« Pour
ce qui me concerne, c’est une catastrophe »
Après cinq années de croissance
et de possibilités infinies, une nouvelle classe d’actifs est aujourd’hui en
difficulté – un secteur sur lequel les simples millionnaires ne sont pas
invités à jouer : le marché des œuvres d’art.
La maison de ventes Sotheby’s a
rapporté un déclin de ses revenus de 32% sur le premier trimestre de cette
année par rapport à l’année précédente. Les frais et commissions reçus par l’agence,
qui représentent le plus gros de ses revenus, ont perdu 37%. Ses dépenses ont
grimpé, d’où une perte
d'exploitation de 32 millions de dollars – soit 50 millions de moins que
ses 18 millions de dollars de profits de l’année dernière.
En conséquence de cette
nouvelle, les actions de Sotheby’s ont baissé de 8% pour passer en-dessous de
26 dollars, avant de repartir miraculeusement à la hausse jusqu’à atteindre
28,72 dollars hier à la fermeture des marchés. Elles restent toutefois 38%
inférieures à leur record sur 52 semaines enregistré en juin dernier, et 46%
inférieures à leur record de décembre 2013, alors que les programmes d’assouplissement
quantitatif faisaient encore gonfler le marché de l’art et la richesse de ses
participants.
Une débâcle s’est aussi développée
chez Sotheby’s en termes de ventes d’œuvres d’art. Hier soir à New York, Sotheby’s
a vendu 144,5 millions de dollars d’œuvres d’art modernes et impressionnistes,
soit 61% de moins qu’il y a un an, et sa pire performance depuis 2009.
Sur les 61 lots mis aux
enchères, 21 restent invendus. Seuls 66% des lots offerts ont trouvé preneur.
« Pour ce qui me concerne,
c’est une catastrophe, » a déclaré Todd Levin, directeur du Levin Art
Group à New York. « Il n’est pas suffisant d’obtenir des œuvres, il faut
aussi les vendre. »
Il y a eu certains gagnants,
notamment la sculpture L’Eternel printemps d’Auguste Rodin, qui a été
vendue pour 20,4 millions de dollars, bien plus que les 8 millions estimés.
Mais toutes les œuvres présentées n’ont pas eu un tel succès. Comme le dit
Bloomberg :
Le plus gros perdant de la vente
aux enchères de Sotheby’s a été le tableau d’Andre Derain représentant un
bateau à voile rouge, qui avait été estimé entre 15 et 20 millions de
dollars. Il n’a fait l’objet d’aucune enchère dans la salle des ventes de l’Upper
East Side. Certains Picasso, ainsi que des œuvres de Paul Gauguin et
Pierre-Auguste Renoir on aussi manqué d’intéresser des acheteurs.
« Cela reflète parfaitement
le marché dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui, » a expliqué
Helena Newman, directrice adjointe des œuvres d’art modernes et
impressionnistes chez Sotheby’s. Comme de nombreux autres revendeurs et conseillers,
elle a décrit le marché comme « sélectif ». Pour elle, les
estimations des ventes du mois de juin à Londres « reflèteront ce que
nous avons vu ce soir ».
Les prémonitions d’une débâcle
avaient déjà été rendues évidentes dimanche lors de la vente organisée par
Christie’s et Phillips, la première d’une longue liste d’enchères
semi-annuelles qui auront lieu cette semaine, dont les ventes combinées sont
estimées entre 1,1 et 1,6 milliard de dollars.
Lors des enchères de Christie’s,
seuls 78,1 millions de dollars d’œuvres art d’après-guerre et contemporaines
ont été achetées. Lors de ces mêmes enchères il y a un an, le total des
ventes avait atteint 658,5 millions de dollars – soit huit fois les enchères
de cette année.
Compte tenu des conditions du
marché depuis le début de l’année, les enchères ont été limitées : seuls
39 lots ont été offerts, et tous ont été vendus sauf un. En revanche, selon Art
Net News, « les activités de surenchère au cours de la vente sont
restées léthargiques ».
Les collectionneurs d’art qui
participent à ces enchères sont très riches, et beaucoup ont suffisamment de
liquidités pour ne pas avoir à vendre, à moins qu’ils se trouvent pris dans
un cauchemar financier majeur. Quand le marché commence à tituber, ils
décident – avec les gourous qui les conseillent – d’attendre quelques temps
avant de vendre leur collection, sans quoi ils risqueraient d’accentuer le
déclin sur un marché déjà en baisse, comme l’a expliqué Brett Gorvy,
directeur des œuvres d’art d’après-guerre et contemporaines chez Christie’s.
Phillips, une maison de ventes
qui appartient au groupe russe Mercury Group, a offert 37 lots aux enchères
dimanche. Trois n’ont pas été vendus. Le reste l’a été pour un total de 46,6
millions de dollars, soit moitié moins qu’il y a un an.
« C’est en grande partie
la conséquence d’une contraction du marché, » a expliqué le directeur de
Phillips, Ed Dolman, à Bloomberg.
« Les ventes sont sur le point de décliner sur l’ensemble du marché. »
Ces investisseurs – et leur
appétit pour l’art – ont été battus par certains facteurs
post-assouplissement quantitatif désagréables : volatilité des marchés
des actions qui en a plongé certains dans un marché baissier, ralentissement
du marché immobilier dans certaines grandes villes, effondrement du prix du
pétrole qui affecte particulièrement les oligarques russes, mauvaises performances
des fonds de couverture qui pour certains sont devenus de véritables
évaporateurs d’argent, pertes pour certaines sociétés financières privées…
Ces facteurs semblaient
inimaginables pendant les jours de gloire de l’assouplissement quantitatif,
pendant l’ère aujourd’hui révolue au cours de laquelle les banques centrales
étaient encore considérées omnipotentes et capables de continuer indéfiniment
à transférer du capital entre les mains de ceux qui en avaient déjà le plus.
L’anxiété s’installe aujourd’hui
parmi ces investisseurs qui ont pu devenir très riches au cours des sept
années de ce que Ben Bernanke a qualifié d’ « effet de richesse ».
Ils craignent que ce système ait atteint ses limites, et de voir la réalité –
un terrible concept – reprendre le dessus sur les marchés et les valeurs. Et
cette anxiété les rend frileux.
Le boom des appartements de luxe
de Manhattan s’est déjà transformé en une surabondance phénoménale, et les
prix commencent à plonger. Lisez ceci : Another
Condo Bubble Bites the Dust
At Christie’s auction, only $78.1 million in post-war and contemporary art was sold. By comparison, at its auction a year ago, sales reached $658.5 million – over eight times this year’s tally!
Given the dismal conditions of the market this year, the auction was kept small: only 39 lots were offered, and all but one sold. But according to Art Net News, “activity and bidding in the sale room frequently seemed strained and sluggish throughout the sale.”
Art collectors that participate in these auctions are very wealthy, and most have enough liquidity to where they don’t have to sell, unless they’re caught up in a major financial nightmare. When the market gets shaky, they – and the industry gurus that advise them – figure that they might want to wait for better times rather than unload the art and further depress an already “apprehensive” market, as Brett Gorvy, Christie’s global head of postwar and contemporary art, called it euphemistically.
At Phillips, a boutique auction house owned by Russia’s Mercury Group, the auction offered 37 lots on Sunday. Three failed to sell. The rest sold for a total of $46.6 million, down by about half from a year ago.
“That’s largely a result of a contracting market,” Phillips CEO Ed Dolman told Bloomberg. “We are going to see smaller sales across the board.”
These investors – and their appetite for art – have been beaten up by a slew of unsavory post-QE factors: volatile stock markets, with some of the markets around the globe deep into a bear market; residential real estate in trophy cities that is starting to sag; an oil-price crash that hit Russian oligarchs particularly hard; crummy hedge-fund performance where some big-name hedge funds have turned into veritable money evaporators; PE firms that are starting to take losses….
These factors seemed unimaginable during the glory days of QE and “QE Infinity,” in the now bygone era when central banks were still considered omnipotent market inflators that would always be able to transfer more wealth to those who already had the most.
But now there’s anxiety among these investors that have become so much wealthier during those seven years of what Ben Bernanke called the “wealth effect.” Suddenly, they’re worried that this system has hit its limits, and that some sense of reality