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son numéro d’équilibriste en charge des services
financiers, le Commissaire européen Michel Barnier vient de
déclarer à propos des banques : « Je ne veux pas parler
de mauvaise foi, mais d’un manque de bonne volonté, à
coup sûr ». Il ne s’agissait que de la tarification de
leurs services, qui manque selon lui de clarté, et pour laquelle on
légiférera. Elargissant ses travaux au monde du shadow banking en
lançant une vaste consultation, il a cru devoir expliquer : « je
ne fais pas de procès d’intention, je ne mets pas en accusation
les acteurs de ce secteur parallèle qui peut permettre une
diversification utile des sources de financement ».
De
quoi s’agit-il cette fois-ci ? D’identifier les risques qui
pourraient provenir de ce secteur mal inventorié et non
régulé du monde financier, afin de les prévenir.
Première question posée, qui en dit long sur le travail
à accomplir : établir une définition de ce qui
caractérise ces institutions non bancaires, parmi lesquelles on range
les fonds d’investissements et monétaires, les
sociétés de financement et entités
spécialisées ainsi que les compagnies d’assurance ou de
réassurance qui émettent ou garantissent des produits de
crédit. Ainsi que de nombreuses curiosités pudiquement
cachées derrière un paravent, que l’on ne nomme
même pas.
Engagées
via la publication d’un « livre vert », ces consultations
s’inscrivent dans le cadre des travaux confiés par le G20 au
Conseil de stabilité financière. Le présentant, Michel
Barnier a multiplié les précautions oratoires, en insistant :
« Je n’ai pas de guerre à mener contre ce système,
je veux simplement qu’il soit ramené dans le champ de la
régulation et de la transparence ». On enregistre la promesse.
Que
n’a-t-il écouté son collègue Lord Turner, en
charge du Financial services authority (FSA)
britannique ! Cela aurait pu le mettre sur une piste prometteuse, afin de
prendre en considération que le shadow banking « n’est pas quelque chose de
parallèle et de séparé du coeur
du système bancaire, mais est au contraire étroitement
interconnecté avec celui-ci », en tirant comme
conséquence que « nous devons nous assurer que notre
réponse en termes de régulation constitue une réponse
appropriée au shadow banking et aux banques à la fois ».
Cette fois-ci, a poursuivi Lord Turner, « nous devons être
certains d’aller véritablement au fond des choses, et ne pas
nous leurrer en pensant que les réformes que nous mettons au point
feront que ce système sera une fois pour toutes sans risque ».
L’approche
que défend Lord Turner est a priori plus prometteuse,
puisqu’elle privilégie les produits financiers tout autant que
les structures, avertissant que « tout système aussi complexe
[que la titrisation] défiera toujours une parfaite
compréhension ». « Nous ne devrons pas tirer comme conclusion
de la disparition de certains indicateurs de l’activité
parallèle que tous les risques ont disparu pour autant » a-t-il
enfin averti.
«
A Bruxelles nous ne sommes pas stupides », a rebondi Joaquin Almunia, le Commissaire chargé de la concurrence,
à propos du nouvel objectif de réduction du déficit qui
a finalement été consenti, non sans une dure bataille publique.
« Nous savons que les objectifs d’ajustement budgétaire ne
peuvent être inamovibles si les perspectives de croissance changent,
comme cela s’est passé dans le cas de l’Espagne »
a-t-il fort tardivement reconnu, après avoir auparavant
prétendu qu’il n’était pas question de revenir sur
les objectifs initiaux. A l’écouter, le gouvernement espagnol
aurait pu l’obtenir autrement, « sans faire autant de bruit et en
faire un défi ». Tout en maintenant que « ce n’est
pas vrai qu’en faisant moins de coupes on résoudra les choses.
Un moindre effort aggraverait les autres problèmes ».
Que
n’a-t-il lu l’interview accordée au quotidien grec Kathimérini par Jean-Claude Juncker, qui multiplie
les propos déviants ! « Je crois qu’on n’a pas
suffisamment mis l’accent sur la dimension croissance à propos
de la Grèce. Nous avons surtout insisté sur l’assainissement
des finances publiques sans offrir d’alternative ou de laisser un choix
à la Grèce (…) Nous nous sommes montrés durs quant
à l’assainissement des finances mais très laxistes quant
à l’autre paramètre important, celui de la croissance ».
Il
a conclu en remarquant qu’il aurait été « plus
logique de mettre dès le début l’accent sur la croissance
(…) la Grèce traversant maintenant sa cinquième
année de récession ». On apprenait à ce propos ce
lundi dans le rapport annuel de la banque de Grèce que le PIB devrait
selon les estimations actuelles chuter de 4,5%.
Ce
survol de déclarations glanées sur les fils des agences de
presse serait incomplet s’il n’était fait état,
toujours dans le domaine de la clairvoyance du propos et de la qualité
de l’analyse, des déclarations de Gary Locke,
l’ambassadeur des États-Unis en Chine. Celui-ci vient à
nouveau de s’élever contre les pratiques commerciales
discriminatoires dont souffrent les entreprises américaines,
regrettant également « les distorsions que nous estimons
injustes en matière monétaire ». Une pratique
qualifiée aux Etats-Unis même de manière moins
diplomatique de « manipulation des cours du yuan ». Elles font en
conséquence obstacle à l’essor des exportations
américaines et sont à l’origine du déséquilibre
commercial que connait le pays, considère-t-on au niveau officiel. Une
explication qui évite de se poser des questions autrement
dérangeantes sur leur compétitivité intrinsèque.
Que
n’a-t-il pris connaissance du discours prononcé par le premier
ministre Wen Jiabao
devant le Parlement en séance plénière, qui a fait état
de la surévaluation de 30% du yuan par rapport au dollar depuis 2005 !
Billet rédigé par
François Leclerc
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