Excusez mon cynisme, mais le président arrogant et
astucieux de la Cour Suprême qu’est John Roberts
n’aurait-il pas récemment versé un peu d’huile de
maïs dans le moteur au réservoir de douze trillions de dollars
qu’est la dette des Etats-Unis ? Ou, pourrais-je dire (excusez une
fois encore la métaphore utilisée), aurait-il tout juste offert
à Obama juste assez de corde pour pouvoir se pendre ? Roberts a
très certainement conscience de ce qu’il fait : il rend
fous furieux des millions d’électeurs du tea
party, jeunes et/ou pauvres, en cette année d’élections
cruciales. La réforme Obamacare sera
à partir d’aujourd’hui définie comme étant
une nouvelle taxe imposée à ceux n’ayant pas les moyens
de se payer une assurance maladie – en d’autres termes, une
injustice grossière, gracieusement offerte par Mr. Obama.
Nous pourrions également la qualifier de pilule de
cyanure. Obama ne cesse de nous chanter que c’est là
l’élément clé de ses 2700 pages de projets de
réforme – élément allant à l’encontre
des intérêts de ceux qu’il était supposé
protéger. Oubliez toutes les gentillesses au sujet du commerce inter-Etat
et autres bavardages sans importance. Ce sur quoi j’aimerai me
concentrer ici est l’intervention machiavélique du
président de la Cour Suprême Roberts à l’aube des
élections présidentielles. Il aurait aussi bien pu marquer au
fer rouge les lettres T-A-X-E sur le front du président, les
retombées auraient été identiques.
Bien entendu, avec ou sans réforme, le
système médical des Etats-Unis demeure un système de
prise d’otages. Lorsque vous tombez malade, vous faites tout ce que
vous pouvez pour aller mieux, et le système le sait. Vous feriez
n’importe quoi pour rester en vie, même si cela finirait par vous
coûter la saisie de votre domicile ou l’arrêt de
scolarisation de vos enfants. Il est bien connu que la cause principale de
banqueroute personnelle aux Etats-Unis est l’impossibilité pour
ceux qui ont les moyens de s’offrir une assurance maladie de rembourser
leurs factures médicales. Lorsqu’une vie est en jeu et
qu’une intervention d’urgence est nécessitée, il
est mal vu que de demander au chirurgien quels sont ses tarifs. Ou
peut-être les gens ne veulent-ils simplement pas poser la question
parce que, quelque part, ils savent que la somme qu’on leur demandera
de payer ne sera de toutes façons pas en
phase avec la réalité du nombre d’heures
travaillées et du service rendu. Il en va de même pour les
services hospitaliers, qui n’ont rien à voir avec les tarifs
contre lesquels ils sont échangés. C’est du racket pur et
simple. Nous avons besoin d’une réforme réelle qui puisse
mettre un terme aux escroqueries systématiques des docteurs,
compagnies pharmaceutiques, hôpitaux et autres organismes de
santé. Le problème, c’est que le gouvernement ne veuille
pas réellement mettre fin à ces excès. Ce qu’il
veut, c’est que le public Américain paie les frais de son propre
racket.
Avant de perdre votre temps à
énumérer les nombreuses idioties et injustices
inhérentes aux services médicaux des Etats-Unis,
dîtes-vous que leur système tout entier finira par tomber en
ruine, et ce quelles que soient les décisions de la Cour Suprême
et la volonté d’Obama. Le système économique des
Etats-Unis est sur le point d’exploser. Leur système bancaire a
été maintenu sous l’assistance respiratoire qu’est
la fraude comptable depuis 2008. Leur racket artistique finira tôt ou
tard par prendre fin. Viendra un jour où cette abstraction que nous
appelons ‘monnaie’ se présentera à nous pour ce
qu’elle vaut vraiment, à moins qu’avant cela, plus
personne ne décide de lui accorder quelque importance. Sans un
système bancaire stable, aucune des escroqueries organisées du
système médical Américain ne pourra perdurer.
Le système médical des Etats-Unis finira,
comme tout le reste, par être organisé à une
échelle bien plus modeste et locale. Nous aurions beaucoup de chance
si nos experts médicaux parvenaient à réorganiser un
système médical et hospitalier de manière à ce
qu’il ressemble à quelque chose après que la bureaucratie
pernicieuse qu’est celle du racket aura été
éliminée. Les compagnies d’assurances finiront par
être enterrées dans le cimetière d’éléphants
des institutions ratées. Espérons seulement que les
médecins et leurs assistants se souviennent de se laver les
mains…
Quelques notes secondaires :
Toute personne cherchant à comprendre la condition
physique déplorable de la population des Etats-Unis n’a
qu’à se rendre dans n’importe quel supermarché et
constater l’étendue des rayons de produits sucrés que
l’on aime en ce pays confondre avec de la nourriture. Au passage, cette
matrice touche également à sa fin, bien que les
évènements ne se déroulent pas assez rapidement en ce
sens pour que nous puissions éviter une généralisation
des désordres métaboliques à l’ensemble de la
population. L’espérance de vie des Américains commencera
bientôt à diminuer, avant que leur diminution de salaire ne vienne
aggraver ce ralentissement. Même les médecins ne savent plus
rien de ce qu’est la nutrition, et ne font plus d’effort pour
tenter de combattre l’industrie mortelle qu’est celle de la
transformation des aliments. Ceci me pousse à soulever un
deuxième point :
La bureaucratisation et de la turbo-spécialisation
de la médecine n’ont fait que rendre les médecins plus
stupides et plus ineptes qu’ils ne l’étaient
déjà. Mon expérience personnelle en est l’exemple
parfait. Durant deux ans, j’ai souffert de nombreux symptômes
allant de sensations d’endormissement dans les mains
jusqu’à des fatigues à la limite du surnaturel. Mon
ancien généraliste n’a pas jugé nécessaire
d’en rechercher la cause, et est même allé
jusqu’à rejeter ma demande d’examen toxicologique.
J’ai donc dû devenir mon propre médecin. Pendant un
moment, j’ai cru que j’avais la maladie de Lyme,
maladie qui fait rage dans ma région. Je suis donc allé voir un
spécialiste de la maladie de Lyme qui
n’était pas pris en charge par mon assurance maladie (les
compagnies d’assurance ne reconnaissent pas ses traitements
‘agressifs’ et les jugent non-standard – la raison à
cela, c’est que l’établissement médical ne sait
absolument rien de la maladie de Lyme).
Bref, j'ai demandé au spécialiste de la
maladie de Lyme d'inclure un examen du taux de
cobalt dans mon système sanguin, dans la mesure où il y a des
chances que j’aie à l’époque pu souffrir
d’empoisonnement au cobalt. La raison pour laquelle je lui ai
demandé cela est que lors de mes recherches sur Google, je me suis
aperçu que de nombreuses personnes ayant eu une prothèse de
hanche métal-métal souffraient des mêmes symptômes
que moi. Et je suis moi-même, depuis 2003, un porteur de
prothèse de hanche métal-métal. Ces prothèses
avaient autrefois été introduites parce que les
orthopédistes voulaient pouvoir offrir aux patients les plus jeunes
des implants à la longévité accrue. C’est alors
que les mauvaises retombées technologiques sont venues botter les
fesses de tout le monde, y compris les miennes.
Les résultats de mon examen sanguin ont
prouvé que j’avais effectivement été victime
d’un empoisonnement au cobalt (alors que mes examens pour la maladie de
Lyme me sont tous parvenus comme étant
négatifs). Vous serez surpris de savoir que mon spécialiste a
tout de même voulu me soigner contre la maladie de Lyme…
Il a ignoré mes résultats sanguins et m’a prescrit une
ordonnance pour plus de 400 dollars d’antibiotiques. Il était
l’une de ces personnes dont le seul outil est le marteau, et aux yeux
desquelles tout ressemble à un clou. J’ai refusé sa
proposition de traitement et suis allé voir mon nouveau
généraliste pour lui demander de pratiquer un nouveau test
sanguin, cette fois-ci pour vérifier mes taux de cobalt et de chrome
(ma prothèse métal-métal est constituée
d’un alliage cobalt-chrome-titane). Les résultats me sont tous
deux parvenus positifs. Il semblerait que les frottements
répétitifs entre les deux disques de métal n’aient
cessé de répandre des ions métalliques dans mon
système ces quelques neuf dernières années.
Je suis donc allé rendre visite au chirurgien qui
m’avait à l’époque installé cette
prothèse. Il m’a prescrit une IRM et une analyse aux rayons X,
et m’est apparu comme étant assez inquiet. Il m’a ensuite
envoyé voir un autre chirurgien orthopédique
spécialisé dans le remplacement de mauvaises prothèses
de hanche – particulièrement le remplacement de prothèses
telles que la mienne, faisant aujourd’hui l’objet de l’un
des plus importants litiges médicaux de l’Histoire. Les
fabricants de ces prothèses sont actuellement poursuivis en justice.
J’ai bien une assurance maladie, mais je suis
persuadé que j’aurais tout de même plusieurs milliers de
dollars à débourser de ma poche avant que mes problèmes
de santé ne soient réglés. En attendant, il faudra que
je me contente d’être l’un de ces patients énervants
au possible qui posent des questions à la pelle pour s’assurer
qu’ils ne finiront pas handicapés, morts, ou en
déambulatoire. Je suppose que je peux me considérer chanceux
d’avoir mis le doigt sur l’origine de mes problèmes
à temps, et que je puisse encore subir une chirurgie
réparatrice. Une année ou deux plus tard, j’aurai
certainement commencé à ressembler à un artisan de
fonderie du XIXe siècle, à la voix rauque et au visage
violacé…
Il y a de fortes chances que je sois allongé sur
une table d’opération au moment où une nouvelle crise
financière fera son apparition, crise qui aura cette fois-ci une
magnitude si importante qu’elle aura des conséquences bien plus
lourdes que l’effondrement de Lehman Brothers en 2008. J’espère que mon
chirurgien et mon anesthésiste ne se mettront pas à courir tous
en même temps dans la salle d’opération et à passer
des coups de téléphone à leur responsable de fonds alors
que je serai couché là, inerte, tel une dinde de Noël.
Priez pour moi, je suis un otage du système.
Mon nouveau livre, Too Much Magic, qui est sorti aujourd’hui, traite
principalement des retombées technologiques telles que celle que
j’ai mentionné plus haut.
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