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En 2007, le
marché européen de l’électricité a
été « totalement » ouvert
à la concurrence. Il l’était déjà
pour les entreprises, il l’est désormais également pour
les particuliers. Il était temps de le faire, tant ce projet
était en germe au sein des instances communautaires depuis
déjà de longues années. Une directive de 1996
avait posé les premières pierres de cette libéralisation
qui a tardé à se concrétiser. Il faut dire que
l’ambiance intellectuelle en France, couplée à une
résistance forte au sein d’EDF, n’ont pas aidé
à passer ce cap nécessaire.
Le Monde diplomatique,
brûlot de l’antilibéralisme, a récemment encore
rappelé le fait que les prix de l’électricité ont
augmenté entre 2001 et 2006 dans des pays qui avaient
libéralisé ce secteur, tels que la Suède.
Notons, tout d’abord,
que ce n’est pas parce que les prix augmentent que la
libéralisation est nécessairement un échec. Il
conviendra d’être un peu plus rigoureux que ne l’est Le Monde diplomatique en analysant
cette hausse des prix en Suède. Dans ce pays, il a été
décidé, depuis déjà 1997, de mettre fin
progressivement à la production d’énergie
nucléaire. Ladite production n’a pas encore été
stoppée mais la Suède est un bien moindre producteur que ne
l’est la France, par exemple. Or, comme l’a rappelé
François Pouzeratte, associé d’Eurogroup, c’est, en très grande partie, la
forte production d’énergie nucléaire en France qui
expliquait, jusqu’à maintenant, une hausse annuelle
« modérée » des prix de l’électricité.
De quoi faire réfléchir un peu ceux
qui souhaitent l’arrêt immédiat de cette production,
même si le renouvellement du parc nucléaire risque, en effet, de
coûter assez cher.
Ensuite, l’auteur
de l’article du Monde diplomatique,
Tristan Coloma, oublie un point fondamental :
le poids des taxes qui pèsent lourdement
sur la facture d’électricité (à hauteur de 30%)
et, donc, sur le pouvoir d’achat des consommateurs puisque ce sont eux
qui payent plusieurs d’entre elles, comme la contribution
au service public de l’électricité introduite en
janvier 2003.
En outre,
malheureusement, les ouvertures à la concurrence en France sont
toujours très conditionnelles au point de nous faire parfois presque
regretter l’ancien système. Comme dans le domaine ferroviaire,
les opérateurs privés doivent passer par un réseau qui
demeure public pour vendre leur électricité aux consommateurs,
faussant quelque peu la concurrence.
À cet
effet, une autorité administrative
« indépendante » a été
créée pour scruter et administrer cette libéralisation
partielle : la Commission de régulation de l’énergie.
Ladite Commission reconnaît elle-même qu’on est en
présence d’une « fausse » concurrence
puisqu’il existe, en réalité, deux marchés :
le marché régulé (EDF est concernée) et le
marché dérégulé qui compte huit entreprises
(Direct Énergie, Enercoop,etc).
Qui plus est, une loi, la loi NOME, oblige EDF à vendre un quart de sa
production d’énergie nucléaire à ses concurrents à
« prix coûtant » mais le tarif est, en
réalité, élevé, ce qui explique certaines
difficultés des nouveaux entrants. Mais ces difficultés doivent
être nuancées et mises en parallèle avec certains
avantages dont ils bénéficient et qui montrent bien à
quel point nous nous trouvons dans un secteur faussé par les multiples
interventions étatiques. En effet, plusieurs des concurrents
d’EDF tentent d’innover en proposant une énergie
« verte ». D’un point de vue commercial et
éthique, ce choix est difficilement contestable, tant il y a une
influence forte de certaines organisations internationales en faveur de la croissance
verte. Toutefois, le consommateur ne devrait pas oublier que
l’électricité photovoltaïque, pour ne citer
qu’elle,
est fortement subventionnée en France et explique le niveau assez
importante de la contribution au service public de
l’électricité précitée.
C’est
sans doute la raison pour laquelle les comparateurs de prix placent EDF en
« queue de peloton ». Mais, paradoxalement, ce sont les
« nouveaux entrants » qui semblent le plus
bénéficier des largesses de l’État qui,
fidèle à une conception de la concurrence périmée,
s’intéresse, avant toute chose, au nombre d’acteurs sur le
marché, fût-il artificiel, plutôt qu’à une
approche véritablement dynamique de la concurrence.
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