La
question que se posent le plus fréquemment les théoriciens du
marché haussier est de savoir à quel prix vendre. Ce
questionnement prouve un manque de connaissances quant à la raison
même pour laquelle acheter de l’or. Néanmoins, la
réponse la plus simple devrait être ‘Lorsque la monnaie
papier cessera de perdre de la valeur’. Cette réponse devrait
ouvrir les yeux à tous ceux s’étant un jour posé
cette question sur le fait que, si investir sur une monnaie fiduciaire
revient à spéculer, ce n’est pas le cas pour ce qui est
d’investir sur les métaux précieux.
Voilà
qui résume toute l’étendue du problème. La plupart
des gens aperçoivent la monnaie papier comme étant
l’unique moyen d’échange ou réserve de valeur, dans
la mesure où, après tout, la monnaie fiduciaire est leur
unité de compte de référence. Ils voient le prix de l’or
grimper plutôt que de voir la valeur de leur monnaie fiduciaire
s’effondrer. Parce que la monnaie papier est l’unité de
compte utilisée par tout un chacun, elle est souvent aperçue
à tort comme étant l’actif financier ultime. C’est
également là l’approche qu’ont les gestionnaires
d’actifs par rapport à l’investissement : leurs
retours sur investissement se calculent en termes de papier monnaie. Ces
gestionnaires d’actifs apprennent souvent à étendre leur
risque d’investissement sur plusieurs actifs de classe
inférieure afin d’augmenter leurs profits. Ainsi, les gestionnaires
d’actifs s’imaginent que les métaux précieux sont
une classe inférieure d’actifs. L’ensemble du
système moderne de gestion d’investissement fonctionne de cette
manière.
Cela explique
pourquoi les portefeuilles d’aujourd’hui ne sont que très
peu exposés aux métaux précieux, bien qu’il existe
d’autres raisons à cela. Les fonds d’investissement se
sont rapidement accrus depuis les années 1970 sur le dos de la monnaie
et de l’expansion du crédit. Cette expansion monétaire a
alimenté à la fois de nouveaux fonds d’investissement et
les prix des actifs, dans le même temps que l’or et autres
investissements du même type devenaient démodés tout au
long d’un marché baissier ayant duré de 1980 à 2000.
La combinaison de ces deux facteurs a placé l’exposition des portefeuilles
d’investissement sur les métaux précieux à des
niveaux extrêmement bas. L’or n’était plus
considéré comme étant une classe d’actifs
lorsqu’en 1990, la théorie du portefeuille
d’investissement évoluait. La génération actuelle
de gestionnaires d’actifs ne le considère tout simplement pas.
En
conséquence, des gestionnaires de fonds de tous types investissent sur
le marché des obligations, la bourse, les actifs fonciers, les devises
étrangères et en moindre mesure sur les matières
premières. De temps en temps, ils spéculent sur les
métaux précieux, mais seuls quelques gestionnaires
d’actifs comprennent réellement que l’or est la protection
ultime contre la dévaluation des monnaies. Après tout, si vous
prenez comme référence la monnaie papier, alors cette
dernière doit être considérée comme étant
votre position ‘non-risquée’. Le fait que la monnaie
fiduciaire ne soit pas sans risque est quelque chose que les individus
n’étant pas trompés par la gestion moderne de
portefeuille d’investissement sont bien plus en mesure de comprendre.
L’accumulation
globale de lingots et pièces d’or et d’argent s’est
accrue à un rythme accéléré au cours de ces
trente dernières années. Ce phénomène a compromis
les banques centrales, ces dernières ayant été largement
actives dans le processus de suppression du prix des métaux
précieux. Le résultat est que d’importantes quantités
d’or et d’argent sont passés d’entre les mains des
banques centrales et des gouvernements jusqu’à celles des
investisseurs privés. Rien de tout cela n’est clairement
observable dans les statistiques, en partie parce que les banques centrales
impliquées refusent de délivrer quelque information
précise que ce soit au sujet de leurs ventes, swaps et prêts, et
en partie parce que les individus investissant sur les métaux
précieux opèrent en secret, au-delà des
possibilités du domaine statistique.
La raison pour
laquelle ces individus investissent sur les métaux précieux est
l’hypothèse de base de cet article : ils se débarrasseront
de leur or lorsque la monnaie cessera de perdre de sa valeur. Nous devrions
ainsi considérer l’étendue de cette perte de valeur. En
1973 étaient disponibles 1120 dollars de demandes de
dépôts plus devise papier pour chaque once d’or
détenue par le gouvernement des Etats-Unis[i].
Aujourd’hui, si l’on inclue les excès de réserves
détenus à la Fed ainsi que les 600 milliards de dollars devant
être imprimés au cours de ces sept prochains mois, alors nous en
sommes à 26512 dollars [ii]. En
1973, il existait douze fois plus de dollars que d’onces d’or au
prix marché, contre plus de 20 fois aujourd’hui. Les dollars
papier sont donc plus sous-évalués aujourd’hui en termes
d’or qu’ils ne l’étaient lorsque le prix d’une
once d’or était de 100 dollars.
La
quantité de monnaie papier continuera de croître dans le
même temps que le monde ne cessera de lutter contre les
problèmes qui le parasitent. Chaque jour, notre plus grosse peur de la
veille se matérialise. Les gouvernements, poussés par les
pressions sociales plutôt que par des objectifs économiques
impartiaux, forcent leur chemin vers la création monétaire,
alors que le plus gros problème qui les attend est
l’inévitabilité d’un effondrement général
du système bancaire.
C’est
cela même qui a poussé les grands pontes de l’Europe
à s’effrayer de la situation Irlandaise. La BRI ne cesse de
clamer que le poids de la dette Irlandaise pour les investisseurs
privés s’élève à 791 milliards de dollars,
dont une grande partie provient du secteur bancaire. L’Irlande à
elle seule ne fera peut-être pas s’effondrer les banques
Européennes, mais l’effet domino entraîné par la
contagion de ce problème y parviendra.
Une telle
situation n’est bien entendu pas tolérable. Oubliez les banques
que l’on a surnommées ‘too big to fail’. Les
politiciens, et donc les banques centrales, n’ont d’autre choix
que d’intervenir. Mais que peuvent-ils bien faire ? Ils ne peuvent
pas financer de plan de sauvetage par le biais de taxes, et ils sont
déjà plus endettés que le marché des obligations
ne puisse le supporter. La seule option qui leur reste est de noyer le
système de monnaie papier. C’est simplement là le moyen
que les gouvernements utilisent pour gagner du temps.
Cette analyse
semble malheureusement sensée, bien que nous espérions tous que
je me trompe : elle s’est cependant prouvée juste tout au
long de ces derniers mois. L’intérêt grandissant envers
les métaux précieux est uniquement dû à
l’idée générale que l’impression
monétaire ne cessera pas, et accélèrera de plus en plus
afin de pouvoir racheter les dettes. Alors que les effets de
l’inflation monétaire sur l’inflation des prix ne sont que
rarement équivalents, nous savons, au regard des lois
économiques et de notre expérience historique, que ces
dernières sont toutes deux liées par des éléments
de cause à effet. Nous pouvons donc dire que la monnaie papier
continuera de perdre de sa valeur, du moins dans le futur proche.
Mais
l’inflation accélérée des prix n’affecte pas
uniquement la monnaie en tant qu’actif. Les obligations,
communément le composant principal de tout portefeuille
d’investissement conventionnel, perdront de leur valeur plus rapidement
encore que la monnaie. Les actions auront la chance de pouvoir
s’accorder à la valeur de la monnaie dans le même temps
que les rendements sur obligation tomberont dans la récession. Les
marchés immobiliers seront frappés par cette augmentation des
rendements sur obligation, et les loyers augmenteront de façon
à accentuer encore plus les effets de l’inflation. Seules les
matières premières, qui sont considérées comme
des actifs de classe inférieure par la plupart des portefeuilles
d’investissement, seront plus performantes que la monnaie.
L’Histoire confirme également que l’or et l’argent
sont les meilleurs investissements en temps d’inflation [iii].
En pleine
crise financière, ceux qui ont délégué la gestion
de leurs investissements à des gestionnaires d’actifs se sont
uniquement acheté l’illusion d’une sécurité
financière. Ils sont entièrement exposés à des
actifs dépendants de la monnaie elle-même, dans la mesure
où ils possèdent des quantités négligeables
d’or. Systématiquement, cela signifie que les portefeuilles
d’investissement sont devenus dépendants de la stabilité
financière.
Cela fait de
l’or et de l’argent, qui ne sont en rien de la monnaie papier,
une classe d’investissement sans risque. La monnaie papier peut bien
être le moyen d’échange et l’unité de compte
la plus répandue, l’or et l’argent demeureront des valeurs
refuge en temps de troubles, et ce peu importe leurs prix respectifs.
Si quelqu’un vous demande quand
vous vous déciderez à vendre votre or ou votre argent,
souriez-leur gentiment et dites-leur ‘Lorsque la monnaie papier cessera
de perdre de sa valeur’.
[i] Voir
“Gold backing for 26 major currencies” (page 216 du livre “You can profit from a monetary
crisis”, écrit par Harry Browne et publié par Macmillan en 1974).
[ii] Les quantités de dollars
aujourd’hui disponibles s’élèvent à 6934
trillions de dollars. La Fed détient 8133,5 tonnes.
[iii] Voir l’expérience
Allemande de 1918 à 1923.
Alasdair McLeod
|