Le
retour à un étalon or monétaire après une
période de monnaie fiduciaire, se sont produites de nombreuses fois au
cours de l’Histoire. Les Etats-Unis sont passés d’un
système de devises flottantes et dévaluées à un
étalon or en 1789 et 1879, et dans une moindre mesure en 1816, 1920,
1934 et 1951.
Il
ne s’agit donc pas de quelque chose que nous n’avons jamais fait
par le passé.
Tous
les pays ont leur relation personnelle avec l’or. Des situations de ce
genre se sont produites de multiples fois dans l’histoire et n’ont
rien de mystérieux.
Pour
résumer, il existe trois possibilités : la première
consiste en un retour à une parité
pré-dévaluation. C’est ce que les Etats-Unis ont fait
après la Guerre Civile, et ce que l’Angleterre a fait
après les Guerres Napoléoniennes et la Première Guerre
Mondiale. La seconde e en la stabilisation d’une devise autour de sa
valeur dominante. C’est ce que la France a fait après la
Première Guerre Mondiale, et ce que le Japon a fait après la
Seconde Guerre Mondiale. La dernière est d’introduire une
nouvelle devise. C’est, bien que ce soit contestable, ce qu’on
fait les Etats-Unis en 1789 en remplaçant le dollar continental, et ce
qu’a fait l’Allemagne en 1923 en remplaçant le mark
dévalué par le rentenmark.
Il
est clair que nous ne nous en retournerons pas aujourd’hui à une
parité pré-dévaluation. La dernière parité
avec l’or qui ait été en vigueur est de 35 dollars par
once. Nous ne nous en retournerons pas non plus à la moyenne de 350
dollars par once des années 1980-90.
Nous
n’avons pas non plus besoin d’introduire une nouvelle devise,
comme c’est généralement fait après qu’une
devise ait été tant abusée qu’elle n’ait
plus d’autre avenir que de joindre la poubelle de l’Histoire aux
côtés des cruzeiros, des pengos et des
zaires.
Cela
nous laisse avec diverses variantes de la dernière option :
relier la devise en circulation avec l’or au taux dominant.
Définissons
ce problème un peu plus clairement. L’objectif est de déterminer
une valeur de parité, un ratio entre la devise et l’or, aussi
connu sous le nom ‘prix de l’or’. Puisque c’est un
nombre, il n’est pas question de le déterminer trop haut ou trop
bas. Nous devons déterminer un chiffre exact.
Ce
n’est en rien compliqué, au contraire, ce n’est rien de
plus qu’un nombre.
Si
vous déterminez une valeur trop faible pour votre devise, alors vous
ne faites qu’en exacerber la dévaluation. Par exemple, si vous
choisissiez un prix de l’or de 5000 dollars par once, un dollar
vaudrait 1/5000e d’once d’or. Cela
représenterait une dévaluation de plus de trois fois de la
valeur actuelle du dollar de 1.300 dollars pour une once d’or.
Qu’avons-nous
à gagner de la dévaluation du dollar d’un facteur de
trois ? Pas grand-chose. Il n’y a donc généralement
aucune raison de sélectionner un nombre qui soit inférieur
à la valeur dominante.
L’autre
aspect de ce point est un peu plus compliqué. Vous pourriez par
exemple dire que la structure générale des prix reflète
aujourd’hui une valeur dollar d’environ 500 dollars pour une once
d’or. En d’autres termes, une majorité des prix ne se sont
pas encore ajustés à la dévaluation du dollar au cours
de ces 10 dernières années. Il est clair que les salaires
n’ont pas beaucoup bougé. Si vous choisissiez une parité
de 500 dollars par once, vous n’auriez pas à subir ce processus
de réajustement des prix à la hausse, qui est ce à quoi
les gens font référence lorsqu’ils parlent d’inflation.
C’est
vrai en théorie, mais dans la pratique, pour passer de 1650 à
500 dollars par once, il faudrait augmenter la valeur du dollar par un
facteur de plus de trois, ce qui aurait des conséquences dramatiques
sur l’économie. Je suppose qu’il existe un moyen de le
faire, qui implique des réformes de taxation, une période
d’ajustement conséquente, et ainsi de suite, mais je ne vois pas
quels sont les avantages qui justifieraient une telle
réévaluation.
Cela
peut sembler théorique, mais c’était un important
problème dans les années 1980. La valeur du dollar est pendant
une courte période passée à 850 dollars par once avant
de se stabiliser en 1980 autour de 600 dollars par once (la moyenne mobile
sur 12 mois a atteint un record de 612 dollars en décembre 1980). Et
puis le dollar est remonté en 1982, avec 300 dollars par once, ce qui
est l’une des raisons pour lesquelles est apparue une récession
cette année-là.
Ainsi,
bien que le dollar ait valu 35 dollars par once seulement dix ans auparavant,
300 dollars par once était une valeur bien trop élevée
en 1982. La valeur du dollar a doublé par rapport à la moyenne
mobile sur 12 mois de 612 dollars enregistrée 18 mois auparavant. Nous
pouvons y penser comme à une déviation de la moyenne mobile sur
12 mois.
Un
étalon or est supposé être une bonne chose, pas une cause
de récessions. Les gens pourraient vite lui en faire porter le
chapeau, comme l’a fait Keynes dans les années 1920 en
blâmant les difficultés auxquelles faisait face
l’Angleterre à la décision prise en 1925 de retourner
à une parité d’avant-guerre. Cette critique
justifiée a miné la légitimité de
l’étalon or en Angleterre, et a conduit à la
dévaluation de 1931 puis à l’abandon des principes
monétaires qui en avaient fait le leader financier mondial au XIXe
siècle.
Une
moyenne mobile sur 12 mois est généralement la première
statistique à étudier pour se faire une idée de valeur
appropriée. Une moyenne mobile sur 3 mois pourrait être plus
efficace dans certains cas. Après une période de fort
déclin de devise, il serait peut-être plus simple
d’observer l’évolution de la valeur sur une semaine. Dans
mon livre intitulé Gold:
the Once and Future Money, j’ai suggéré une moyenne
mobile sur 10 ans. Cela reflétait en revanche la réalité
de l’époque, alors que le prix de l’or
s’était stabilisé autour de 350 dollars l’once deux
décennies durant.
Une
fois un nombre choisi, le problème de la période de transition
vient à se poser, c’est-à-dire le problème du
passage du système flottant à l’étalon or.
Si
la valeur de parité choisie est de 20% de plus ou de moins que la
valeur marché d’hier, établir un étalon or du jour
au lendemain pourrait s’avérer problématique. La valeur
de votre devise changerait du jour au lendemain. En pratique, cela ne
pourrait jamais se produire, parce que le marché serait conscient de
l’arrivée de votre nouveau système, mais vous comprenez
où je veux en venir.
L’avantage
de choisir un nombre assez proche du taux dominant ou d’utiliser une
moyenne mobile sur 3 voire 1 mois est que vous n’auriez pas besoin de
passer par une période de transition. Une semaine ou un mois seraient
largement suffisants. Si vous choisissiez une parité plus ancienne,
votre période de transition serait plus longue. Entre la fin de la
Guerre Civile de 1865 et la ré-adoption de l’étalon or en
1879 (à la parité d’avant-guerre), nous avons pu assister
à une période de transition de 14 ans. Voilà pourquoi ce
n’est peut-être pas une si bonne
idée.
En
Allemagne, en 1923, la période de transition a duré une
semaine.
Peut-être
les gens auraient-ils besoin de temps, étant donné de
l’importance monumentale d’un retour des Etats-Unis à un
étalon or après un hiatus de plus de quarante ans. Mais je
pense préférable d’établir un changement le plus
rapidement possible. Nul besoin de réfléchir des années
durant et de faire durer le capharnaüm monétaire.
Si
un étalon or est une bonne idée – et j’en suis
certain – il l’est dès aujourd’hui.
En
pratique, certains des avantages dont nous avons pu tirer d’un
système monétaire stable sur dix ans, qui peuvent
représenter une période d’expansion et
d’amélioration économique, l’emportent largement
sur les avantages tirés de longues périodes d’ajustement.
Le
chiffre parfait n’existe pas. Quel que soit celui que vous choisissez,
il y aura toujours quelqu’un pour vous dire qu’il est récessionniste (trop élevé) ou
inflationniste (trop peu élevé). En revanche, il n’est
pas difficile de déterminer une valeur capable
d’équilibrer ces inquiétudes et de rendre possible une
transition en douceur vers un nouveau système monétaire sans
passer par des récessions telles que celle de 1982. Aujourd’hui,
1600 dollars par once semblent une parité correcte (la moyenne mobile sur
12 mois est actuellement de 1640 dollars). Mais si vous choisissiez 1900
dollars par once, cela ne poserait pas de problème. Je ne pense pas
que nous puissions passer en-dessous de 1500 dollars par once, bien que vous
puissiez argumenter en faveur d’une parité à 1300 dollars
par once. Si nous choisissions un chiffre de 1300 dollars par once, nous
aurions besoin de mettre en place des politiques de stimulation de la
croissance, telles que des réformes de régimes de taxation pour
contrer les effets récessionnistes de la
hausse de la valeur de la devise que cela représenterait. Il serait
possible de le faire correctement, mais ce serait compliqué, ce qui
n’est généralement pas une bonne idée
lorsqu’il en vient à traiter avec des démocraties et des
gouvernements.
Pour
diverses raisons, ce processus déconcerte. Les gens tendent à
rêver aux procédures les plus complexes et les plus
alambiquées possibles pour le mettre en application. Une
majorité de ces méthodes excessives ne fonctionne pas et offre
des conclusions farfelues. Le résultat de fin n’est qu’un
chiffre, et vous pouvez obtenir un chiffre raisonnable et fonctionnel en
moins de 10 minutes.
Peu
importe le système que vous utilisez, vous devez parvenir à un
chiffre.
Certains
préconisent de laisser le marché s’en charger. Je ne sais
pas ce que cela signifie. Le marché peut évaluer des biens qui
ont des caractéristiques fondamentales. Je sais comment évaluer
le cours d’une action, d’obligations, d’options, de biens
immobiliers et ainsi de suite. Je suis capable de déterminer les
conséquences de bon nombre de décisions politiques, de la
météo, de la possibilité d’une collision avec un
astéroïde, et de bien d’autres choses. En revanche, une
devise n’a pas de valeur intrinsèque. Sa valeur ne dépend
que des actions de ceux qui la gèrent. Si ces derniers laissent le
marché décider, qu’est-ce que cela signifie ? Des
temps incertains, et un potentiel chaos. Ce n’est donc pas la bonne
manière de déterminer la valeur de parité.
En
tant que spectateur, j’ai l’impression que ceux qui gèrent
les monnaies modernes ne savent pas ce qu’ils font, ce qui
suggère qu’ils ne sauraient pas comment maintenir
l’étalon or correctement.
J’ai
suggéré par le passé qu’un comité soit
formé. Mettez dix personnes raisonnablement cultivées dans une
pièce, et demandez-leur de suggérer une valeur de
parité. Chacune d’entre elle aura sa propre manière de
déterminer un nombre. Certains utiliseront un modèle
ultra-complexe, et d’autres le feront à l’œil.
Certains choisiront un nombre élevé, et d’autres non. Une
moyenne arithmétique de ces suggestions, qui serait discutée et
approuvée par une majorité des personnes présentes,
pourrait être un bon départ.
L’établissement
d’un comité a un autre avantage : ce processus même
offre une légitimité politique au nombre choisi. Nous avons
réuni dix personnes, avons discuté, et avons déterminé
une solution. Peu importe les bonnes, et parfois mauvaises,
conséquences de la décision prise, nous saurons que nous avons
fait de notre mieux et que tout le monde a eu la chance de se prononcer.
Peu
importe le processus choisi, déterminez un chiffre raisonnable et mettez-le
en application en évitant une période d’adaptation
prolongée. Pourquoi cela devrait il être
compliqué ?
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