La
conjugaison des tensions politiques internes allemandes, de la tentative du
gouvernement grec d’obtenir un délai de grâce de deux ans
pour son plan de sauvetage et de la poursuite qui va vers sa fin du
dérapage espagnol, rend en cette rentrée
l’équation du sauvetage européen encore plus
problématique. L’intervention de la BCE afin qu’elle
concrétise ses intentions et joue les sauveurs est d’autant
attendue, le risque étant qu’elle mette de l’eau dans son
vin.
Les
tentatives d’entraîner un gouvernement allemand qui freine des
quatre fers ont fait long feu. Celui-ci est pris dans une contradiction et se
refuse à sauter le pas, ne pouvant espérer tirer seul son
épingle du jeu mais ne voulant pas se résoudre à risquer
davantage. Les compromis européens successifs passés a minima dans l’urgence au fil des crises qui se
succèdent ne règlent rien. Moins d’ailleurs parce
qu’ils ne mobilisent que des moyens financiers limités que parce
qu’ils continuent à nier la nature même de la crise qui se
poursuit et qu’ils ne parviennent pas à endiguer.
Elle
se résume à une simple constatation : les États et le
système financier sont conjointement insolvables et ont perdu la
maîtrise de la gestion de leurs dettes. La dette publique étant
connue et scrutée sous toutes ses coutures, une étude de PriceWaterhouse vient d’apporter un
éclairage sur celle des banques européennes. Selon elle,
celles-ci avaient enregistré dans leurs comptes mille milliards
d’euros de crédits non performants fin 2011, soit le
double de fin 2008. Une augmentation ayant principalement son origine en
Grèce, en Espagne et en Italie.
L’appel
à une intervention massive et magique de la BCE, qui seule a les
moyens de faire face, ne vaut-il pas reconnaissance implicite d’un
problème qui ne peut pas être avoué, car il a comme
solution une restructuration à grande échelle de la dette ?
Tous
les montages financiers alambiqués qui se succèdent
procèdent d’une autre logique et tendent à refinancer la
dette grâce à de nouvelles dettes et à diminuer leur
risque en les garantissant grâce à une mutualisation qui repose
sur un noyau dur qui se restreint. Le débat porte sur la
séquence et le calendrier des réformes qui permettraient de
conforter ce processus, ce dont il a bien besoin. Mais, en imposant des
préalables qui repoussent les échéances, la position
allemande se révèle irréaliste au regard de la dynamique
de la crise.
En
cherchant à imposer un modèle de vertu budgétaire et de
croissance économique reposant sur l’exportation, le
gouvernement allemand défend une stratégie collectivement
injouable. Dans le premier cas, il précipite la zone euro dans la
récession, faisant obstacle à son désendettement, dans
le second il se condamne à enregistrer le rétrécissement
de ses marchés et de son activité économique.
Les
deux versions de la stratégie de désendettement qui sont en
discussion ne diffèrent que par le rôle plus ou moins grand
accordé à la BCE et ont en commun leur irréalisme.
Il
est symptomatique que la BCE n’envisage une nouvelle intervention
qu’en donnant des gages au marché; sous la forme
d’un abandon de sa priorité de remboursement (seniorité) en tant que créancière. A
l’opposé des restructurations de la dette publique et les
dépréciations qui s’imposent au sein du système
bancaire.
Autre
expression de cette même logique d’enfermement, le gouvernement Rajoy tente actuellement de trouver une solution pour
dédommager tous les petits investisseurs ruinés après
avoir été incités à acheter des produits
financiers destinés à renflouer les banques espagnoles, mais
des investisseurs avisés menacent de s’engouffrer dans
cette porte au nom de l’égalité de traitement…
Cette
statue doit être déboulonnée.
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