L’hypercriticisme, en tant que méthode
argumentative, est l’une des plus grandes insultes à
l’histoire. Les historiens français, Charles-Victor Langlois et
Charles Seignobos vont jusqu’à estimer qu’une telle
méthode aboutit à des méprises.
Le but recherché est généralement de
« massacrer » une thèse bien établie, via
des détails douteux, comme le fait d’assimiler des textes
historiques authentiques à des faux. Ceux qui s’adonnent
à l’hypercriticisme effectuent, en
quelque sorte, une ultime mission « commando » pour
dénigrer une vérité historique de plus en plus
affirmée.
L’histoire
n’est malheureusement pas une science exacte : il sera toujours
aisé pour un personne de mauvaise foi de trouver des failles,
fussent-elles imaginaires, à une thèse, même si celle-ci
fait l’unanimité auprès des historiens.
Le plus fameux
exemple d’hypercriticisme porte sur
l’existence ou non de Napoléon Bonaparte. En effet, un
mathématicien (!), ayant pourtant vécu aux XVIIIe-XIXe
siècle, Jean-Baptiste Pérès, a tenté de
démontrer que l’Empereur français était un
mythe… Un peu dans le même ordre d’idées, quoi de
plus commode pour faire disparaître les thèses
controversées du philologue allemand, Friedrich Max Müller, que
de nier
son existence ?
Auparavant,
déjà, la lutte fratricide entre catholiques et protestants mena
les uns et les autres à succomber à l’hypercriticisme
dans le but de vider les croyances de l’adversaire de toute substance.
Car ne nous y trompons, l’hypercriticisme
n’est pas paré de bonnes vertus méthodologiques :
ceux qui s’en prévalent cherchent généralement
à conforter leurs convictions préétablies, via des
procédés malhonnêtes.
Sous
l’ère moderne, l’« hypercriticisme »,
renommé « négationnisme » pour l’occasion,
renaît de ses cendres sur la question des chambres
à gaz durant la Seconde Guerre mondiale. Certains, comme
l’instituteur, Paul Rassinier, en nient
l’existence-même, provoquant, très logiquement, une
indignation générale.
Le
négationnisme ne touche d’ailleurs pas que la France.
Récemment encore, un sénateur roumain du Parti
social-démocrate a été
« épinglé » par ledit parti pour avoir
affirmé, au cours d’une émission
télévisée, qu’aucun
juif n’avait souffert sur le territoire roumain sous le régime
pronazi d’Ion Antonescu. Des ONG roumaines ont annoncé leur
intention de déposer une plainte pénale contre le
sénateur.
Et c’est
là que se situe malheureusement le problème : si
l’indignation à l’égard de ces
négationnistes est légitime, en revanche, la réponse
apportée est insatisfaisante et donne au pouvoir politique un
prétexte de plus pour limiter la liberté d’expression et
la marge de manœuvre des historiens sur le plan de la recherche.
Des
« lois
mémorielles » vont ainsi être votées par
les pouvoirs publics dans le but d’interdire à quiconque de
discuter un fait historique sous peine de poursuites. La première qui
sera adoptée par la France est la fameuse « loi Gayssot », « tendant à
réprimer tout acte raciste, antisémite ou
xénophobe ». En suivront plusieurs autres sur le
génocide arménien de 1915, l’esclavage…
La loi Taubira est particulièrement perverse dans le sens
où elle donne des instructions impératives à destination
des programmes scolaires.
Ce type de
lois a connu un essoufflement en 2005, au moment où l’article 4
de la loi du 23 février 2005, stipulait une lecture historique
positive de la colonisation française. Quelques mois plus tard, le
Premier Ministre d’alors, Dominique de Villepin, sera bien obligé
de reconnaître
que « ce n’est pas au Parlement d’écrire
l’Histoire ». L’article litigieux sera alors
supprimé. Ce qui n’empêcha pas l’Assemblée
nationale de vouloir voter une nouvelle loi sur le génocide
arménien, fin 2006…
L’hypercriticisme et le négationnisme sont donc
effectivement des cancers à combattre. Pas par la répression
pénale mais, plutôt, aux moyens d’un débat entre
historiens.
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