In the same category

Un système qui marche totalement en crabe

IMG Auteur
Paul jorion.
Published : February 05th, 2010
1149 words - Reading time : 2 - 4 minutes
( 0 vote, 0/5 )
Print article
  Article Comments Comment this article Rating All Articles  
0
Send
0
comment
Our Newsletter...
FOLLOW : Fmi Strauss Kahn
Category : Editorials





Ce texte est un « article presslib’ » (*)


Donald Kohn, vice président de la Fed, a sonné l’alarme vendredi à l’occasion d’une conférence organisée par l’agence gouvernementale FDIC, à Arlington (Virginie). « Emprunter à court terme et prêter à long terme est une stratégie risquée par nature », s’est-il soudainement rappelé, en tirant comme leçon de cette constatation que ceux qui développent ce business (les banques) « doivent être certains que, la relance économique apparaissant, ils ne risquent pas d’être coincés par la hausse des taux d’intérêt … ». Se contentant de mentionner, comme cause de celle-ci, le moment où la Fed modifiera sa politique de très bas taux d’intérêt, ce dont il n’est pas question dans l’immédiat. Nous amenant à nous interroger sur les raisons de l’opportunité de son intervention; sur ce qui pourrait, selon ses propres termes, amener les banques à naviguer dans des « eaux inexplorées » et donc périlleuses.

Paul Tucker, numéro 2 de la Banque d’Angleterre, a également évoqué cette inconnue devant les parlementaires britanniques, la semaine dernière, mais il a été plus explicite. Il s’exprimait dans le contexte de la réunion de la semaine à venir du comité de politique monétaire de la banque centrale britannique – qui pratique le très bas taux de 0,5% – qui va devoir décider ou non de prolonger et d’étendre son programme d’achat des obligations d’Etat (les gilts). Tandis que les milieux d’affaires, craignant un redémarrage de l’inflation, préconisent l’arrêt de ce programme. Prélude, dans un second temps, à l’augmentation des taux de la BoE.

Les craintes qui s’expriment à propos de la capacité des banques à supporter une future hausse des taux sont suffisamment importantes pour avoir fait l’objet d’une réunion à la Banque des règlements internationaux, a révélé Paul Tucker. Un autre facteur poussant à la hausse des taux, sur le marché obligataire cette fois-ci, aurait été pris en compte. Dans l’immédiat celui de la crise grecque, et à terme les effets de la campagne qui s’exerce sur les gouvernements pour qu’ils entament la réduction de leurs dettes. Pouvant aboutir à un surenchérissement général des taux du marché, celui-là même sur lequel les banques seront appelées à lever des capitaux, une fois fermés les robinets à liquidités des banques centrales.

La réunion de la BCE de cette semaine devrait également confirmer, en maintenant ses taux inchangés, que les banques centrales ne sont pas en mesure d’arrêter leurs programmes de soutien aux établissements financiers, craignant qu’ils soient alors exposés et vulnérables à des taux qui ne peuvent que se tendre sur les marchés. La poursuite de la hausse des taux qui se profile n’en resterait pas moins problématique pour les banques, celles-ci ayant d’énormes besoins de refinancement et risquant d’être prises en ciseaux entre les taux qui leur seraient appliqués et ceux qu’elles ont consentis.

Il ne faut donc pas chercher plus loin les raisons de la campagne menée avec virulence à propos des déficits publics. Les banques cherchent ainsi à limiter l’inexorable montée des taux que la progression de la dette susciterait, dont elles feraient les frais. Dans l’immédiat, elles aboutissent à l’effet contraire. Il est donc impératif, pour elles, que les gouvernements présentent sans tarder la note à leurs administrés.

Comme si cette dépendance des banques aux liquidités des banques centrales n’était pas déjà assez significative de la situation hors normes que nous connaissons, illustrant le fait que la machine financière est cassée et n’est pas prête d’être réparée, une autre singularité de celle-ci démontre que nous ne sommes pas en passe de connaître un retour à la normalité. Il est particulièrement flagrant aux Etats-Unis que la relance économique est étroitement dépendante, elle aussi, des plans de relance publics. Le marché immobilier y est totalement tenu à bout de bras par la Fed et par un programme fédéral de prime à l’achat. Les dispositifs de soutien se multiplient, les derniers en date en faveur des petites et moyennes entreprises (pour aider l’emploi), et bientôt des Etats et collectivités locales, pour lesquels le programme intitulé « Build America Bonds » va devenir permanent (l’Etat fédéral prenant en charge environ un tiers des intérêts des emprunteurs). Non seulement la reprise n’est donc pas à mettre au crédit du secteur privé (si l’on exclut l’industrie financière et le secteur pharmaceutique), mais l’Etat est dans la nécessité de bricoler des programmes de soutien financier, ne pouvant plus afficher un nouveau plan global de relance puisqu’il lui est enjoint de réduire son déficit.

Cette situation va être difficilement tenable, exprimant une contradiction d’intérêt montante entre les besoins respectifs du secteur financier et de l’économie. L’Etat est sollicité de tous côtés et sommé en même temps de réduire ses dépenses.

Un projet hors norme se présente cependant, qui pourrait théoriquement offrir une porte de sortie, loin d’être aujourd’hui ne serait-ce qu’entrouverte. Dominique Strauss-Kahn vient en effet d’annoncer à Davos un projet très novateur, s’il est adopté. Il s’agit de la création d’un « fonds vert », destiné à financer la lutte contre les changements climatiques, qui est en cours d’étude. Ce fonds pourrait être doté jusqu’à hauteur de 100 milliards de dollars par an, financé par la distribution de DTS (droits de tirages spéciaux), cet instrument financier dont dispose le FMI. Car celui-ci a depuis sa création comme prérogative de pouvoir créer cette monnaie, uniquement destinée à l’usage des Etats, qui repose sur un panier de devises. Cette annonce intervient aux lendemains de l’échec de la Conférence de Copenhague, à propos de l’aide financière que les pays développés devaient accorder aux pays qui le sont moins, dans le contexte des difficultés budgétaires des premiers, en raison de la crise actuelle. Des consultations seraient prochainement engagées entre le FMI, les banques centrales et les gouvernements.

S’il était permis au FMI de mettre en marche cette mécanique, une boîte de Pandore serait ouverte. Elle ne l’a jamais vraiment été, en raison notamment de l’opposition constante des Américains, mais les temps sont en train de changer. En effet, si les DTS pouvaient permettre de financer la lutte contre les changements climatiques, d’autres objectifs pourraient leur être assigné… On pense, inévitablement, au financement des déficits publics.

Demain sera un autre jour.





Billet rédigé par François Leclerc


               

Paul Jorion

pauljorion.com




(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.


Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).





<< Previous article
Rate : Average note :0 (0 vote)
>> Next article
Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
Comments closed
Latest comment posted for this article
Be the first to comment
Add your comment
Top articles
World PM Newsflow
ALL
GOLD
SILVER
PGM & DIAMONDS
OIL & GAS
OTHER METALS
Take advantage of rising gold stocks
  • Subscribe to our weekly mining market briefing.
  • Receive our research reports on junior mining companies
    with the strongest potential
  • Free service, your email is safe
  • Limited offer, register now !
Go to website.