La
peur de la déflation est devenue la pierre angulaire de la pensée économique
keynésienne. Le manque d’inflation a été utilisée pour expliquer les périodes
de faiblesse économique survenues depuis la Grande dépression des années 1930
jusqu’à la Grande récession de 2008-09. Aujourd’hui, cette philosophie a été
adoptée comme gospel par ceux qui contrôlent la Réserve fédérale et toutes
les banques centrales de la planète.
La
déflation est en réalité cathartique, elle est une condition nécessaire au
rétablissement de l’économie. Si on lui permettait de suivre naturellement
son cours, comme ça a été le cas pendant la brève dépression des années
1920-21, nos dépressions seraient brutales mais de courte durée. L’économie
se rétablirait rapidement. En revanche, les Keynésiens perçoivent la
déflation comme étant la source de cycles destructeurs durant lesquels les
prix des actifs plongent, les sociétés licencient, les dépenses s’effondrent
et une récession permanente s’installe. Ainsi, l’opinion actuelle perçoit la
déflation comme une menace immédiate qui requiert un stimulus monétaire
d’importance – disons que la déflation est sa grande
phobie.
C’est
pourquoi je trouve fascinant que les Keynésiens, qui prolifèrent au sein des
banques centrales et parmi les médias financiers, applaudissent la récente
recrudescence des données de la déflation. La déflation n’a pas été limitée
aux Patriots de Nouvelle-Angleterre – elle est
visible partout.
Il
est toutefois hypocrite de la part des Keynésiens d’utiliser le spectre de la
déflation pour nous terroriser et nous laisser penser que nous devrions
diluer la valeur de nos devises et porter le taux d’intérêt de notre épargne
à zéro pourcent. Mais dans le même temps, tout ce qui laisse supposer une
baisse des prix est perçue comme une autre raison d’être haussier sur les
marchés et l’économie. Leur mantra est la suivante : baisse des prix des
marchandises – un avantage pour les consommateurs, avec la baisse des taux
d’intérêt – et une hausse des refinancements de prêts immobiliers. J’ai
entendu un observateur suggérer que la baisse du prix du cuivre était une
bénédiction pour l’impression de centimes – il ne savait pas que ces pièces
ont été principalement composées de zinc depuis 1983.
Comment
les Keynésiens peuvent-ils célébrer la déflation, tout en nous poussant à
accepter des taux d’intérêt proches de zéro à l’infini ? La réponse la
plus simple pourrait être qu’ils soutiennent le marché des actions… ce que je
pense. Mais une autre raison pourrait être que ces individus se sont
eux-mêmes convaincus qu’un groupe de douze intellectuels pourrait arriver à
une meilleure conclusion que le marché libre. Aussi amoureux qu’ils puissent
être de la sagesse collective des hommes et femmes qui peuplent la Réserve
fédérale, ils ne peuvent pas s’imaginer qu’il puisse y avoir des conséquences
négatives à leurs actions. Parce qu’il a pu sembler que la Fed pouvait mettre
fin à ses programmes de QE, leur confiance aveugle en la micro-gestion des
marchés est garantie.
Les
Keynésiens sont incapables de considérer le fait que l’emprunt et la création
de monnaie a été un échec en termes de mise en place d’une croissance
soutenable et vibrante.
Malheureusement,
nous faisons aujourd’hui l’expérience de la douleur associée à l’idée que les
banques centrales puissent oblitérer la découverte des prix des actions, des
obligations, des marchandises et des devises par le marché libre pendant sept
ans, et en toute impunité. Plus important encore, il y a un danger inhérent à
la prise de décisions d’investissement en fonction des pulsions d’une poignée
d’individus, plutôt qu’en fonction des marchés et des lois fondamentales.
Par
exemple, Mario Draghi fait de son mieux pour imiter
la Fed et la Banque du Japon, et a récemment promis d’acheter 1,1 trillion
d’euros de dette publique et privée au cours de l’année et demi à venir.
En
revanche, comme aux Etats-Unis et au Japon, les Européens finiront par
découvrir que la dette ne fait rien pour générer la croissance, mais détruit
le pouvoir d’achat de la classe moyenne.
La
décision de la BCE de monétiser la dette souveraine européenne ne fera rien
pour venir en aide à l’économie, et pour alimenter l’inflation. Les
rendements des obligations souveraines sont déjà proches de zéro pourcent,
parfois même négatifs. Une fois que la BCE commencera à acheter de la dette
aux banques privées, elles seront assises sur une grande partie de ce nouveau
crédit de banque centrale. Pourquoi les banques privées achèteraient-elles
des obligations gouvernementales qui n’offrent aucun intérêt et présente un
risque à la baisse ? Et pourquoi prendre le risque d’accorder de
nouveaux prêts à des emprunteurs non-qualifiés lorsque les taux d’intérêt qu’elles
imposent sont de zéro pourcent ?
Les
banques privées qui ont déjà pratiqué le front running sur les enchères de la
BCE pourraient se débarrasser de leurs positions grâce à Draghi
et s’asseoir sur cet argent. L’idée de pouvoir sauver l’économie européenne
face aux effets de la déflation sera marquée dans les annales de l’Histoire
comme un autre échec des banques centrales à manipuler les marchés.
Les
banquiers centraux ont tendance à être des ploutocrates hypocrites et
incompétents. Les investisseurs devraient placer leur confiance entre les
mains des marchés, où se trouve la vraie monnaie, plutôt qu’entre les mains
des devises fiduciaires et des fausses promesses. Bien entendu, cette
confiance nous mènera vers le plus grand choc de tous… l’effondrement des
devises papier et de la dette souveraine insolvable garantie par les banques
centrales.