Cela fait déjà
quelques mois que Jean-Marc Ayrault a été débarqué.
Un débarquement qu’il vit visiblement mal, la chute de sa cote de popularité
n’ayant pas entamé la volonté qu’il avait de rester à Matignon.
Quelques mois
avant son départ, en novembre 2013, il avait annoncé qu’il allait
prochainement mettre en place une des promesses
de campagne du président Hollande, à savoir la fusion
de l’impôt sur le revenu et de la Contribution sociale généralisée (CSG).
Mais, visiblement, la complexité de cette réforme va entraîner sa mise au
placard, au grand dam de Jean-Marc Ayrault.
Il faut dire
que cette idée n’est pas nouvelle
et que le président Hollande aurait peut-être dû y réfléchir un peu plus
avant d’en faire une promesse majeure de son quinquennat.
Que devait-on
penser de ce projet de réforme ? Tout d’abord, il faut espérer qu’il ne
s’agit que d’une forme d’ingénierie sans conséquences négatives sur les
contribuables. Et, quoi qu’il arrive, dans un tel cas de figure, elle ne
résoudra pas le problème fondamental que subissent les contribuables du
pays : la hausse
effrénée des impôts, y compris pour les classes
moyennes que le président de la République s’était pourtant juré
d’épargner.
Ce projet de
réforme sent en réalité le soufre puisque son premier objectif était de
« rapporter
plus de recettes ». Or, si l’administration fiscale empoche plus de
recettes, cela implique un appauvrissement concomitant des contribuables.
Le second
objectif, martelé par Jean-Marc Ayrault, était « plus de
progressivité ». Comme l’indiquait la vice-présidente de l’IFRAP, Agnès
Verdier-Molinié, il est probable que cette fusion aurait débouché sur de
nouvelles tranches et aurait accentué le caractère progressif de l’imposition
en France.
Hélas, la
progressivité est presque unanimement vue comme un principe positif du droit
fiscal de nos jours. Et ce, même si une majorité d’économistes chevronnés – à
commencer par Maurice
Allais – ont montré, arguments solides à l’appui, ses effets néfastes.
Par exemple, le fait qu’elle entraîne une consolidation de certaines fortunes
acquises, leurs détenteurs n’étant alors pas tentés de « se salir les
mains » au travail pour toucher des revenus trop lourdement ponctionnés.
De la sorte, le phénomène de rente est encouragé.
Pire encore,
même en présence d’une progressivité assommante, certains continuent de se
plaindre des « cadeaux fiscaux » octroyés aux plus aisés. Ainsi, la
déductibilité de la CSG n’était possible que pour les contribuables payant
l’impôt sur le revenu. Ceux qui ne le paient pas estiment être victimes d’une
injustice
et demandent à ce qu’il y soit mis un terme…
Enfin, les
propos de Jean-Marc Ayrault avaient de quoi glacer le sang de tous les
contribuables : « Ce qui est grave, c’est la contestation de
l’impôt lui-même, ce n’est pas bon dans une démocratie, l’impôt est un acte
démocratique ». Ce déni de la réalité est navrant et explique sans doute
la chute dramatique de sa cote
de popularité auprès des Français.
En revanche,
l’« avantage » de la réforme aurait été le fait que tout Français,
contrairement à la propagande, aurait pu constater directement qu’il paye des
impôts. Il aurait senti immédiatement le poids de la CSG (dont le montant des
recettes est supérieur à celui de l’impôt sur le revenu, du fait de
l’« explosion permanente » des dépenses sociales) et aurait alors
réalisé que le système fiscal français est loin d’être aussi protecteur des
couches populaires qu’il ne le prétend.
Néanmoins,
l’applicabilité d’une telle réforme eut été trop compliquée : en effet,
la CSG est individualisée
tandis que l’impôt sur le revenu tient compte des ressources du foyer. En
outre, l’impôt sur le revenu est prélevé à but redistributif tandis que la
CSG vise à financer la Sécurité sociale et ses traditionnels déficits. En
outre, si personne ne peut contester que l’impôt sur le revenu est un impôt,
la donne est différente concernant la CSG que la Cour de justice de l’Union
européenne a qualifiée de cotisation sociale. Leurs régimes sont donc
différents.
Cette usine à
gaz ne verra donc sans doute jamais le jour sous le quinquennat de François
Hollande. Et c’est probablement une bonne chose.
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