Tepco vient d’avancer la somme de
10.000 milliards de yen (soit 100 milliards d’euros), le double de
l’estimation initiale, pour couvrir le coût de la catastrophe de
Fukushima ; un montant qui doit également couvrir le coût des
compensations versées à un million et demi de victimes.
C’est via la réévaluation de cette estimation que des
mises en cause inévitables s’engagent du bout des lèvres
au Japon. Le scénario du démantèlement est-il tenable ?
Quelle va être l’étendue réelle des zones à
décontaminer afin de permettre le retour des évacués ?
Les questions ne sont pas encore explicitement formulées, mais le
terrain est préparé.
«
Nous devons discuter avec le gouvernement des besoins selon plusieurs
scénarios », a reconnu le nouveau président de Tepco, Kazuhiko Shimokobe, sans toutefois aller jusqu’à les
décrire. Parmi les raisons justifiant cette réévaluation
financière, il a cité le coût du retrait du combustible
fondu (les coriums) ainsi que du
démantèlement de la centrale, ou bien celui de la construction
de sites de stockage des détritus contaminés qui en
proviendront. L’avenir qui sera réservé aux deux
réacteurs épargnés de la centrale, ainsi qu’aux
quatre de sa sœur de Fukushima Daini,
n’est pas non plus sans incidences financières, qui devront
à leur tour être chiffrées.
Et
encore, il ne s’agit là que des coûts directs !
D’évidence, ils ne pourront pas être supportés par
l’entreprise, même nationalisée, ce qui impliquera le
soutien massif d’un État déjà surendetté.
Les coûts indirects ne sont pas chiffrables, impliquant la production
d’énergie de substitution et l’importation de gaz et de
pétrole pour faire tourner les centrales thermiques, dans le contexte
d’un plan très flou d’abandon progressif de l’électronucléaire.
Les effets sur l’industrie, le commerce et le tourisme sont
également incommensurables.
Tepco va créer un centre de
recherche afin de concevoir les technologies susceptibles de réaliser
un programme qui devra donc être revu, reposant sur des effets
d’annonce dépassés. Non seulement en raison de ses
implications financières, mais aussi de sa faisabilité. Les
travaux de décontamination déjà effectués dans
l’improvisation dans la région de Fukushima suggèrent
l’étendue des problèmes posés si l’on ne se
contente pas de solutions de fortune, qui au mieux déplacent les
problèmes et au pire pourraient les aggraver.
Les
deux chantiers du démantèlement et de la décontamination
des sols ne s’attaquent pas à la pollution radioactive de la
mer, alors que les mauvaises surprises se multiplient à propos de la
contamination de la ressource halieutique : il est découvert que les
poissons se déplacent ! Enfin, la contamination des sous-sols de la
centrale et des nappes phréatiques est encore loin d’avoir
levé tous ses mystères.
L’équation
économique de l’électronucléaire prend une toute
autre tournure quand arrive le moment où est présentée
l’addition de ses faux-frais. La création de pools
d’assureurs et de réassureurs ne suffisant pas, étant
donné l’ampleur du risque à couvrir, un dispositif a en
Europe été prévu par la Convention de Paris qui attend
sa ratification : les États prendront le relais financier une fois les
plafonds d’indemnisation prévus atteints, un troisième
étage reposant enfin sur la solidarité des pays
adhérents à la Convention de Bruxelles.
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FUKUSHIMA,
LA FATALITÉ NUCLÉAIRE vient de paraître aux
éditions « Osez la République sociale ! »
[148 pages - 11 euros.]
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