Les
banques ne relâchent jamais la pression un instant…
« Trois sources proches
de l’affaire » ont annoncé à Reuters que la banque centrale de Singapour, l’Autorité
monétaire de Singapour, s’intéresse actuellement à un certain nombre de
banques suspectées d’avoir violé les règles contre le blanchiment d’argent en
traitant les opérations du fonds public malaisien 1MDB, qui a récemment fait
l’objet d’un scandale.
Comptent parmi ces banques
UBS, DBS Group Holdings, Falcon Private Bank et Coutts International. DBS est
basée à Singapour. Les trois autres sont basées en Suisse.
Le scandale d’1MDB concerne
4,2 milliards de dollars qui, selon une enquête parlementaire menée au début
de l’année, auraient disparu ou terminé sur les comptes étrangers de propriétaires
indéterminés. Ces transactions ont toutes été traitées par des banques. En
2013, 681 millions de dollars sont apparus sur le compte personnel du Premier
ministre malaisien, Najib Razak, qui était aussi jusqu’il y a très peu de
temps le président d’1MDB. Najib a nié toutes les accusations portées contre
lui – cette somme aurait été un cadeau de la famille royale saoudienne. En
janvier, l’avocat-général de la cour malaisienne, Mohamed Apandi Ali, l’a
disculpé de toute accusation de corruption et d’acte criminel.
Selon Reuters :
L’Autorité monétaire de
Singapour se penche sur certains aspects des opérations de ces banques, et
cherche notamment à déterminer si elles connaissaient l’identité de leurs
clients et d’où provenaient les fonds, et si elles se sont avérées
suffisamment vigilantes dans leur contrôle des personnes politiquement
exposées telles que des membres de gouvernements et de banques.
L’Autorité monétaire discute
actuellement avec les banques, et devrait faire une annonce publique dès que
son enquête sera terminée, ont expliqué des sources. Les détails ne l’enquête
ne sont pour le moment pas connus.
UBS a été impliquée dans
toutes sortes de scandales bancaires tout autour du monde, notamment avec le
FBI, la SEC et l’IRS aux Etats-Unis, et ce à compter de 2005. Selon un
informateur, la banque aurait fourni des services d’évasion fiscale aux
citoyens de nombreux pays. UBS a fini par verser quelques amendes. D’autres
scandales ont ensuite fait surface, les uns à la suite des autres, avec
notamment ceux du marché des changes et du Libor. UBS a aussi versé des
amendes pour ces dernières affaires.
Un nouveau scandale ne pouvait
donc qu’être attendu, notamment parce que ces transactions ont probablement
eu lieu très récemment, après que de nombreux autres scandales ont déjà été
rendus public.
Falcon Private Bank appartient
à un fonds souverain basé à Abu Dhabi, appelé International Petroleum
Investment Company (IPIC). Coutts International appartient à une banque
suisse, Union Bancaire Privée.
DBS Group, anciennement
Development Bank of Singapore, est une banque multinationale qui possède 330
milliards de dollars d’actifs, ou 75% du PIB de Singapour. Si cette banque
s’effondre, les finances de Singapour sont cuites.
UBS, Coutts et DBS ont refusé
de commenter. Falcon, qui a autrefois déclaré coopérer avec l’Autorité
monétaire de Singapour, a annoncé ceci à Reuters : « Nous avons
partagé notre point de vue avec transparence, et n’avons rien à
ajouter ».
Singapour, de loin le centre
financier le plus opaque au monde, subit des pressions internationales – et
pas seulement de la part des Etats-Unis. De nombreux pays cherchent à lever
le voile sur ces obscurs flux monétaires.
En 2013 par exemple, le
Ministre français du budget, Jérôme Cahuzac, a été forcé de démissionner
après que les médias ont rapporté – chose qu’il a d’abord nié avant de
plaider coupable – qu’il aurait caché 600.000 euros de revenus aux autorités
fiscales françaises grâce à un compte ouvert en Suisse puis, quand les
régulations sur le secret bancaire ont commencé à vaciller dans le pays, à un
compte ouvert à Singapour. Il était censé faire l’objet d’une poursuite
judiciaire en février de cette année (et qui aura finalement lieu en
septembre).
Ces transactions ont toutes
été traitées par des banques. Mais le scandale d’1MDB est tel que le trou ne
cesse plus d’être creusé. Reuters :
La récente enquête née de la
décision prise par l’Autorité monétaire de Singapour à la fin mai de mettre
fin aux opérations de la banque privée suisse BSI AG à Singapour pour des
raisons de violation des régulations anti-blanchiment d’argent représente la
première action prise contre une banque en 32 ans. L’Autorité monétaire de
Singapour a alors annoncé que certains employés de BSI avaient commis des
fautes graves, et que les opérations de la banque avaient été très mal
gérées.
A l’époque, l’Autorité suisse
de supervision des marchés financiers a annoncé, comme l’a rapporté Reuters,
que « BSI a commis de sérieuses violations des régulations contre le
blanchiment d’argent au travers de ses relations commerciales et de
transactions liées au scandale de corruption concernant 1MDB ».
Les autorités de Singapour
savaient certainement depuis des années que ce genre de comportement faisait
partie des pratiques des banques privées. Mais elles subissent maintenant des
pressions internationales et se trouvent forcées d’enquêter sur les
transactions liées au blanchiment d’argent, à l’évasion fiscale et aux
sanctions internationales. Elles n’ont plus d’autre choix que de donner une
tape sur les doigts des banques comme UBS, afin qu’à l’avenir, elles en
fassent un peu plus pour ne pas se faire attraper aussi facilement.
Non
pas que le Département américain de la Justice soit un modèle à suivre en
termes de punitions imposées aux banques violation des régulations contre le
blanchiment d’argent. HSBC s’est noyée jusqu’au cou et s’en est sortie avec
de simples amendes – qui sont pour elle un simple coût d’opération. Rien
d’autre ne s’est passé. Voici les résultats d’une enquête de trois ans menées
par la Chambre des représentants quant à la décision du Département de la
Justice de ne pas aller plus loin dans ses sanctions : … Congress: “Too Big to Jail: Inside the Obama Justice Department’s
Decision Not to Hold Wall Street Accountable”