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Un recul dans l’ordre... des choses

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Published : November 09th, 2012
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Category : Editorials

 

 

 

 

Hier présenté comme la seconde étape de la solution assurée à la crise, le projet d’« union bancaire » bat de l’aile sous les assauts répétés du gouvernement et des représentants des banques allemandes. Le rôle central de la BCE dans la supervision du système bancaire européen est certes formellement maintenu au fil des interventions publiques, mais il est en réalité dénaturé, au prétexte d’une coordination avec les superviseurs nationaux dont l’articulation fait tout le sel.

Selon la dernière version disponible du document la décrivant – en provenance de la présidence chypriote de l’Union européenne – la BCE ne garderait sous sa supervision directe que quelques grandes banques nationales ainsi que celles ayant reçu une aide financière du MES. Dans cette même logique, il serait question de modifier le nom du dispositif, qui deviendrait « Système européen de supervision bancaire » au lieu de « Mécanisme unique de supervision »…

Mais le recul ne s’arrête pas là. S’adressant à une assemblée de banquiers mutualistes allemands, Mario Draghi vient de leur déclarer que « l’union financière n’impliquera pas la mise en commun des mécanismes de garantie des dépôts, une question qui est comme je le sais une préoccupation dans ce pays. Leur organisation et financement restera sous responsabilité nationale, selon des modalités comparables. » Gerhard Hofmann, l’un des responsables de l’organisation qui regroupe ces 1.100 banques mutualistes, lui a plaisamment répondu : « je suis d’accord avec M. Draghi que nous ne nous pouvons actuellement avoir pour objectif de créer un programme européen de garantie des dépôts », ajoutant qu’il était très important « d’intégrer les superviseurs nationaux dans le système de supervision de l’eurozone ».

Cet abandon des intentions initiales a comme importante incidence de supprimer l’obstacle qui devait empêcher le renouvellement des sorties massives de capitaux, notamment leur refuge en Allemagne !

Quelle surprise ! les deux dispositifs destinés à contenir la crise de la dette européenne – pacte budgétaire et union bancaire – ne sont pas soumis exactement au même régime de surveillance et d’intervention, selon qu’il s’agit de la dette publique ou privée. Dans ce dernier cas, les autorités nationales gardent dans la pratique la haute main sur la supervision de leurs banques et s’assurent que celles-ci n’auront pas à mettre la main à la poche pour créer un fonds de garantie européen.

Quand au deuxième volet de ce fonds européen, le renflouement des banques qui devait être financé par leurs soins, on n’en parle même plus ! Il est vrai que le principe d’aides directes aux banques du MES – c’est à dire par les Etats – a été adopté, quand bien même son application est repoussée à on ne sait quand. Même le très modeste projet de la Commission qui consiste à coordonner (et non pas harmoniser) les modalités des fonds nationaux de garantie des dépôts et à faciliter les prêts entre des dispositifs nationaux d’intervention n’avance pas.

Le projet de relance de l’intégration européenne est mal parti. Prochains épisodes à suivre : la transposition européenne de la réglementation Bâle III et les avatars du projet de séparation des activités de marché et de dépôt des banques, une fois qu’il aura été passé à la moulinette. Le projet français sera présenté au conseil des ministres le 19 décembre prochain.

Heureusement, il n’y a pas que de mauvaises nouvelles à annoncer. « La guerre est finie, on repart de l’avant, on croît » s’est hier exclamé Lars Machenil, le directeur financier de BNP Paribas, au cours d’une conférence téléphonique avec des analystes financiers tenue sur le thème « Nous sommes totalement de retour aux affaires ! ». Le cours de l’action a immédiatement grimpé.

 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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