèmes de frontières qui vont bien au-delà de la question
des frontières nationales et jusqu’au cœur de la psychologie du libéralisme
moderne. Quand en aurons-nous enfin eu assez ? D’un autre côté, sommes-nous
prêts à faire quoi que ce soit ? Les sociétés occidentales optent
aujourd’hui pour en faire peu et trop lentement.
De nos jours, le
comportement des directeurs d’universités et de facultés aux Etats-Unis est
emblématique de ces lâches hésitations. Le despotisme intellectuel règne sur
les campus, et les doyens d’universités se comportent à la manière d’opossums.
Ils n’ont pas la force morale de défendre la liberté de parole et laissent
les chasses aux sorcières se multiplier. Le résultat en sera la mort
intellectuelle (cérébrale) de leurs institutions, et enfin la mort des
hautes-études en tant que moyen de développement socioéconomique individuel.
Le racket financier qui a infecté l’éducation – la fraude gargantuesque des
prêts étudiants ainsi que la multiplication des décanats et l’inflation des
frais d’inscription – garantissent une implosion du système.
La couardise des
établissements est similaire à celles de notre politique nationale. Personne n’est
prêt à prendre la parole et à se dresser contre le poids-lourd de l’escroquerie
qu’est Hillary ou encore contre Donald Trump, qui clairement est mentalement
inapte à gouverner. Au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, plus rien ne
tient ensemble. La longue urgence commence à se transformer en quelque chose
qui ressemblera bientôt à une guerre civile. Les Maoïstes des campus veulent
eux-aussi voir éclater des conflits raciaux.
Tant de forces s’opposent
aujourd’hui que la situation devient critique. L’Union européenne pourrait ne
pas survivre au rétablissement des frontières, puisqu’elle a beaucoup
travaillé à leur élimination. L’Espagne et le Portugal sont sur le point de
tomber à genoux politiquement. Le bain de sang dont a souffert Paris a
discrédité l’appel à la « tolérance » de Merkel – la tolérance de
ce qui se prouve être une invasion intolérable. La seule figure politique qui
ne semble pas déblatérer d’absurdités est Vlad Poutine, qui a correctement
suggéré devant les Nations-Unies que compromettre les institutions du monde n’est
pas une bonne idée.
Rien de tout cela n’est
bon pour une économie globale construite sur des chaines d’obligations
complexes et fragiles, les plus critiques étant celles de la finance et de l’énergie.
Vous pensez que les attaques qui ont frappé Paris en son cœur sont assez
graves comme ça ? Attendez que des maniaques plantent des explosifs dans
la raffinerie géante de Ras Tanura et dans les terminaux de livraison de la
côte saoudienne sur le Golfe Persique. Imaginez ce qui se passera au milieu
de l’hiver, quand l’Europe sera couverte de gel. Pensez-vous que les gros
cerveaux du Pentagone y aient réfléchi ? L’Occident est un cirque de
cibles faciles. Les plus faciles étant celles situées entre nos deux
oreilles.