Apres 34 mois, la crise des dettes publiques des États-membres
mal gérés de la zone euro est toujours là.
Tout porte à croire que ni les gouvernements,
ni la Banque centrale européenne (BCE) ne sont en mesure de faire quoi
que ce soit pour apaiser les craintes justifiées des créditeurs
et faire baisser le taux d’intérêt de leur dette.
C’est le moment qu’a choisi le World Gold Council –
l’association représentative des industries aurifères
– pour lancer une nouvelle idée : pourquoi ne pas commencer
à utiliser l’or pour faire baisser ces taux
d’intérêt ?
10 000 tonnes
d’or dans les coffres des États-membres
On estime que les États-membres de
la zone euro disposent d’environ 10 000 tonnes de réserves
d’or. L’Italie et le Portugal, deux États parties
prenantes de la crise actuelle, possèdent une portion significative de
ces réserves.
Sans surprise, cette situation a amené
certains à suggérer qu’il serait peut-être temps
pour les gouvernements des États-membres en difficulté de penser à
vendre une partie de leur réserve d’or. La valeur de l'or a
grimpé en flèche au cours des dernières années et
ces États
ont un besoin immédiat d’une manne inattendue.
Mais le World
Gold Council estime que ce serait une erreur. En dehors du fait
qu’une vente massive d’or orienterait le prix de l’or
à la baisse – ce qui irait à l’encontre de
l’intérêt matériel des industries aurifères
– la crise des dettes publiques de la zone euro est devenue si importante
qu’un tel choix ne ferait qu'effleurer la surface du problème.
En effet, les réserves d'or des États-membres
en crise (Portugal, Espagne, Grèce, Irlande et Italie) ne
représentent que 3,3% de la somme des dettes publiques de ces États
– sans même y inclure les dettes de leurs collectivités
territoriales.
L’idée :
des obligations souveraines adossées sur l’or
Selon le World Gold Council, mieux
vaudrait titriser une partie de ces réserves
d’or par l'émission d'obligations d'État basées
sur l'or. Cela pourrait se faire d'une manière uniforme, ou en
incluant des tranches de risques différents.
Le point important est que l'or serait
utilisé afin de fournir une sécurité
supplémentaire aux obligations d’État,
susceptible de rassurer les investisseurs qui n'ont plus confiance dans le
bilan des États en difficulté.
Ce système a été utilisé
à plusieurs reprises par le passé. Dans les années 1970,
l'Italie et le Portugal ont utilisé leurs réserves d'or comme
garantie pour obtenir des prêts de la Bundesbank, de la Banque des
règlements internationaux et d'autres créanciers.
Que penser de cette proposition ? Sa mise en
place serait positive pour l’industrie aurifère – du moins
à moyen terme. Elle permettrait surtout à certains États-membres
en difficulté de gagner du temps pour se reformer.
Il existe cependant un obstacle juridique
sérieux à la mise en pratique de cette proposition. Ce sont
les banques centrales européennes qui possèdent ces
réserves d’or – pas les États.
La croissante désirabilité
relative de l’or
Les investisseurs devraient toutefois prendre note
de cette proposition car, même si elle demeure juridiquement infaisable,
elle n’en est pas moins révélatrice.
Prenons du recul. Il y a dix ans, la majorité
des investisseurs n’aurait jamais envisagé l’or comme collatéral.
Mais ces derniers mois, des institutions comme LCH.Clearnet, ICE et le Chicago Mercantile Exchange ont commencé à accepter
l'or comme garantie pour les opérations sur dérivés. Cet
été, le Comité de Bâle sur le contrôle
bancaire a publié un document qui suggère que l'or devrait
être l'un des six éléments utilisés comme garantie
pour les opérations sur dérivés, au même titre que
les bons du Trésor.
Il ne s’agit pas d’une révolution,
encore moins d’une étape vers la réapparition de l’étalon-or.
Mais cela montre qu'une lente évolution des
mentalités est en cours : l’or n’est peut-être pas
devenu plus désirable en lui-même, ce sont les autres classes
d’actifs – comme par exemple les bons du Trésor –
qui apparaissent de moins en moins sûres aux yeux des investisseurs.
|