Le
débat actuel portant sur l’efficacité des plans
d’austérité budgétaire semble avoir perdu toute
trace d’objectivité.
Les
chroniqueurs socialistes estiment que l’austérité
budgétaire ne peut jamais être une solution pour faire repartir
la croissance au sein d’une économie nationale anémique. Les
chroniqueurs conservateurs pensent que ce manque de croissance est la
conséquence de politiques publiques inefficaces.
L’exemple
des Etats baltes réfute ces deux thèses et celui des Pays-Bas
montre la voie.
Reprise spectaculaire de la croissance dans les Etats
baltes dès 2010
L'Estonie
(membre de la zone euro), la Lituanie et la Lettonie (qui ont un taux de
change fixe entre leur monnaie nationale et l’euro), ont émergé
en un temps record de dures récessions avec les taux de croissance les
plus élevés d’Europe.
Le
PIB estonien a ainsi connu une croissance de 8,4% au premier semestre 2011
(6% en Lituanie
et Lettonie).
Cette reprise spectaculaire a débuté à partir de la
deuxième moitié de l’année 2010, alors que les
trois pays baltes avaient été sévèrement touchés par la crise
économique en 2009 (baisse du PIB de 14,3% en Estonie, 18% en Lettonie
et 14,7% en Lituanie en 2009).
Les
Etats baltes ont fortement baissé les dépenses publiques, les
salaires du secteur public et privé et les retraites correspondantes ont
été diminuées, une protection sociale minimale a
été maintenue et les taux d’imposition sont restés bas.
De
2003 à 2010, le revenu réel par habitant de l’Estonie a
augmenté de 18%. A l'heure actuelle, le niveau de production estonien est
revenu à celui de 2006. Ce retour à la croissance s’est
produit de façon beaucoup plus rapide que ce qui avait été
prévu.
Ce modèle de dévaluation interne a ceci
d’intéressant qu’il montre qu’il n’est pas
nécessaire de passer comme l’a fait l’Argentine par la
dévaluation, l’inflation, la répudiation de la dette publique
et l’augmentation des impôts pour retrouver le chemin de
l’enrichissement.
Dans
le cas de la France, ce modèle pourrait cependant être
insuffisant du fait d’un niveau d’endettement très
élevé et d’un marché du travail rigide. Une
réforme du marché du travail est donc nécessaire pour
qu’un pays comme la France sorte durablement de la crise. Cela
n’a rien d’impossible comme le montre l’exemple hollandais
Reformer le marché du travail : l’exemple des Pays-Bas (1982)
La
mauvaise performance économique du pays dans les années 1970 a
poussé les Pays-Bas à entreprendre une série de réformes
du marché du travail qui a abouti à une forte réduction
du chômage.
Ces réformes ont
commencé en 1982 avec un accord entre les syndicats et les employeurs sur
la modération salariale en échange de la création
d'emplois. Cet accord a aboli l'indexation automatique des salaires pour
les contrats futurs mais aussi actuels.
Les gouvernements hollandais successifs
ont aussi mis en œuvre une série de réformes du
marché du travail et des finances publiques qui se sont
renforcées mutuellement :
·
Le salaire minimum a
été réduit de 3% puis gelé pour de nombreuses
années. En 1997, le salaire minimum réel était
ainsi 22% plus bas qu’en 1979. Le salaire minimum des jeunes a
été réduit plus fortement ;
·
Le salaire des
fonctionnaires a été réduit de 3% et gelé de la même
façon, aboutissant à une baisse en terme réel comparable
à celle du salaire minimum ;
·
Les indemnités
chômage et maladie sont passées de 80% à 70% du salaire
et la durée des allocations chômage a été
raccourcie ;
·
Pour soutenir la
modération salariale, les taxes et cotisations sociales payées
par les employés ont été considérablement
réduites. En conséquence, le pouvoir d’achat a considérablement
augmenté, même en l'absence de hausse des salaires
réels ;
·
Pour financer ces
réductions d'impôt, le gouvernement a réduit les
dépenses publiques de 14 points de PIB. Le gouvernement a ainsi réussi
à réduire en même temps les impôts et le déficit
public. Le budget de l’Etat est passé d’un déficit de 6,2% du PIB en 1982 à un excèdent de 2,2% en 2000.
Les réformes ont contribué à une augmentation rapide de
l'emploi à partir de 1984. Cette réduction du chômage a largement
bénéficié aux femmes et aux jeunes. Le taux de
chômage des jeunes est ainsi passé de 25% en 1985 à 6,3% en 2008, le taux le plus bas de
l’Union Européenne.
Quand des chroniqueurs vantent les
vertus théoriques de l’inflation, des hausses
d’impôts et de l’augmentation des dépenses publiques
pour résoudre la crise, les exemples baltes et hollandais montrent
concrètement qu’il est possible de réduire les
dépenses de l’Etat, équilibrer les finances publiques,
baisser les impôts, relancer la croissance et l’emploi –
tout cela en même temps.
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