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SUR QUELLE EXOPLANETE SONT-IlS ?

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Published : February 25th, 2013
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Category : Editorials

La tentative de lancer un nouvel acronyme pour rejoindre celui des PIGS tourne court. L’idée était de dénommer FISH (poisson, en anglais) le nouvel ensemble de pays à problèmes composé de la France, l’Italie, l’Espagne et la Hollande. Mais si l’on en croit la Commission qui vient de publier ses prévisions révisées, c’est à nouveau toute la zone euro qui se porte très mal.

Rien ne va plus et cela tient en trois données : la poursuite de la récession avec une baisse du PIB de 0,3% en 2013, la réduction plus lente que voulue des déficits publics, et l’approfondissement du chômage dont le taux devrait atteindre 12,2%. Ces données valables pour la zone euro ne sont que des moyennes et cachent des disparités parfois importantes, mais l’on sait que la contagion est très forte au sein du marché unique.

Selon la Commission, le taux de chômage va atteindre 27% en Grèce et en Espagne, où la récession s’approfondit et les prévisions de réduction du déficit déraillent à nouveau, en dépit d’objectifs déjà remaniés. Mariano Rajoy a eu le front d’affirmer qu’il avait « sauvé le pays du naufrage » alors qu’il continue de rouler la dette publique et de financer les déficits à des taux toujours très élevés, chargeant d’autant la barque pour ne pas demander un plan de sauvetage qu’Angela Merkel ne souhaite pas assumer dans cette période électorale.

Bien entendu, 2014 est paré des plus beaux atours, la Commission prétendant contre toute évidence que, pour la zone euro, « la demande intérieure devrait prendre le relais comme principal moteur pour renforcer la croissance » dans ce contexte de récession et de rigueur. Des ajustements du calendrier de réduction du déficit sont dans les tuyaux, dans le cadre de négociations communautaires qui s’annoncent comme un marché de dupes : il va falloir donner des garanties côté réformes structurelles en contrepartie de l’obtention de délais, tandis que, piètre travestissement, la rigueur ne dit pas son nom mais ses mesures s’accumulent. En particulier en France, où l’on est entré dans le vif du sujet. A l’échelle européenne, Olli Rehn a déploré que les analyses du FMI à propos du multiplicateur budgétaire – ce biais trouvé pour contester la stratégie de désendettement désastreuse qui se poursuit – « érodent la confiance que nous avons péniblement reconstruite ». Dans quelle exoplanète qui sera bientôt découverte ces gens vivent-ils donc ?

Moody’s vient de dégrader la note du Royaume-Uni, suscitant la réaffirmation par George Osborne, le chancelier de l’échiquier, de la politique du gouvernement britannique : « Ce soir, nous avons droit à un sévère rappel des problèmes de la dette auxquels est confronté notre pays. C’est également un avertissement très clair à quiconque penserait que l’on peut se soustraire au règlement de ces problèmes ». »Loin d’affaiblir notre détermination à mettre en œuvre notre plan de relance, cette décision la redouble. Nous poursuivrons la mise en œuvre de ce plan qui a réduit le déficit d’un quart et nous a permis d’avoir des taux d’intérêt très bas et un nombre record d’emplois » (et qui replonge au contraire le pays dans la récession.)

Autre signe significatif rendu public dans une journée décidément morose, les banques remboursent bien moins que prévu par les analystes les crédits du LTRO de la BCE. Sur les 987 milliards d’euros de crédit à trois ans accordés en deux vagues il y a un an, 198 milliards sont à ce jour remboursés par anticipation, soit environ 1/5 ème. Le secret entoure la liste des banques y procédant, ainsi que les montants remboursés, il est donc difficile d’interpréter ce qui ressort de l’application d’un principe de précaution – notamment en raison de la situation italienne très incertaine après l’épisode Monti – ou du besoin que les banques ont de garder des liquidités à très faible coût. Selon Barclays, toutefois, les banques italiennes n’auraient pas participé aux remboursements, mais l’opacité règne toujours autant. Le Wall Street Journal a publié le 20 février un article à cet égard fort bien documenté l’illustrant : « Les banques [européennes] recalculent les risques associés à leurs portefeuilles de prêts commerciaux et carnets d’ordre d’une manière flatteuse, ce qui a pour effet d’augmenter leur ratio du capital rapporté au risque pondéré de leurs actifs, une mesure que les investisseurs et les régulateurs utilisent pour évaluer les capacités des banques à absorber des pertes inattendues. »

Joaquim Almunia, le commissaire à la concurrence, a de son côté mises celles-ci en garde, constatant leurs réticences à collaborer dans l’enquête à propos des manipulations du Libor et de l’Euribor, réfutant ce qu’elles considèrent être des allégations infondées de leur mauvaise conduite ! « Si des pratiques collusives sont avérées, il s’agira d’une sérieuse atteinte au développement d’une concurrence saine sur les marchés financiers » a-t-il averti. La commission veut donc alourdir les amendes et le commissaire précise que l’existence de cartels de banques et de courtiers est suspecté, et qu’il n’est pas envisagé de traiter avec les banques une par une, comme c’est jusqu’à maintenant le cas aux États-Unis et au Royaume-Uni. On verra la suite.



Billet rédigé par François Leclerc


Son livre, Les CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de paraître


Un « article presslib’ » est libre de reproduction numérique en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.


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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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