|
L’Amérique commence peu à peu à
me rappeler le grand classique de l’horreur Qu’est-il arrivé à baby Jane ? Elle a
perdu tout sens de la réalité, et se comporte telle une vieille
prostituée maquillée à la truelle faisant son show sur
une plage pendant que ses parents mourants l’observent, allongés
sur le sable.
Le vent de l’Histoire nous pousse vers un horizon
dont nous ne voulons entendre parler. Et nous nous tenons là, les
mains couvrant nos oreilles, refusant d’ouvrir les yeux sur la
réalité. Voici certains sujets étant pour beaucoup
d’entre nous sources de confusion :
- Nous nous répétons à
nous-mêmes que nous sommes entrés en phase de
rétablissement économique, ce qui signifie que nous nous
attendons à retourner vers une économie alimentée
par le crédit et l’énergie à bas prix.
Foutaises ! Cet épisode de notre Histoire est
terminé. Nous avons désormais entré une phase de
contraction qui nous semblera permanente jusqu’à ce que
notre économie ait atteint un point de remise à
zéro et apprenne enfin à faire avec ce que la nature a
à offrir. Ce point de réinitialisation sera bien
inférieur à tout ce que nous pouvons nous imaginer. Notre
mission sera de gérer intelligemment cette phase de contraction.
Nous préférons nous laisser penser que les choses
continueront pour nous d’aller dans la bonne direction, la
direction du ‘toujours plus’. Que nous le voulions ou non,
nous allons dans la direction opposée. Bien que ce ne soit pas
une chose facile à accepter, c’est garanti, et ce
n’est là que la conséquence de nos actions. Nous ne
pouvons blâmer personne d’autre que nous.
- Notre secteur immobilier ne sera plus jamais ce
qu’il était, dans la mesure où nous nous devons
aujourd’hui d’aménager notre vie différemment.
Nous avons construit trop de maisons aux mauvais endroits, et sans
disposition civique particulière. Nous avons pu survivre ainsi
grâce à un pétrole peu cher, à des voitures
achetées avec des cartes de crédit, et à tous ces
étrangers nous ayant prêté leur monnaie. Nous
devrions cesser d’étendre nos banlieues. Lorsque nous ne
pourrons plus en supporter les disfonctionnements et les
inconvénients, nous aurons à les quitter. Pour rendre les
choses encore plus graves, nous ne savons pas encore que notre
système d’agglomération n’est plus en mesure
de subsister. C’est l’une des raisons pour lesquelles
l’un des principaux thèmes traités par la campagne
présidentielle actuelle – bien qu’il ne soit pas
traité explicitement – est la défense du droit
d’accès à un mode de vie urbain. En d’autres
termes, c’est une campagne en faveur du soutien de
l’insoutenable. Comme la dynamique des banlieues ne cesse de
décroître, les mécontentements pourront vite se
transformer en rage. Et tout ceci ne sera dû qu’aux
mensonges ayant été proférés par les hommes
politiques depuis de trop nombreuses années. Cette rage du public
pourra se montrer extrêmement destructrice. Elle pourra renverser
le gouvernement, provoquer des guerres civiles, ou nous mener vers
d’autres aventures militaires – si nos mauvais choix
venaient à nouveau à être blâmés sur
l’étranger. Si nous concentrions nos esprits et nos efforts
sur le développement d’un meilleur moyen d’occuper
notre petit morceau de terre, les choses pourraient prendre une tournure
tout à fait différente. Ce que j’implique par là, c’est un retour à des
schémas de développement traditionnels (des villes)
intégrés aux campagnes et à l’activité
agricole.
- Une multiplication des diplômes de nous ne
permettra pas de retourner à une économie basée sur
la consommation. Nous n’aurons bientôt plus besoin
d’hommes d’affaires, de vendeurs d’obligations, de
députés régionaux, de docteurs en étude de
genres… Bien qu’aujourd’hui, les entreprises et
institutions les plus puissantes semblent gouverner nos vies, il ne se
passera pas bien longtemps avant qu’elles ne disparaissent
complètement. Toute organisation à grande échelle
est sur le point d’osciller et de s’effondrer : les
chaînes nationales de vente au détail, les entreprises
multinationales, les banques, les universités, et ainsi de suite.
Le centre de la vie économique en Amérique deviendra la
production alimentaire et autres activités agricoles, pas le
développement de jeux vidéo, ou encore les voitures hybride.
Nous aurons bientôt besoin de plus de fermiers, et de plus de
force de travail dans nos champs. De nouveaux emplois seront
créés, mais seulement très peu d’entre eux
consisteront à rester assis dans un bureau avec air
conditionné. Vous pouvez décider de fermer les yeux sur
tout cela, la réalité finira par vous rattraper.
- En matière énergétique, nous
sommes dans le pétrin. On entend partout que les Etats-Unis sont
sur le point de devenir un pays exportateur de pétrole.
C’est un amas d’absurdités ! Nous continuerons
d’importer plus de deux tiers du pétrole que nous
consommons. Nous avons également pu entendre que les nappes de
pétrole de schiste de la région de Bakken
nous rendront bientôt énergétiquement
indépendants. C’est une méprise ! Selon
certains, nous disposerions encore d’assez de gaz naturel pour ces
cent prochaines années. Ce sont ici des fabulations
alimentées par la phase de chagrin collectif dans laquelle nous
sommes entrés – la phase de négociation, durant
laquelle nous tentons désespérément
d’établir un meilleur contrat avec la réalité.
Et je nous souhaite bien de la chance. La réalité,
c’est que nous ne disposions de presque plus aucune réserve
de pétrole ou de gaz peu chère, et que ce qu’il nous
reste est si difficile à extraire que nous ne possédons
pas les ressources suffisantes pour ce faire. A trop ignorer les
désordres de notre système financier, nous manquons
d’observer l’absence de création réelle de
capital. Les compagnies pétrolières ne cessent de se
lancer dans des campagnes de publicité afin d’obtenir des
investissements pour pouvoir financer leur schéma Ponzi. (Traduction : obtenir l’argent des
retraités ne pouvant obtenir de rendement de ces investissements
‘sécurisés’ que sont les obligations). Nous
aurons tôt ou tard à nous y confronter : l’âge
de l’énergie fossile et terminée, et nous ne
pourrons y remédier par aucun miracle.
- La haute technologie ne nous permettra pas de
surmonter les problèmes auxquels nous faisons face,
particulièrement en matière énergétique. Les
Américains rêvent encore de voitures électriques, de
nanotechnologie, et d’une technologie de l’information qui
pourrait permettre à ce progrès que nous connaissons et aimons tant de pouvoir perdurer. Tout
comme la fin de l’ère des banlieues, cela nous
mènera vers d’importants mécontentements. Nous
sommes sur le point de connaître une interruption du
progrès technologique, et ce pour une durée
indéterminée. L’utopie serait que nous puissions
échanger toutes nos voitures diesel pour des voitures
électriques. Cela ne se produira pas. Les Etats-Unis ne seront plus
jamais une société d’abondance. De moins en moins de
capital sera disponible au crédit. Nos villes, nos régions
et nos états tomberont dans la banqueroute, et plus personne
n’aura les moyens de maintenir nos réseaux routiers en
état. C’est pourquoi nous devons aujourd’hui nous
concentrer sur la création de villes à taille humaine
plutôt que d’étendre nos banlieues, et pourquoi nous
avons désespérément besoin d’entreprendre la
réparation de nos chemins de fers classiques plutôt que des
lignes grande vitesse.
- Nous voudrions qu’en fermant les yeux sur nos
problèmes bancaires, monétaires, et de formation de
capital, ils finissent par disparaître tels la rosée du
matin. Si l’ordre économique n’est pas bientôt
rétabli, alors notre système courra à sa perte. Cela
pourra éventuellement déstabiliser la discussion autour du
pic pétrolier – en réalité, le pic
pétrolier en sera accéléré du fait de la
rareté de capital. Le président Obama ne rend service
à personne en autorisant Jon Corzine
à demeurer en fuite. Si nous continuons d’agir comme si
rien ne s’était produit, la réalité finira
par venir corriger notre système monétaire à notre
place, nous forçant à tout recommencer à
zéro. Littéralement, à zéro.
Il serait bon que nous puissions corriger les
dysfonctionnements de ce système de prise de décision
collective que nous appelons ‘politique’, mais cela ne ferait que
nous placer en une posture encore plus divergente de la
réalité. Pour le moment, les dirigeant des Etats-Unis semblent
tous avoir bu trop de limonade. Ils manquent tous de compétence, et
refusent d’accepter le devenir du notre pays.
|
|