Au risque de
déplaire à nos lecteurs, le fait est qu’il n’est
pas évident que ces mentions soient vraiment utiles. Elles nuisent
à l’efficacité des marques et créent un dangereux
précédent qui nous emmène tout droit vers ce qu’il
est maintenant coutume d’appeler le paquet générique ou
paquet neutre.
Qu’est-ce que le paquet neutre ou
générique ?
Il
s’agit d’une idée de réglementation au niveau
européen visant à interdire aux entreprises
d’utiliser des
représentations graphiques (logo, dessin, couleur ou tout autre signe
distinctif) faisant référence à une marque et permettant
de différencier leurs produits. Il s’agirait, par exemple de
faire disparaître totalement le colonel de la marque de fast food KFC ou le Marlboro
des paquets de cigarette du même nom.
Les marques
ciblées sont principalement celles qui ont trait à un produit
jugé mauvais pour la santé comme le tabac, l’alcool, les
produits trop sucrés, trop salés ou trop gras.
Pourquoi parler de
précédent en la matière ?
Cette
idée de paquet neutre est en fait l’aboutissement d’une
logique maintenant bien ancrée. Elle consiste à obliger les
marques à consacrer une partie de plus en plus grande de la surface de
leur packaging à l’inscription de messages sanitaires ou
d’images-choc. Du « fumer tue » aux différents
messages du programme national nutrition santé crée en 2001,
ils prennent de plus en plus de place et conduisent à terme à
un effacement des marques.
N’est-ce pas quand même un
moindre mal pour lutter contre les problèmes de malbouffe.
C’est
bien ce qu’on a envie de croire. Sauf que l’efficacité
sanitaire de cet effacement des marques est loin d’être
évidente et qu’il va – au contraire – susciter
nombre d’effets pervers.
Contreproductif pour la santé
Une telle
politique ignore en fait qu’en matière de consommation, la
souveraineté du consommateur prime. De deux choses l’une. Soit
les consommateurs arrivent encore à distinguer leur marque
préférée et la destruction des marques s’est
avérée inutile. Soit, ils n’y parviennent plus et on
risque de voir apparaître un processus de substitution en faveur de
produits moins chers et pas forcément d’aussi bonne
qualité.
Un Exemple
On a en la
matière un exemple grandeur nature du côté de la
Californie dans les années 90. Alors que les cigarettes sans marque
ont, à l'époque, fait une percée, leur part de
marché passant de 11 à 40 % entre 1988 et 1993 avec des prix de
20 % à 50 % moins élevés, il y eut une augmentation du
taux d'initiation au tabagisme parmi les 12‐17 ans (...) Il n'y eut aucune
réduction perceptible dans le nombre des personnes arrêtant de
fumer.
Moralité, il faut sauver les
marques
On ne
s’en rend peut-être pas facilement compte mais elles jouent un
rôle crucial dans notre monde complexe.
La gestion d’une
marque par une société l’oblige à être
responsable et à agir constamment en faveur des clients, afin que leur
verdict reste positif.
Il suffit d’un
défi mal géré pour que des années de travail
s’envolent. La sanction du marché peut être
impitoyable et les entreprises le savent bien. En parallèle, les
récompenses en termes de parts de marché sont aussi une puissante
incitation à faire mieux que les concurrents, à les devancer,
à innover pour offrir des produits moins chers et/ou de meilleure
qualité aux consommateurs.
Bref, la marque, loin
d’être notre ennemi, est le gage que son propriétaire va
chercher à satisfaire ses clients dans la durée. C’est
pourquoi les entreprises investissent des milliards chaque année dans
cet actif intangible que constitue leur réputation. La marque
McDonald’s vaudrait ainsi 95,2 milliards de dollars et Coca-Cola 74,3
milliards, avec respectivement plus de 27 et 61 millions de fans sur
Facebook. Leurs propriétaires ont tout intérêt à
gérer de façon responsable ce capital et il faut qu’ils
puissent continuer à la faire librement
|