Jean- Marc Ayrault a
annoncé les paramètres de sa réforme à
minima des retraites à la fin de deux jours de consultations avec les
syndicats et les employeurs. Le résultat est une petite
déformation du système actuel – une
« déforme », donc – qui
élève le niveau et la durée des cotisations, en
évitant la réforme proposée par l'Union
européenne.
Face à un déficit
qui devrait atteindre 20,7 milliards d’euros en 2020, les efforts pour
réduire le déficit seront couverts presque exclusivement par
une augmentation des cotisations de retraites, qui devrait rapporter 7,3
milliards d’euros à l’État. A partir de 2020, la
durée de cotisation sera allongée progressivement à 43 ans,
permettant à l’État d’amasser 2,7 milliards
d’euros par an à partir de 2030 et deux fois plus à
partir de 2040.
Les deux axes principaux de cette
« déforme » sont les suivants:
- les contributions des
employés et des employeurs augmenteront progressivement afin
d’atteindre 0,3 points de pourcentage en 2017 ;
- la durée de cotisation
nécessaire pour toucher une retraite à taux plein ne changera
pas avant 2020, mais passera ensuite de 41,5 à 43 ans en 2035,
frappant les générations nées après 1973. Tous
ceux qui commencent à travailler à l’âge de 26 ans
ne toucheront une retraite à taux plein que s’ils travaillent
jusqu'à l'âge de 70 ans.
Les réactions parmi les
syndicats et les employeurs sont mitigées. La CGT a annoncé des
actions de grève pour le 10 Septembre. Pierre Gattaz, le nouveau chef
du MEDEF a déclaré que cette réforme était
dangereuse et inacceptable.
Comme vous vous en doutez, cette
« déforme » ne résout aucun des
problèmes structurels du système des retraites en France :
- plus de trente régimes de
retraite différents subsistent, chacun gouvernés par des
règles différentes. Les cotisants continueront à faire
partie de plusieurs régimes à la fois, ce qui augmente d’autant
la complexité et le gaspillage de ce système caduc ;
- les changements annoncés
ne garantiront pas l’équilibre financier des retraites ni
à court ni à long terme ;
- l’interdiction des fonds
de pension a eu pour conséquence la création de fonds
étatiques comme la Banque Publique d’Investissement (BPI), ce qui
aboutit à remplacer les avantages d’une diversité des
offres privées par un monopole d’État soumis à
l’influence des intérêts de la classe politique.
Certains commentateurs
applaudissent le gouvernement Ayrault, ce dernier ayant réussi
à déminer le terrain d’une réforme
controversée tout en protégeant les privilèges de
diverses clientèles électorales (fonction publique, monopoles
du rail, Banque de France, syndicats, etc.).
Mettons plutôt le Premier
ministre en garde : à forcer de ne vouloir que déminer, on
finit par perdre la bataille. Qu’adviendra-t-il quand une crise
similaire à celle des pays du sud de l’Europe mettra
soudainement le gouvernement français au pied du mur ?
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