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Partir en retraite à 50 ans avec
une retraite égale ou supérieure à un dernier salaire de
Nabab, qui n'en rêve pas ?
Et non, ce n'est pas
en Grèce...
Et bien, dans certains états américains, si vous êtes
fonctionnaire, c'est possible. On imagine pas à quel point les USA ont
été sournoisement socialisés par leurs syndicats
d'employés publics. Le journaliste Steve Greenhut, déjà évoqué
sur Ob'Lib', a longuement évoqué
cette vampirisation
croissante de l'économie américaine
par les syndicats publics.
Seul problème: ces
retraites idylliques ne sont pas provisionnées. Pour
comprendre ce qui se passe, quelques retours sur le système de retraite
américain s'imposent.
Pour tous les salariés des USA, la retraite se compose d'un premier
pilier, le régime "général" appelé
là bas social
security, financé par une taxe sur les salaires
("payroll tax") de deux fois 6.5% payée à la fois par
les salariés (nos cotisations "salariales") et les
employeurs ("patronales"). La social
security est un système par répartition, les
américains disent "pay as you go". Malheureusement, il est
aussi à "prestations définies"* plutôt
qu'à cotisations définies* et est donc structurellement
insolvable à long terme. Mais ce n'est pas de ce régime
général que viennent les soucis des états
fédérés et de leurs fonctionnaires.
La relative modicité de la payroll
tax a une contrepartie: les prestations définies par la social
security sont modestes, aux standards américains s'entend. Aussi une
grosse moitié des salariés US a-t-il souscrit à un
second pilier, les fonds de pension, qu'ils alimentent soit sur leur salaire,
soit, comme c'est le cas pour la plupart des fonctionnaires et des gros
employeurs privé, par un abondement de leur employeur.
Des projections
à long terme totalement irréalistes
C'est là que le bât blesse : nombre de gros employeurs ont
imprudemment assorti, dans les années fastes, ces fonds de pensions de
prestations définies* à l'avance, prestation dont le calcul
était basé sur des espérances de rendement totalement
irréalistes.
Ainsi par exemple, Bloomberg
nous rapporte que les rendements ayant servi aux calculs des pensions de gros
fonds de pensions de fonctionnaires texans et californiens étaient
totalement déconnectés des performances réels de ces
fonds, et que la chute des marchés consécutive à la crise
n'a fait qu'aggraver la situation :
The Teacher Retirement System of Texas, the
seventh-largest public pension fund in the U.S., reports each year that its
expected rate of return is 8 percent. Public records show the fund has had an
average return of 2.6 percent during the past 10 years.
The
nation’s largest public pension fund, California Public
Employees’ Retirement System, (NdVB: CALPERS) has been reporting an
expected rate of return of 7.75 percent for the past eight years, and 8
percent before that, according to Calpers spokesman Clark McKinley.
Its
annual return during the decade from Dec. 31, 1998, to Dec. 31, 2008, has
been 3.32 percent, and last year, when markets tanked, it lost 27 percent.
Pour
vous donner une idée, des retours sur investissement
annoncés de 7.5 à 8% semblaient monnaie courante chez les fonds
de pensions publics, alors que le propre fonds de pension des employés
de Warren Buffet (à cotisation définies, d'ailleurs), affiche
une performance de long terme de 6.9%.
Le
résultat est que TOUS les états fédérés,
absolument tous, ont un système de pensions de leurs fonctionnaires
insuffisamment provisionnés. Il est à noter que quelques
grandes sociétés privées ont été dans la
même situation, et ont le plus souvent fait faillite -cas des grandes
compagnies aériennes-, ou ont dû arracher à leur
syndicats des mutations importantes du système, et notamment un
passage de systèmes à prestations définies* à un
système à cotisations définies* sans obligation de
résultats. Sans oublier General Motors, plombé par le
déficit abyssal de son fonds de pension, et sauvé par le
contribuable américain.
La carte du
désastre
Mike Shedlock a
publié en avril une carte interactive du Sous financement
des régimes de retraites publics dans les états. Le cas le plus
éloquent est celui de l'Illinois, dont le financement des retraites
n'est assuré qu'à... 29%. En valeur absolue, et sans surprise,
c'est la Californie,
maintes fois évoquée
dans ce blog, qui tient la palme du
sous-financement. L'Illinois et la Californie sont considérées,
au plan mondial, comme les 8èmes
et 10èmes dettes "souveraines" les moins sûres.
Selon Bloomberg, le sous-financement de tous les régimes
définitaires nécessiterait mille milliards de dollars de
refinancement, mais le magazine économique Barrons parle de 2000 milliards,
en tenant compte des pertes futures probables. L'American Enterprise
Institute, avec d'autres hypothèses de rendement et de durée de
pensionnement moins favorables, crise oblige, évoque un trou
supérieur à 3000 milliards, soit environ 22% du PIB US. Notons
que ces sommes devraient être trouvées sur plusieurs
décennies, mais que dans l'état actuel des recettes fiscales
des états, il n'est pas impossible que l'insolvabilité des
fonds de pension publics de certains états les mettent en situation de
cessation de paiement très prochainement.
Or, les états doivent, de par la loi, garantir les fonds de pension de
leurs fonctionnaires. Pour ce faire, ils se sont dotés d'un organisme
mutualiste, le PBGC, supposé assurer les pertes de certains fonds.
Mais face à l'ampleur de la crise, le PBGC n'aura pas assez de fonds
pour garantir quoi que ce soit.
Certains états se sont donc lancés dans une véritable
opération de cavalerie financière en émettant des bons
(garantis par leurs contribuables) pour combler les trous de leurs
régimes de retraite (cf. Bloomberg).
Mais du coup, c'est leur dette qui explose. D'ailleurs, nombre d'associations
de contribuables sont à juste titre vent debout contre ces pratiques
qui reviennent à prélever un impôt supplémentaire
sur tout un chacun, et donc sur les employés du privé, pour
financer des retraites dorées sur tranches aux salariés du
public.
Or, une part importante des revenus des états
fédérés provient d'une "real estate tax", ou
taxe foncière, assise sur la valeur des propriétés,
laquelle, crise oblige, a fondu. Les états ne peuvent donc pas compter
sur des recettes en hausse pour combler le trou de leurs régimes de
retraite ou rembourser les bons émis pour ce faire.
La faillite, nous
voilà !
Naturellement, tous les états se tournent vers l'état
fédéral dans l'espoir d'un sauvetage. Seul gros
problème: l'état fédéral
n'est pas, budgétairement parlant, au mieux de sa forme,
avec des recettes égales à 14% du PIB pour des dépenses
égales à 23% (!!), et un "défaut de recettes
fiscales" évalué par le FMI à... 14% pour non
seulement cesser de creuser la trappe à dettes mais aussi permettre de
faire face aux obligations futures, et notamment aux versements du
système de retraites général. Autrement dit,
l'état fédéral devrait doubler ses recettes
fiscales pour pouvoir équilibrer son budget non seulement actuel, mais
ses budgets futurs, ce qui est économiquement et politiquement
inenvisageable.
Bref, même s'il n'est pas encore en situation de cessation de paiement,
l'état américain est en situation d'insolvabilité
latente qui exige une restructuration plus que drastique de ses
activités et de ses dépenses.
Cela n'empêche pas plusieurs sénateurs démocrates, dont
ceux de l'Illinois, quelle surprise, de sponsoriser une
loi de "sauvetage" des retraites, loi
"Casey" (D., Pensylvanie), qui aurait pour but de mettre à
la charge de l'état fédéral toutes les pertes du PBGC.
Irresponsabilité, incompétence... Les mots manquent pour qualifier
un tel projet.
Naturellement, cette proposition de loi fait bondir nombre d'observateurs et
d'associations de contribuables, puisqu'elle reviendrait à mettre
à la charge de tous les contribuables le retiendrait de toute
volonté de réformer le système, transformant de facto
les contribuables du secteur privé en esclaves des employés
syndiqués de la fonction publique.
Les systèmes
à prestation définies sont voués à la faillite
Mike Shedlock estime que la plupart des collectivités devraient se
déclarer en faillite pour rendre caducs tous les accords
antérieurs avec les syndicats et obliger ceux ci à
renégocier des contrats à cotisations définies
plutôt qu'à prestations définies. C'est une suggestion de
simple bon sens. Mais les syndicats de fonctionnaires sont vent debout contre
toute proposition de réforme de leur système de pensions,
tellement avantageux tant que quelqu'un d'autre paie.
Toute ressemblance avec un pays que nous connaissons mieux serait fortuite.
La faillite des fonds de pension publics américains nous montre que la
capitalisation, si elle n'est pas assortie de précautions, n'est pas
la garantie absolue contre la faillite des systèmes de retraite. La
première ornière dont tout système de retraite -répartition ou
capitalisation- se doit de sortir est celle des systèmes
à prestations définies*, pour évoluer vers des
systèmes où seules les cotisations sont définies*,
où le gestionnaire, solidement supervisé, s'engage à
faire de son mieux, mais sans la moindre obligation de résultat final
ni la moindre garantie publique sur ces résultats.
Vincent
Bénard
Objectif Liberte.fr
Vincent Bénard, ingénieur
et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org), deux thinks tanks francophones
dédiés à la diffusion de la pensée
libérale. Spécialiste d'aménagement du territoire, Il
est l'auteur d'une analyse iconoclaste des politiques du logement en France,
"Logement,
crise publique, remèdes privés", ouvrage publié
fin 2007 et qui conserve toute son acuité (amazon), où il
montre que non seulement l'état déverse des milliards sur le
logement en pure perte, mais que de mauvais choix publics sont directement à
l'origine de la crise. Au pays de l'état tout puissant, il ose
proposer des remèdes fondés sur les mécanismes de
marché pour y remédier.
Il est l'auteur du blog "Objectif
Liberté" www.objectifliberte.fr
Publications :
"Logement: crise publique,
remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat
Avec Pierre de la Coste : "Hyper-république,
bâtir l'administration en réseau autour du citoyen", 2003, La
doc française, avec Pierre de la Coste
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