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« Je pense que ce que nous pouvons attendre est une
baisse du taux [d’intérêt] par la BCE [Banque centrale
européenne] », confiait mercredi matin à Bloomberg
TV Joachim Fels,
l’économiste en chef de Morgan Stanley. « Je pense
qu’ils vont le baisser bientôt, dès la réunion de
juin… »
« Mais malheureusement, une baisse du taux seule ne fera pas
l’affaire. »
L’affaire, bien sûr, c’est de maintenir la zone euro en
place en détruisant l’euro. Ou, au moins, de décimer sa
valeur. On pourrait s’attendre à ce que cela stimule le cours de
l’or, et de tout le reste. Mais peu de choses ont du sens en finance,
en ce moment.
« La chemin le moins perturbateur que pourrait emprunter
l’Europe serait de baisser agressivement la valeur de
l’euro », affirme au Financial Times Jeremy Siegel,
un académique spécialisé dans la finance.
« Si la dévaluation est un code pour dire
l’augmentation de l’objectif de l’inflation,
d’accord », affirme Paul Krugman, professeur
à l’université de Princeton. Nos amis à la
Standard Bank viennent de revoir à la baisse leurs prévisions
pour la fin 2012 concernant l’euro de 1,20 dollar à 1.15 dollar.
Mais même avec un assouplissement quantitatif III,
le retour, l’euro chutera probablement.
Comment ça ? Maintenant à un peu moins de 7%
en dessous de son niveau le plus haut de février, l’euro est
devenu un actif très toxique et très bizarre, pervertissant
tout sauf lui-même. Car quand ils ont eu les taux
d’intérêt allemands et un marché mondial pour la
dette de leur gouvernement, la moitié de ses membres souverains sont
devenus fous, dépensant et empruntant. Mais l’Allemagne
elle-même a continué un dur et ennuyeux travail, un contrôle
des salaires, et une domination du monde dans les domaines des
équipements de haute-précision et de l’ingénierie.
Le déséquilibre interne semble demander un transfert fiscal
(des épargnes allemandes pour payer les factures du Club Med).
Au cours du sommet « informel » de ce soir, cependant,
comme lors de tous les sommets jusqu’ici, la chancelière Merkel
sera censée dire « nein ! » un nouvelle
fois. Pourquoi les allemands voudraient se joindre aux problèmes
d’obligations de la zone euro ? Le pays a déjà fait
présent de son indice de solvabilité à la dette
méditerranéenne, et voyez où cela nous a mené. De
plus, Merkel peut après tout emprunter de l’argent avec des taux
de 0%, ou proche, bon sang. Pourquoi le reste de l’Europe ne comprend
pas ce modèle économique ?
La nouvelle impasse de cette semaine enverra surement l’euro au plus
bas à nouveau. Ah, si seulement l’Allemagne n’était
pas la plus grande économie de la zone euro. Au lieu de cela, des
fissures se propagent dans tout ce qui n’est pas le dollar (ou la dette
souveraine « refuge »). Ce qui inclue, bizarrement,
l’ultime protection contre la dévaluation ou la
défaillance qu’est l’or physique.
Les gestionnaires occidentaux de portefeuilles détiennent
maintenant plus de liquidités que jamais depuis le record de huit ans
en janvier, d’après Reuters. La géante ETF or SPDR de New
York à 64 milliards de dollars s’est débarrassée
de 17,5 tonnes mardi, le plus grand débarras sur un jour depuis
août. La roupie indienne a atteint de nouveaux niveaux bas record
contre les dollars, empirant les perspectives pour les acheteurs d’or
numéro un mondiaux. Les primes de Hong Kong sur le cours spot de
Londres restent fermement aux environs de 1 à 1,50 dollars
l’once, mais le volume d’échange baisse à Shanghai.
Dans une déflation de crédit (c’est bien ce dont il
s’agit ici) et après avoir été tenu à flot
par la poussé de la liquidité mondiale ces dix dernières
années, on s’attendait à ce que l’or et l’argent se heurtent à une turbulence au moins.
Et cela même avant que prendre en compte la reprise soudaine du dollar
américain, avec Apple, Facebook et le gaz de schiste. Si on peut
appeler cela une reprise.
Sur son indice pondéré des échanges, le
dollar a seulement récupéré son niveau de 18 mois, et a
eu peine à ébranler sa chute de 35% au cours de la
dernière décennie. Imaginez seulement quels problèmes il
a en réserve pour nous (les exportateurs et consommateurs
américains, ainsi que les investisseurs et les débiteurs du
monde entier) si ce truc commence vraiment à pousser vers des niveaux
plus élevés.
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