Une petite banque suisse
du nom d’Alternative Bank Schweiz (ABS), a brisé la barrière des taux
d’intérêt négatifs sur les dépôts. Selon This is Money, la banque fait
désormais payer ses clients pour prendre soin de leur argent. La banque a
écrit à ses clients pour leur annoncer l’établissement d’un taux de -0,125%
sur leurs dépôts à compter de 2016 – et d’un taux de -0,75% sur les dépôts de
plus de 100.000 francs suisses. Sa décision fait écho à l’imposition par la
Banque nationale suisse de taux de dépôt de -0,75% aux institutions
financières qui disposent d’un compte auprès d’elle.
La banque centrale
suédoise a également introduit des taux d’intérêt négatifs, qui s’élèvent
actuellement à -0,35%. La Banque centrale européenne en a fait de même avec
ses taux à -0,2%. L’économiste en chef de la Banque d’Angleterre, Andy
Haldane, a expliqué en septembre que le Royaume-Uni pourrait avoir à
considérer des taux d’intérêt négatifs en tant que mesure de dernier recours
en cas de crise.
Les grosses banques
suisses ont transféré une partie du fardeau imposé par les taux à -0,75% de
la Banque nationale suisse à leurs clients institutionnels, mais ABS serait
la première banque de détail à imposer des frais à ses épargnants. La banque
se décrit comme étant une organisation éthique concentrée sur le soutien de
firmes qui investissent sur des projets sociaux et environnementaux. Ses
bilans s’élèvent à près d’1,6 milliard de francs suisses, et ses activités se
concentrent principalement sur les projets de logements sociaux, qui offrent
des logements abordables et proposent des solutions durables en termes d’énergie
ainsi que des terres agricoles organiques. Bloomberg nous en offre un aperçu
dans Less
Than Zero.
Imaginez une banque qui
paie des intérêts négatifs. Ses déposants doivent lui verser des frais pour
conserver leur argent sur leur compte. Aussi fou que cela puisse paraître, un
certain nombre de banques centrales européennes ont fait passer leurs taux
d’intérêt sous zéro pourcent et devraient les y maintenir pour plus d’un an.
Pour certains, il s’agit d’une tentative de revigorer une économie qui n’a
plus d’autres solutions. D’autres voudraient voir ces décisions forcer les
étrangers à placer leur argent ailleurs. Quoi qu’il en soit, c’est une
décision peu orthodoxe qui a fait souffler un vent de panique sur les marchés
financiers et qui pourrait avoir de lourdes conséquences. Si les taux
d’intérêt négatifs portaient leurs fruits en revanche, ils pourraient marquer
le début d’une nouvelle ère pour les banques centrales du monde.
Ayant un jour dit que la
Banque centrale européenne ne porterait pas ses taux plus bas, son
gouverneur, Mario Draghi, a signalé aux mois d’octobre et de novembre
derniers que les taux de dépôt pourraient être poussés davantage en
territoire négatif. La BCE est devenue la première banque majeure à
s’aventurer sous la barre de zéro pourcent en juin 2014. Elle impose
désormais aux banques des frais de 0,2% sur leurs dépôts. La Suède a
elle-aussi mis en place des taux négatifs, et le Danemark y a également eu
recours pour protéger l’arrimage de sa devise à l’euro. La Suisse a fait
passer ses taux de dépôt sous les zéro pourcent pour la première fois depuis
les années 1970. D’autres banques hésitent à mettre en place des taux
d’intérêt négatifs au risque de perdre leurs clients, bien que Julius Baer
ait déjà commencé à faire payer ses plus gros déposants.
Toile de fond
Les taux d’intérêt
négatif sont un signe de désespoir. Ils indiquent que les options
traditionnelles se sont prouvées inefficaces et que de nouvelles limites
doivent être explorées. Ils punissent les banques qui accumulent de l’argent
plutôt que prêter de l’argent à des entreprises ou à des prêteurs plus petits.
Des taux inférieurs à zéro n’avaient jusqu’alors jamais été mis en place au
sein d’une économie de la taille de la zone euro. Bien qu’il soit encore trop
tôt pour juger de leur fonctionnement, Draghi a promis en 2012, au plus
profond de la crise, de faire « tout son possible » pour sauver la
devise unique, et de se montrer innovant. La BCE a choisi d’expérimenter avec
les taux négatifs avant de se tourner vers des programmes de rachat
d’obligations comme ceux mis en place aux Etats-Unis et au Japon.
Argument
En théorie, des taux
d’intérêt inférieurs à zéro devraient réduire les coûts d’emprunt pour les
entreprises et les ménages, et alimenter la demande en prêts. En pratique, il
existe un risque que cette politique fasse plus de mal que de bien. Si les
banques font payer leurs clients pour conserver leur argent, cet argent
pourra finir par être accumuler sous le matelas plutôt qu’en banque. Janet
Yellen, gouvernante de la Réserve fédérale, a expliqué suite à sa nomination
en novembre 2013 que des taux d’intérêt positifs mais proches de zéro
pourraient causer des dommages aux marchés monétaires qui financent les
institutions financières. Deux ans plus tard, elle a décrété qu’une
transformation des circonstances économiques pourrait rendre possibles des taux
d’intérêt négatifs aux Etats-Unis. Le gouverneur de la Banque d’Angleterre,
Mark Carney, a annoncé qu’il prévoyait de passer les taux d’intérêt
britanniques sous la barre des 0,5% si nécessaire.
Distorsions
économiques
Contrairement à
l’Europe, les Etats-Unis disposent de fonds des marchés monétaires qui se
trouveraient potentiellement détruits par des taux négatifs. Les banques
pourraient subsister un temps en faisant grimper certains frais, mais les
fonds des marchés monétaires rencontreraient des problèmes immédiats. Leurs
clients pourraient retirer leur argent pour le placer auprès des banques dont
les frais seraient moins élevés ou tout simplement pour le conserver sous
leur matelas. Ceux qui touchent des revenus fixes en souffriraient le plus.
Si les clients retiraient leur argent, ce que je pense qu’ils feraient si les
taux passaient un peu trop dans le rouge, il y aurait des paniques bancaires.
Mais des paniques auraient d’abord lieu sur les fonds des marchés monétaires.
Quelqu’un doit être
propriétaire de la monnaie
Notez également
l’absurdité de la thèse des banques centrales. Elles veulent que les gens
dépensent leur argent. Mais il doit toujours y avoir quelqu’un pour détenir
les dollars en circulation. Achetez un bonbon et mangez-le, ou achetez un
manteau et portez-le. Vous l’aurez acheté grâce à de l’argent qu’un magasin
possède désormais. Mathématiquement, quelqu’un doit toujours être
propriétaire de la monnaie.