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Qu’est-ce que la
liberté? Rares sont ceux qui n’en ont pas une opinion, mais la
connaissons-nous vraiment? Est-il seulement possible d’en faire le
tour? Chose certaine, il est impossible d’en concevoir la fin, car
c’est justement l’une de ses principales caractéristiques,
elle n’en a pas. Déjà Hegel, je crois, la
présentait ainsi, bien qu’il la concevait différemment:
La liberté est la raison.
La raison
La raison est la
faculté de penser. Cette faculté est un pouvoir naturel,
inné. Ce pouvoir est la liberté. Il s’agit bien davantage
que la liberté d’exprimer sa pensée: c'est la
liberté ou le pouvoir de penser. Reconnaître ce pouvoir,
c’est en prendre conscience. Grâce à la liberté de
penser on peut concevoir les autres libertés. Toutefois, il y a une
certaine réciprocité, car la pratique des libertés
développe également la conscience.
Lorsqu’on parle des libertés on renvoie à des actions:
action de s’associer, de se mouvoir, de communiquer, etc. Celles-ci
sont libres non seulement dans la mesure où elles ne sont pas
interdites, mais surtout où on en est conscient. Choisir
détermine la conscience qui détermine la liberté
d’action. Autrement dit, une action qui n’est pas la
conséquence d’un choix n’est pas une action libre. Il en
va ainsi de toutes les libertés.
Cependant, si la capacité de choisir détermine une
liberté de penser ou une conscience, il ne s’ensuit pas
nécessairement une liberté d’action. Être conscient
d’agir ne signifie pas nécessairement agir librement, sans
contrainte. Le prisonnier n’est pas libre de ses mouvements, mais
petite ou grande consolation, il maintient sa liberté de penser.
Peut-être souhaite-t-il être ailleurs?
Autre exemple: Un homme soûl qui n’est plus conscient de ce
qu’il fait a d’abord choisi de boire. À ce titre,
l’homme doué de conscience est responsable de ses actes. La
liberté bien comprise exige la non-agression afin de préserver
celle des autres. En ce sens, liberté et devoir ne font qu’un.
Moins il y a d’agression, plus les libertés se déploient,
mais elles se déploieront d’autant plus que la liberté de
penser aura été enseignée. Les libertés se
pratiquent, mais seule la liberté de penser se transmet par
l'enseignement, car il s’agit d’une qualité ou
caractéristique de l’homme. La liberté en
général n’est donc pas une absence d’interdiction
ou d’agression, ces dernières constituent seulement un frein
à celle-là.
Déterminisme vs
liberté
L’action qui
vise un but est une action libre, tandis que le mouvement d’un
météore est déterminé, car celui-ci ne choisit
pas son trajet. L’homme est libre en autant qu’il est conscient.
Qu’il étudie l’objet inanimé, l’action
humaine ou l’être vivant en général il utilise sa
raison, il exerce sa liberté de penser. Ce n’est pas parce
qu’un objet agit de manière déterminée qu’on
le comprend avec une raison différente. La raison procède de la
même manière pour tout le monde, seul l’objet
étudié est régi selon des lois différentes.
On ne peut pas opposer le pouvoir à la liberté, car celle-ci
est elle-même un pouvoir. Si l'on est libre d’agir, c’est
que l'on peut agir. De même, si l'on est libre de penser, c’est
qu'on le peut. Cette liberté, ce pouvoir est la faculté de
penser, la raison, la conscience, l’esprit. La conscience ne nous est pas
fournie d’un bloc, elle se développe par expérience,
réflexion et volonté.
La raison se fait
éthique dans la mesure où elle se contraint pour
préserver et bénéficier de la liberté
qu’elle reconnaît en l’autre. Cette contrainte est
dirigée vers soi. La maturité et la conscience en sont des
conditions. Néanmoins, cette capacité à
s’assujettir, à être autonome n’est pas suffisante.
Un tiers est nécessaire à la résolution des conflits,
mais celui-ci peut être établi de manière volontaire et
non coercitive. Il ne s’ensuit donc pas que ce tiers soit l’État.
Pouvoir vs
liberté
Lorsqu’on oppose
le pouvoir à la liberté, plus souvent qu’autrement,
c’est qu’on confine le pouvoir au politique. En d’autres
mots, on oppose le pouvoir de la raison au pouvoir exercé par la
force. Malgré qu’un homme ait pu choisir de faire de la
politique, donc d’utiliser la coercition comme réponse aux
problèmes qu’il perçoit, il n’utilise pas moins sa
raison. Cependant, s’il exploitait celle-ci davantage ou bien il
travaillerait à réduire l’État ou bien il
réorienterait son action vers d'autres domaines.
Il en est ainsi car la coopération humaine peut exercer des sanctions
sans recourir aux moyens coercitifs utilisés par l’État.
Tous services rendus par des moyens non volontaires constituent une
agression. La taxation n’est pas volontaire. Celle-ci est non seulement
inutile, mais injuste. Qu’elle soit pratiquée depuis des
siècles n’y change rien. Si le temps prouve quelque chose,
c’est que la raison avance lentement. L’habitude est tenace.
Qu’aucune société n’ait vécue sans
État est faux, mais même si c’était vrai, cela ne
légitime pas l’agression. Justifier la taxation comme
étant une bonne agression est aussi ridicule que de revendiquer une
discrimination positive ou une guerre préventive. Celui qui avance ces
arguments ne fait pas de la science, mais de la démagogie.
La propriété de chaque individu est à respecter. Dans le
cas contraire, il s’agit d’un mal et cela peu importe le bien
qu’une telle agression procure aux autres. La satisfaction des besoins
sera d’autant plus grande qu’elle sera obtenue par des moyens
volontaires. Tous les besoins, sans exception, peuvent être obtenus
volontairement. Ce n’est pas le besoin qui crée
l’État, mais le manque de raison.
Droit vs
liberté
Tant qu’il y a
respect de la propriété la liberté reste entière.
Une vie en société appelle à la contrainte, mais non
à la coercition. Dès qu’il y a coercition
gouvernementale, c’est-à-dire dès qu’il y a
politique les libertés se réduisent aux droits. Les fruits de
votre travail vous sont confisqués à hauteur
déterminée par le droit. En ce sens, la portée des
droits ne peut jamais être plus grande que celle des libertés.
Dès qu’il reconnaît en l’autre la même
liberté, l’homme est porté à se contraindre dans
son propre intérêt. Dans un régime de liberté, les
droits sont les libertés entendues sous le concept de
propriété et rien d’autre. Au contraire, lorsque la
liberté se fait droit, sous un régime politique, l’homme
ne cherche plus tant à se contraindre lui-même qu’à
contraindre les autres. N'étant pas fondée en raison la
politique facilite cette voie, car elle-même utilise la force
coercitive. L’homme est calculateur et s’il considère
qu’il peut vivre des avoirs des autres grâce à
l’État, il n’ira pas plus loin. Il se contentera de
revendiquer des droits qui n’ont plus rien à voir avec les
libertés, car ces droits ne sont possibles qu’avec la
coercition.
La tendance, particulièrement dans les régimes
démocratiques, est à l’égalité des droits,
à les considérer tous fondamentaux. Leur prolifération
se fait au détriment de la propriété, par
conséquent des libertés, de l’échange et de la
création de richesse. Plus le politique avance, peu importe le
régime, plus l’éthique et la liberté reculent.
Temps et
liberté
L’homme peut
certainement accroître son champ d’action en contraignant la
liberté des autres, mais moins il la contraindra plus grande encore
sera la sienne. À cette reconnaissance la réflexion suffit. Son
défaut est que sa réalisation exige du temps. Plus nombreux
sont ceux qui le reconnaîtront, plus grands en seront leurs
bénéfices. D’ici là, ils peuvent néanmoins
se réjouir de combattre l’agression, sous toutes ses formes,
sans y recourir.
André Dorais
André
Dorais a étudié en philosophie et en finance et vit à
Montréal.
Les vues présentées par l’auteur sont
les siennes et peuvent évoluer sans qu’il soit nécessaire
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