L’or est aujourd’hui
plus que jamais détesté par les gouvernements et la communauté des services
financiers. La raison en est qu’il est devenu impératif de maintenir l’illusion
de confiance en la dette souveraine et les devises papier. C’est pour cette
raison qu’un homme du nom de Willem Buiter, économiste en chef chez
Citigroup, a fait son apparition sous les projecteurs des médias avec sa note
écrite la veille de Thanksgiving selon laquelle l’or serait dans une bulle
depuis maintenant six mille ans.
Buiter a rédigé ce
commentaire brillant juste avant que soit tenu le référendum de la Suisse sur
l’or, qui avait pour objectif d’accroître le pourcentage de réserves d’or
détenu par la banque centrale du pays. Dans une tentative évidente d’influencer
l’issue de ce vote, Buiter a décrété le 26 novembre que « le vote suisse
est ridicule, et qu’aucune banque centrale digne de ce nom ne devrait placer
un tel pourcentage de ses réserves sur une seule marchandise ».
Cette haine pour l’or
émane de son idée que l’or n’a pas de valeur intrinsèque. Mais comment un
individu peut-il penser pouvoir abolir des millénaires d’expériences et de
savoir humains qui ont su prouver que l’or n’est autre que la valeur de
réserve idéale ?
Buiter s’est exclamé que
« l’or est devenu une marchandise fiduciaire, ou une monnaie marchandise
fiduciaire, au même titre que le dollar, l’euro ou le yen. Les différences
principales entre ces devises fiduciaires est que le coût de production de l’or
est très élevé, alors que le coût de production de la monnaie papier est très
faible ». Nous avons donc là Wall Street et la communauté bancaire, qui essaient
de nous dire que l’or n’est en rien différent des devises fiduciaires.
Puisque son travail
prouve clairement qu’il est conscient de la définition du mot fiduciaire, la
seule conclusion que nous puissions en tirer est que Buiter se montre ici
particulièrement hypocrite. Le mot fiduciaire signifie par décret ou édit –
du latin « chose faite ». En référence aux devises, ce terme
signifie que les gouvernements et les banques peuvent créer de la monnaie à
moindre coût et selon leur bon vouloir. L’or est le parfait opposé d’une
devise fiduciaire. Buiter l’admet lui-même dans son même article en stipulant
que le coût de production de l’or est élevé.
La conscience humaine
collective a des milliers d’années durant considéré l’or comme ayant une
valeur intrinsèque parce qu’il est portable, divisible, joli, extrêmement
rare et virtuellement indestructible. Combien d’autres choses sur cette Terre
peuvent en dire autant ? La réponse est bien évidemment aucune, à l’exception
des métaux précieux. Les devises fiduciaires ne font pas le poids en matière
d’indestructibilité. C’est de là que l’or tire sa valeur intrinsèque, et c’est
cela même qui le rend si différent des devises fiduciaires.
Dans un avenir proche, l’économiste
en chef de Citi devrait se trouver embarrassé par ses propres remarques, notamment
par sa comparaison de l’or à des pierres fétiches. Il pense également que,
puisqu’il n’est qu’une autre devise fiduciaire, l’or peut voir sa valeur tomber
jusqu’à zéro de la même manière que n’importe quelle monnaie papier.
Mais contrairement à ce
que pense cet homme, la valeur de l’or est sur le point de grimper justement
parce que les banques centrales et les gouvernements se retrouvent pris au
piège. Ces manipulateurs de marchés ont besoin de maintenir gonflées les
bulles sur les actifs afin de maintenir en place l’effet de richesse et
supporter la croissance économique anémique qu’ils sont parvenus à mettre en
place. Plus important encore, ils ont besoin de maintenir la dette souveraine
hors des mains du public afin que le remboursement de la dette puisse
demeurer peu coûteux. Cela signifie que les gouvernements n’ont d’autre
solution que leurs campagnes d’impression monétaire sans précédent. Ainsi, la
valeur des devises fiduciaires est condamnée à s’effondrer par rapport aux
métaux précieux.
Ces ennemis de l’or
devraient se montrer de plus en plus désespérés dans leurs tentatives de
maintenir la confiance en la dette émise par le gouvernement et les devises
fiduciaires, puisque les bulles sur les actifs ont atteint des proportions
vertigineuses et que les niveaux de dette ont atteint de nouveaux records.
L’inflation est devenue
l’objectif de toutes les banques centrales du monde. Voilà qui rend
inévitable une réversion des taux d’intérêt, qui nous mènera à une crise
globale de la dette. Pour illustrer ce point, sachez que la dette nationale
des Etats-Unis a dépassé cette semaine les 18 trillions de dollars !
Cette somme représenterait plus d’un trillion de dollars par an de
remboursement d’intérêts si le Trésor était forcé de payer un taux d’intérêt
correct sur sa dette. Le chaos économique et l’inflation viendront ensuite,
qui devraient faire fuir en masse les investisseurs américains.
Buiter conclut son
commentaire en stipulant que l’or « a eu une valeur positive pendant
plus de six mille ans. Voilà qui en fait la plus grosse bulle de l’histoire
humaine ». Mais l’Histoire nous a prouvé que les bulles, les vraies, se
sont manifestées sur la dette et les devises émises par les gouvernements,
jamais sur l’or. Puisque le taux d’accumulation de dette et de création
monétaire est exponentiellement plus élevé qu’il ne l’a jamais été, je peux
vous assurer que la « bulle » sur l’or ne fait tout juste que
commencer.