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Tranche de mauvaise vie

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Published : January 13th, 2011
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Category : Editorials

 

 

 

 

La vie des banques est passionnante, la suivre ne l’est pas moins.


Aux Etats-Unis, on apprenait ainsi que deux cadres supérieurs de Goldman Sachs étaient en train de réunir des fonds afin de constituer un nouvel hedge fund, présenté comme indépendant de la banque et qui sera basé à Londres. Plus précisément, ce sont les responsables de Goldman Sachs Principal Strategy desk (GSPS), la plus lucrative des divisions internes, qui ont trouvé – pour commencer – 300 millions de dollars auprès d’un important hedge fund suédois, Brummers & Partners. Celui-ci va également prendre une participation dans la nouvelle structure, dont le nom n’a pas encore été rendu public.


Cette opération succède à d’autres de même nature, effectuées au fils des ans par d’autres cadres de GSPS, mettant cette fois-ci un point final à l’activité spéculative sur fonds propres de Goldman Sachs, désormais interdite par la loi Dodd-Frank. Sans que l’on puisse clairement établir de liens financiers entre ces hedge funds et l’ancien employeur de leurs managers, tout en enregistrant la confirmation que, comme annoncé, l’interdiction des activités sur fonds propres (proprietary trading) allait inévitablement renforcer ce qui est appelé aux Etats-Unis le shadow banking, la banque de l’ombre.


Morgan Stanley, pour ne pas être en reste, vient d’annoncer qu’elle a signé un accord avec les salariés de sa division en charge de la même activité, pour la leur vendre.


La même mégabanque, ainsi que JP Morgan Chase, viennent d’obtenir de la Commission chinoise de régulation des opérations en bourse l’autorisation de créer des co-entreprises avec des maisons de courtage chinoises. Elles rejoindront Goldman Sachs, Deutsche Bank et le Crédit Suisse, qui les ont précédés. Les mégabanques du monde entier se précipitent toutes sur le marché chinois, afin de participer au développement des marchés d’actions et d’obligations, ainsi qu’aux expérimentations de produits plus sophistiqués. Il ne faut pas être en retard pour prospecter ce nouvel Eldorado, où l’on apprends à jouer dangereusement avec les allumettes.


A chacun son paradis artificiel. La Société Générale va dans cet esprit installer à New York une filiale de Société Générale Private Banking. Comme son nom l’indique, cette structure sera dédiée à la gestion de fortune, plus discrètement appelée gestion de patrimoine, pour rester entre gens biens et de biens. Il est dans les ambitions de la Société Générale – qui a d’ailleurs intitulé son plan de développement Ambition 2015 – de doubler son chiffre d’affaires dans cette activité, anticipant d’audacieuses prévisions selon lesquelles les riches allaient devenir plus riches.


Chaque pays a ses traditions bancaires et ses points forts. C’est ainsi que vient de réapparaître à Moscou un célèbre russe, élu à la Douma puis pensionnaire d’un établissement pénitencier pendant quatre petites années, pour fraude fiscale. Son patronyme est Sergueï Mavrodi, célébré pour être l’auteur d’une gigantesque pyramide de Ponzi en 1994, qui s’est brutalement effondrée. Un bâtisseur émérite qui avait négligé quelques petits défauts structurels de construction, dont ont pâti des centaines de milliers de russes. Ayant payé sa dette à la société, et non pas à ses victimes, il vient d’annoncer la création d’un nouveau « réseau financier » … jurant qu’il ne toucherait pas à l’argent « d’un seul doigt », reconnaissant ainsi qu’il l’avait auparavant fait par poignées. Comment dit-on pigeon en Russe ?


D’autres activités bancaires menacent elles aussi de s’écrouler sous le poids d’un système pyramidal toujours en cours d’effondrement. Le secteur des banques régionales a déjà connu des centaines de faillites, mais il est à la recherche de nouveaux moyens pour tenter de consolider des centaines de milliards de dollars de prêts commerciaux hypothécaires proches de faire défaut. On a paré jusqu’à maintenant au plus pressé, en repoussant l’échéance des prêts, mais cela ne va plus être possible, car 1.500 milliards de dollars d’en-cours vont arriver à maturité dans les 4 prochaines années. Les 100 plus importantes banques régionales en taille de bilan ont 25% de ce type d’actifs en portefeuille, selon les spécialistes. Le marché est grand ouvert : on va voir se multiplier les acquisitions de banques, aboutissant à une nouvelle concentration, les acquéreurs achetant à la fois ces actifs douteux et les activités de dépôt sur lesquels ils lorgnent.


Un tel rapide tour du monde bancaire occidental serait totalement incomplet s’il n’était fait une escale à Londres. Une audition sur la question des bonus devant une commission des Communes de Bob Diamond, le nouveau patron de Barclays, allant y laisser quelques traces. Soumis à un feu roulant de questions de parlementaires de tous bords, celui-ci n’avait voulu promettre plus – devant tant de véhémence – que de faire « tout son possible pour encourager à la retenue » sur la question des bonus, se déclarant « sensible à l’opinion publique ». Sans toutefois aller jusqu’à remettre en cause son propre bonus, estimé selon la presse à 9,6 millions d’euros.


Les bonus distribués par les banques britanniques devraient cette année atteindre 8,4 milliards d’euros au total. Une somme justifiée, selon un argument désormais classique et employé par Bob Diamond, puisqu’il s’agit ni plus ni moins que « d’attirer et retenir les meilleurs talents » à la City. David Cameron, le premier ministre, a été sensible a l’argument, puisqu’il a remisé les projets d’impôt spécial sur les bonus, que les travaillistes avaient mis en place à titre provisoire et que les LibDem auraient aimé voir réintroduits. Selon le Times, il aurait donné « à contre-coeur » son feu vert aux bonus des banquiers, c’était bien le moins.


Il ne faudrait pas tirer de leçons prématurées de ces informations glanées au fil de l’actualité ces derniers jours. Mais simplement noter le tour que prennent les choses, dans ce monde éthéré de la finance…




Billet rédigé par François Leclerc


Paul Jorion

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

   

 

 

 

 

 

 

 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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